Des nouvelles formalités pour les ventes de vin en Europe
Pour bénéficier du régime d’exonération de TVA sur les ventes intracommunautaires, la loi de Finances pour 2020 renforce les obligations des vendeurs et alourdit les sanctions en cas de manquement. Le point avec Olivier Augeraud, expert-comptable associé du Groupe BSF, membre d'AgirAgri.

Pourquoi la France prend-elle ces dispositions ?
Une directive du 4 décembre 2018 a prévu un renforcement des conditions d’exonération de TVA des livraisons intracommunautaires de biens, afin de renforcer la lutte contre la fraude. Ce texte a modifié en conséquence la directive TVA. Et dans le prolongement, la France a dû adapter ses textes nationaux. Elle l’a fait via l’article 34 de la loi de Finances pour 2020.
Quelles sont les nouvelles formalités ?
Jusqu’ici, pour bénéficier de cette exonération de TVA, le viticulteur devait respecter quatre conditions cumulatives (1) :
- Effectuer une livraison de biens (vins) à titre onéreux (vente) ;
- Être assujetti à la TVA sur l’activité viticole en qualité de vendeur ;
- Avoir un client assujetti à la TVA ou, s’il ne l’est pas, qu’il ne bénéficie pas non plus du régime dérogatoire à la taxation de ses acquisitions (PBRD) qui lui permettrait d’opter pour la taxation à la TVA dans son pays ;
- Expédier ou transporter le vin hors de France à destination d’une autre État membre, quelle que soit la personne qui effectue le transport (expédition, livraison ou enlèvement).
Pour les ventes effectuées depuis le 1er janvier 2020, deux conditions s’ajoutent :
- Votre client doit être identifié à la TVA dans un État membre autre que celui du départ ou d’expédition des biens et il doit vous avoir communiqué préalablement son numéro de TVA ;
- Vous devez avoir souscrit la déclaration d’échange de biens (DEB) avec toutes les informations requises (2).
D’un point de vue pratique, qu’est-ce que cela change ?
Vous devrez désormais, en votre qualité de vendeur, avoir collecté le numéro intracommunautaire de votre client et en avoir vérifié la validité dans la base VIES au plus tard au moment de l’émission de la facture (3). Ce n’est en effet, qu’à cette condition que vous êtes autorisé à ne pas facturer la TVA sur le document émis. Enfin, vous devrez avoir souscrit des DEB conformes, c’est-à-dire déposées dans le délai légal et comprenant tous les justificatifs.
Les viticulteurs ne devaient-ils pas déjà veiller à ce formalisme ?
En effet, ces deux conditions étaient jusqu’à présent des conditions formelles et non des conditions de fond pour bénéficier de l’exonération de TVA. Autrement dit, le manquement à l’une de ces deux conditions (non-communication et/ou non-vérification du numéro de TVA intracommunautaire de vos clients et dépôt de DEB non conformes ou absence de dépôt) était passible des seules sanctions administratives (amendes et pénalités). Leur légalisation entraîne désormais en sus, le rappel de la TVA assorti des intérêts de retard.
Quelles sont ces nouvelles sanctions ?
Les sanctions en cas de manquement à l’obligation de dépôt de la DEB ou d’erreurs lors du remplissage de celle-ci, sont prévues aux articles 1788 sexies du CGI et 467-4 du Code des douanes. Ces textes prévoient une amende de 750 € par déclaration manquante ou déposée hors délai. Elle peut être doublée si le redevable ne régularise pas sa situation dans les 30 jours de la mise en demeure. Chaque omission ou erreur dans une déclaration donnera lieu à une amende de 15 €, sans excéder au total 1 500 €.
Par ailleurs, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle de la DEB, la douane bénéficie d’un droit de communication et de renseignement et d’un droit de convocation. La non-réponse à ces demandes dans un délai fixé par le service, peut entraîner une autre amende de 1 500 €.
Ces amendes peuvent-elles être répercutées sur le client ?
Le redressement de TVA intervenant à la faveur d’un contrôle fiscal postérieur à la vente, il est vraisemblable que vous ne puissiez en répercuter le montant auprès de votre client, lequel aura déclaré régulièrement la TVA sur l’acquisition intracommunautaire dans l’État membre d’arrivée des biens… Il est donc plus que jamais nécessaire de bien organiser avec vos conseils, la collecte des informations, leur vérification et le formalisme déclaratif de la DEB.
(2) Prévue à l’article 289 B du CGI.
(3) europa.eu/youreurope/business/taxation/vat/check-vat-number-vies/index_fr.htm