[Dossier] Des essais de rouleaux pour gérer le couvert de l'interrang
Nicolas Figeac, animateur et conseiller agroéquipement à la fédération des Cuma des Charentes a organisé des essais de destruction du couvert hivernal avec des rouleaux en 2018, 2019 et 2020. Il nous livre les principaux constats qui en sont ressortis.
Nicolas Figeac, animateur et conseiller agroéquipement à la fédération des Cuma des Charentes a organisé des essais de destruction du couvert hivernal avec des rouleaux en 2018, 2019 et 2020. Il nous livre les principaux constats qui en sont ressortis.
En trois ans, la fédération des Cuma des Charentes a testé dix modèles de rouleaux différents. Comme pour tout essai, les conditions de tests doivent être gardées en tête pour apprécier les résultats. « Chaque outil a été évalué dans des conditions similaires et le même jour. Il est possible qu’un matériel présente des résultats différents en fonction des conditions d’essais, compte tenu en plus de la variété des configurations », prévient Nicolas Figeac. Il souligne que des options ou modifications proposées par les constructeurs sont susceptibles d’améliorer certains résultats obtenus.
Pas de réussite sans un couvert bien dense
Au préalable, le conseiller insiste sur un point essentiel, c’est souvent sur la qualité du couvert que se trouvent les échecs : « quand on commence à parler de roulage, c’est qu’on a été bon sur le reste ». Quel que soit l’outil choisi, il faut donc d’abord réussir à obtenir un couvert dense et haut. « C’est l’effet de la 'masse végétale' qui génère un flux de végétation homogène lors du passage du rouleau. Dans ce cas, les éléments du rouleau (lames, pointes, …) sont en contact direct avec le végétal et l’outil plaque l’ensemble au sol avec plus de pression. » Si le couvert n’est pas assez dense, autant sortir le broyeur pour éviter que le rouleau ne gratte le sol que l’on cherche justement à ne pas travailler. Dans l’essai, l’efficacité du Geacut a paru la plus dépendante d’une densité de couvert très importante.
A découvrir notre vidéo sur l'orbis
Il s’agit plus de gérer le couvert que de le détruire
« L’objectif premier est de constituer un mulch de surface et de l’entretenir. La finesse et la longévité du mulch seront différentes suivant l’agressivité du rouleau », définit Nicolas Figeac. Le conseiller préfère d’ailleurs parler de gestion du couvert plutôt que de destruction. L’art de ce mulch réside dans le pincement prononcé du végétal, aboutissant à son couchage, la coupe totale n’étant pas souhaitée. Dans les essais, cet effet recherché s’est montré le plus satisfaisant avec les modèles Viticut, Eco Rouleau, RVV et Rolo Jack.
Pour juger de l’efficacité, il ne faut donc pas s’arrêter à l’effet immédiat mais voir l’évolution dans les 15 jours qui suivent. Il ne faut pas non plus s’attendre à ce que tout soit détruit. Certains éléments vont se redresser ou repousser. « Bon nombre de graminées sont difficiles, voire impossible (certaines avoines) à détruire avec ces rouleaux », prévient-il. L’expérience permet de repérer les espèces de graminées adéquates et de les intégrer dans un mélange pour favoriser leur destruction par effet d’étouffement de la masse végétale.
« Attention aux rouleaux trop agressifs à lames qui ont tendance à couper le végétal plutôt que de le blesser. Après leur passage, il est possible que les graminées repoussent au niveau de la coupe », alerte Nicolas Figeac. Sur ce critère, le modèle Geacut s’est avéré le plus coupant.
Prévoir plusieurs passages quel que soit l’outil
Compte tenu de la destruction partielle recherchée, il est conseillé de multiplier les passages. « Au moins deux et dans les sens opposés et à au moins 15 jours d’intervalle, surtout si le rouleau est attelé à l’arrière du tracteur », préconise Nicolas Figeac. Cette méthode permet de « blesser » le végétal sur l’autre face. Il incite d’ailleurs à préférer un attelage frontal. « À l’arrière, le problème c’est qu’on écrase le couvert avec les roues et qu’ensuite le rouleau travaille moins bien. Ce qui se relève en premier, c’est souvent là où il y a eu le passage des roues ».
L’effet sur le végétal dépend de plusieurs facteurs
C’est par ses impacts sur le végétal que le rouleau fait son effet. Pour accentuer le taux de matière touchée, certains outils cumulent deux rouleaux. C’est le cas du Roll Krop, du Viticut, de l’Eco Rouleau et du Packer à lames hacheuses. L’inclinaison des lames et les rouleaux en K du Roll Krop poursuivent aussi ce but.
Le poids important favorise le contact au sol. Certains constructeurs proposent d’ajouter des masses pour améliorer ce facteur. Les essais ont montré des limites pour les rouleaux légers (Roll Krop, Clemens, RVF). Le Rolo Jack, léger à la base, compense grâce à un report de charge du tracteur. Mais le seul poids n’est pas déterminant. Le Geacut fait ainsi partie des plus lourd mais pas des plus convaincants sur tous les critères.
La forme des lames joue également. Dans les essais, les lames droites s’en sont un peu moins sorties (Clemens, Packer à lames droites, Geacut) que les hélicoïdales (Roll Krop, Eco Rouleau) ou les ondulées (Rolo Jack). Le modèle Bionalan adopte un rouleau au sol à lames droites mais l’associe à un rouleau défibreur « hors sol » réalisant un premier travail de destruction. Spécifiques, les éléments en fonte « indépendants » de 5 cm composant le rouleau du Roll’n’sem se révèlent un atout pour répartir le poids uniformément sur toute la surface du sol.
Le moment d’intervention compte aussi
« Il faut résister à la tentation de le détruire trop tôt », plaide Nicolas Figeac. Il souligne qu’un couvert détruit trop tôt, apportera moins d’éléments nutritifs au sol qu’un couvert plus développé. Pour les graminées, « intervenir au stade épi maximise le taux de destruction », conseille-t-il. Le problème est la menace de gel. « À ce jour, il est difficile de juger le rôle positif ou négatif lors du gel. Il est néanmoins conseillé de le détruire avant les gelées de printemps. Il est possible d’avancer les dates de semis pour détruire le couvert plus tôt et ainsi limiter ce risque. »
Lire aussi : Quels effets de l'herbe et du travail du sol sur le risque de gel en viticulture ?