Agriculture de conservation des sols
« Le paysage agricole de demain doit être vert et non plus marron » selon Sébastien Roumegous, agronome et fondateur de Biosphères
VetAgro Sup lance en ce début d’année une série de webinaires ayant pout thème « Refonder l’agriculture à l’heure de l’anthropocène : un nouveau regard sur l’entreprise agricole ». Le sujet du premier d’entre eux était : « Comment reconfigurer une filière dans la perspective de l’agriculture régénératrice ? ».
VetAgro Sup lance en ce début d’année une série de webinaires ayant pout thème « Refonder l’agriculture à l’heure de l’anthropocène : un nouveau regard sur l’entreprise agricole ». Le sujet du premier d’entre eux était : « Comment reconfigurer une filière dans la perspective de l’agriculture régénératrice ? ».
Spécialisé dans la culture et la valorisation alimentaire des céréales, Vivescia appartient à 10 000 agriculteurs du Nord-Est de la France. Invité à donner son avis sur le sujet, Christophe Büren, agriculteur et président de la coopérative explique lors du wébinaire organisé par VetAgro Sup: « Notre coopérative est engagée dans l’agriculture de conservation depuis une vingtaine d’années. Tout a commencé parce que des agriculteurs se sont interrogés sur le moyen de faire des économies et qu’est venue s’ajouter à ce questionnement la directive nitrates de 1991. Certains agriculteurs sont même partis à l’étranger et se sont rendus compte que l’on pouvait faire autrement ». Pour développer cette nouvelle approche, Vivescia a recruté Jean-Luc Forrler, ingénieur agronome, qui est devenu chef de projet « conservation des sols » et anime, depuis 2005, le club Vivesciagrosol.
L’agriculture de conservation des sols qui est encore une niche au sein de l’agriculture française se développe mais qu’en sera-t-il en 2030 ? « A cette date, il faudra avoir une approche d’agriculture régénératrice encore plus que celle d’une agriculture de conservation des sols. Bien sûr, nombreux sont les agriculteurs à s’intéresser à cette démarche et c’est eux qui vont décider de l’intégrer, mais à leur rythme car il faut prendre en compte de nombreux facteurs comme les cultures, les moyens financiers ou encore les territoires. L’important est de multiplier les essais agronomiques d’où l’extension des clubs agrosol, au nombre d’une quinzaine aujourd’hui » explique Christophe Büren qui affirme que l’approche carbone doit se greffer à la réflexion en expliquant : « En 2019, la Coopérative Vivescia et Malteurop ont lancé une première expérimentation en partenariat avec Heineken sur la culture d’orges bas carbone. Cette expérimentation de trois ans a pour objectif de mesurer les émissions de GES issues de la production d’orge ».
Verrous sociaux et techniques
« Le paysage agricole de demain doit être vert et non plus marron » tel est le credo de Sébastien Roumegous, agronome, expert en agroécologie et systèmes alimentaires et fondateur de Biosphères. « Après plus de dix ans de travail sur le terrain auprès de groupes de producteurs, de grandes entreprises et de collectivités, je me suis rendu compte que la transition agroécologique est complexe et qu’elle requiert un ensemble de compétences clés qui ne peuvent pas être mises en œuvre séparément » explique-t-il avant de poursuivre : « Aujourd’hui, quand on parle d’agriculture de conservation des sols, il y a des verrous sociaux, culturels et humains et aussi techniques, mais surtout humains. La proportion est de 60 % pour les verrous de première catégorie et de 40 % pour la seconde, voire de 70 % et 30 %. Faire changer les pratiques n’est pas facile, c’est pour cela que notre but chez Biosphères est d’accompagner les agriculteurs en leur proposant évaluations et formations. Pour ce faire il faut tout d’abord opérer un bon diagnostic de la situation en écoutant ce qu’on nous dit dans l’exploitation pour échafauder ensuite un plan de progression pour un mieux économique et technique.
Pour ce qui est de la formation, l’agronome explique : « Elle doit se passer en groupe car elle permet de travailler ensemble. Nous créons des groupes d’entraide et de discussion. Il faut compter entre trois et cinq ans pour avoir des résultats sur le terrain. Nous estimons que 10 à 15 % des agriculteurs sont intéressés par l’agriculture de conservation ». Sébastien Roumegous estime que les formations à l’agriculture de conservation des sols font gagner du temps et du revenu à l’agriculteur car elles ont trait à la rationalisation du temps de travail. Ce dernier estime que l’industrialisation des itinéraires de production crée des problématiques environnementales, d’où la nécessité de régénérer les paysages en accordant une place centrale à l’arbre, mais de manière organisée. Christophe Büren conclut : « Le marché est demandeur de produits issus de l’agriculture conservatrice des sols. Les agriculteurs qui se lancent ou veulent se lancer dans cette démarche doivent sortir de leur zone de confort et c’est à nous de les aider ».