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Inquiétude européenne sur le transport des chevreaux

L’interprofession de la viande caprine rejette le projet de loi européen visant à restreindre les conditions de transport des chevreaux, craignant que cela fragilise encore davantage une filière déjà en difficulté.

« En France, les chèvres sont élevées principalement pour le lait, alors qu’ailleurs dans le monde, la viande est le premier produit visé, observait Gérard Chabauty, président de la section caprine d’Interbev, en introduction de la journée viande caprine organisée par la Fédération nationale des éleveurs de chèvres (Fnec), le 3 décembre à Paris, dans le cadre du plan de relance chevreau. Actuellement, la production de viande de chevreaux est en baisse. Néanmoins, des engraisseurs sont prêts à parcourir de longues distances sur le territoire pour collecter des chevreaux, démontrant ainsi l’intérêt économique que revêt la production. »

Une révision de la réglementation sur le transport pouvant nuire à la filière viande caprine

Pourtant, la question du transport d’animaux vivants dont s’est emparée la Commission européenne inquiète la fragile filière. La révision en cours du règlement européen fait suite à l’avis publié en 2022 par l’Autorité européenne de sécurité sanitaire des aliments (Efsa) ; lequel formule des recommandations en matière de transport d’animaux vivants.

Parmi les points principaux qui ressortent : la diminution des temps de transport autorisés (au maximum 9 heures vers un abattoir et 40 heures hors abattoir), la diminution des densités de chargement, la supervision du chargement et du déchargement par un vétérinaire, ainsi que le renforcement des conditions de transportabilité, qui conduirait à l’interdiction de transporter des chevreaux âgés de moins de trois semaines sur une distance supérieure à 100 kilomètres.

Plus d’un quart des chevreaux engraissés est à plus de 100 kilomètres

Bien qu’une majorité de ces recommandations soient inapplicables en l’état, c’est surtout l’interdiction de transport sur plus de 100 kilomètres qui inquiète la filière caprine. Face au projet réglementaire, la position de la filière est de rejeter en bloc. Selon une étude d’impact en cours menée par l’Institut de l’élevage, la nouvelle réglementation sur le transport entraînerait une réduction de la capacité de chargement de 50 % pour les caprins, ce qui doublerait le nombre de camions nécessaires. Il ressort que 28 % des chevreaux ne seraient plus en mesure de rejoindre un élevage d’engraissement.

La position officielle de la France n’a pas encore été définie sur le sujet, les discussions au niveau européen n’ayant pas encore commencé. Celles-ci pourraient débuter soit au premier ou second semestre de 2025, en fonction des priorités des présidences polonaise et danoise du Conseil de l’Union européenne.

Une légère baisse du nombre d’abattage de caprins

Les données de conjoncture ont été présentées par Virginie Hervé-Quartier, agriéconomiste à l’Idele. En novembre-décembre 2023, le nombre de chevreaux abattus est en baisse de 5 %, tandis qu’en mars-avril 2024, une hausse a été relevée de l’ordre de 8 %. Le cumul de la dernière campagne (de septembre 2023 à août 2024) montre une légère diminution du nombre de chevreaux abattus (-1 %), qui est liée à une baisse sur la période de Noël. Le nombre de chèvres de réforme abattues est en baisse de 5 % par rapport à 2023, expliqué en partie par l’adoption croissante des lactations longues.

Astrid Debacq

Une carte interactive des abattoirs recevant des chevreaux

Des outils sont mis à disposition par Interbev dans le but de renforcer les liens entre éleveurs et abatteurs en vue de promouvoir l’engraissement à la ferme.

<em class="placeholder">François Frette, animateur de la section ovine et caprine d&#039;Interbev.</em>

« Pour développer l’engraissement à la ferme, il est nécessaire de disposer d’une possibilité de collecte des chevreaux ainsi que d’abattage et de découpe. Les prestataires de services en abattage et découpe peuvent conserver ou bien ouvrir une activité spécifique pour les chevreaux, à condition d’avoir une visibilité sur les volumes à traiter », précise François Frette, animateur de la section ovine et caprine d’Interbev.

Le maintien des ateliers d’abattage pour les chevreaux est cependant rendu difficile par le contexte économique actuel. Pour y remédier, des outils de communication, tels que des fiches et des plaquettes d’information, ont été diffusés par Interbev. François Frette rappelle qu’une cartographie des abattoirs prestataires est disponible sur abattoirs-chevreaux.fr afin de trouver l’abattoir le plus proche de chez soi.

