Des gommes pour arrondir les angles
Si les propriétés stabilisantes des gommes arabiques enrichies en mannoprotéines semblent limitées, les œnologues vantent en revanche leurs bienfaits pour arrondir les vins et gagner en gras.
Si les propriétés stabilisantes des gommes arabiques enrichies en mannoprotéines semblent limitées, les œnologues vantent en revanche leurs bienfaits pour arrondir les vins et gagner en gras.
Commercialisées depuis deux ans, les gommes arabiques enrichies en mannoprotéines se sont déjà fait une place au sein des chais. « Pour garantir la stabilité colloïdale des vins », assure Franck Hermann, directeur commercial de la Littorale, qui distribue la Senso Ü. Selon Gaëlle Rifflet, œnologue à l’Énosens de Grézillac, en Gironde, les mannoprotéines apportent volume et saveur, en plus des propriétés enrobantes de la gomme. « Cela donne des vins plus gourmands et plus expressifs, explique-t-elle. Les mannoprotéines se lient aux tanins et les assouplissent beaucoup plus que la gomme seule. » Du côté de Narbonne, Gilles Dejean, PDG du laboratoire éponyme, a lui aussi testé ces nouvelles formulations. « Elles sont très intéressantes pour leur côté enrobant, sucrant, confirme-t-il. En revanche, il faut savoir qu’elles ont peu d’effet protecteur vis-à-vis de la matière colorante. » Il conseille donc à ses clients de les associer à des gommes traditionnelles, pour leur côté stabilisant. « Récemment, un vigneron est venu me voir car il voulait atténuer des tanins un peu durs sur un vin de cette année, à commercialiser rapidement, illustre-t-il. Après essais, nous sommes partis sur 10 centilitres par hectolitre (cl/hl) de cette nouvelle formulation et 10 cl/hl d’une gomme classique. » Dans le Bordelais, Matthieu Rey suit la même approche. « Et en couplant les deux types de gommes, généralement, les vignerons s’y retrouvent financièrement », remarque-t-il. Reste à bien définir les doses d’emploi. « Pour les gommes enrichies en mannoprotéines, je dépasse rarement 7 à 8 cl/hl sur blancs et rosés, précise-t-il. Quant aux rouges, je préconise à mes clients entre 10 et 20 cl/hl. » Mais les œnologues sont unanimes sur la nécessité de réaliser des tests en amont pour éviter les mauvaises surprises. « C’est exactement comme pour les colles, observe Gaëlle Rifflet. Ces produits peuvent entraîner des déséquilibres. Nous avons déjà eu des vins qui étaient perçus de manière plus acide après traitement. Donc il faut absolument faire des essais au préalable. » Et dans l’idéal, mieux vaut attendre quelques jours pour déguster. « Histoire que le produit se fonde un peu », commente Anne Kabakian, œnologue conseil au laboratoire d’Eauze, en Gascogne.
Des produits simples d’utilisation, à incorporer à la mise
S’il n’existe pas de profil type, ces solutions semblent quand même plus adaptées aux rouges légers, manquant de souplesse sur la finale. « En revanche, je le déconseille sur les rouges un peu alcooleux, qui présentent déjà de la sucrosité. Car cela peut les alourdir », note Anne Kabakian. Ces produits s’avèrent aussi intéressants sur les liquoreux, « car ils permettent de rééquilibrer certaines finales un peu acides, pour éviter d’avoir un creux au moment de la dégustation », constate-t-elle. De même, « sur les vins moelleux qui n’ont pas énormément de sucres, et donc pas beaucoup de gras, ces formulations sont très intéressantes », observe Matthieu Rey. Les gommes arabiques enrichies en mannoprotéines sont simples d’utilisation. Elles s’incorporent à la mise et n’ont pas besoin d’être éliminées. « Il faut les mettre au dernier moment pour éviter les problèmes de colmatage lors de la filtration finale, recommande Gaëlle Rifflet. L’idéal serait même de les mettre au goutte-à-goutte, via une pompe doseuse au moment de la mise. » En revanche, bon nombre d’œnologues s’interrogent sur la durabilité dans le temps de ces solutions. « Pour l’heure, nous manquons encore de recul à ce niveau-là », reconnaissent-ils en chœur.
Différents produits sur le marché
Plusieurs firmes proposent des gommes enrichies en mannoprotéines sur le marché. On note notamment la Subli’sense de Lamothe-Abiet, la Senso Ü pour la Littorale, la Soupplane, commercialisée par AEB et la Gomasol Seda, distribuée par Agrovin. Laffort planche également sur le sujet et devrait sortir sa version dans les mois à venir. Côté prix, il faut généralement compter entre 5 et 8 euros le kilo.