Gare à la disparition d’abattoirs !

Néanmoins, des freins majeurs ont émergé récemment. Une série de contrôles sur la protection animale, menée au printemps 2023, a entraîné l’arrêt de l’abattage de chevreaux dans plusieurs établissements. Par ailleurs, la baisse des cheptels bovins et ovins, conjuguée à une hausse des coûts de production (notamment de l’énergie), pèse lourdement sur les abattoirs, provoquant des fermetures de sites. En seulement quatre ans, la filière a perdu quinze abattoirs de chevreaux, soit une diminution de 10 %.

Le plan abattoirs, entrepris par le gouvernement précédent, semble avoir été abandonné par la nouvelle administration. Cette situation est préoccupante, car trois zones géographiques sont particulièrement vulnérables face à une éventuelle disparition des abattoirs : la Normandie et le Nord Bretagne, le Grand Est et la région Paca. Pour ces territoires particulièrement identifiés comme étant des zones sensibles, la nécessité du maintien des outils d’abattage de chevreaux de proximité est primordiale.

Chevreaux de nos terroirs et de Pâques

<em class="placeholder">Gigot de chevreau</em>

Lancé en 2023, le plan de relance Chevreau, piloté par Interbev Caprin, poursuit les actions menées dans le cadre du projet ValCabri, visant à améliorer la valorisation de l’engraissement des chevreaux, de l’éleveur au consommateur. En 2024, le projet Casdar Cabri + a démarré, permettant de continuer les travaux sur l’engraissement des chevreaux à la ferme. Neuf groupes territoriaux d’éleveurs ont été formés pour organiser des réunions de travail avec pour objectif de dresser un état des lieux territorial, d’identifier les freins et leviers, et de définir un plan d’action pour la période 2025-2026. Un inventaire des ressources existantes sera mis à disposition des acteurs de la filière sur le site Internet idele.fr/cabri-plus/. Des notices présentant ces ressources, telles que « Comment allaiter ses chevreaux ? », seront structurées autour de sept thématiques (itinéraires techniques, économie, réglementation, etc.) et permettront de centraliser et de diffuser les connaissances sur l’engraissement des chevreaux à la ferme.

En parallèle, Interbev poursuit sa stratégie de communication sur la viande de chevreau. Deux événements majeurs de communication sont prévus en 2025 : le « chevreau de nos terroirs » en mars et le « chevreau de Pâques » en avril. Des affiches et des livrets de recettes seront disponibles, accompagnés d’animations de dégustation.

Un déficit de chevreaux de Noël à combler

Le nombre de chevreaux abattus diminue chaque année, avec une baisse particulièrement marquée pendant la période de Noël. Selon les abatteurs, il manque 15 000 chevreaux gras pour satisfaire la demande des clients. Les acteurs de l’aval souhaitent améliorer l’approvisionnement durant cette période et se disent prêts à garantir aux éleveurs naisseurs à la fois le prix et les volumes achetés. Ils sont également disposés à accorder aux éleveurs qui produisent en partie pour Noël une priorité pour la collecte de leurs chevreaux avant Pâques, leur assurant ainsi un débouché.

Partant de ce constat, Interbev a élaboré un argumentaire visant à encourager la production de chevreaux de Noël, période de l’année offrant la meilleure valorisation. « Les cibles prioritaires sont les éleveurs dont l’organisation du travail les contraint à faire une partie des mises bas à l’automne, ceux qui ont déjà mis en place des lactations longues (sans astreinte supplémentaire pour la traite en période de fêtes de fin d’année), ainsi que les éleveurs des plaines sèches qui n’auraient pas de problèmes de baisse de production laitière, contrairement à ceux confrontés à des pics de froid ou d’humidité », précise François Frette.

« Fournir des chevreaux à Noël est un moyen de restructurer la filière en répartissant mieux les ventes et en évitant la saturation vers Pâques. Par effet rebond, les clients seront plus enclins à promouvoir le chevreau en mars-avril. » Selon les données d’Ovinfos, de nombreux éleveurs commencent déjà à produire des chevreaux dès le mois de novembre.

Rédaction Réussir

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