Crise viticole : prendre les difficultés de trésorerie à bras-le-corps
Quand les trésoreries sont mises à mal, il convient de réagir vite et de ne pas laisser la situation perdurer. Plus les difficultés sont anticipées, plus les solutions sont nombreuses et efficaces. Le point avec Claire Vidal-Bessonnet, consultante chez Exco, membre du groupement d'experts-comptables et avocats AgirAgri.
Quand les trésoreries sont mises à mal, il convient de réagir vite et de ne pas laisser la situation perdurer. Plus les difficultés sont anticipées, plus les solutions sont nombreuses et efficaces. Le point avec Claire Vidal-Bessonnet, consultante chez Exco, membre du groupement d'experts-comptables et avocats AgirAgri.
Covid, gel, sécheresse, inflation… La viticulture subit une succession de crises impactant durement l’équilibre économique des entreprises déjà fragilisées par un marché difficile. Cela s’ajoute à un endettement souvent significatif. De nombreuses exploitations rencontrent donc (ou vont rencontrer) d’importantes difficultés de trésorerie.
Dans ce contexte, l’anticipation est la clé de la réussite d’un redressement ou d’un maintien de l’entreprise. Il est important de réagir avant d’être en état de cessation de paiements. L’expert-comptable est l’interlocuteur privilégié dans ces situations difficiles. Avec lui, un travail d’analyse de la situation et de projection de l’activité doit être mené afin de calibrer les besoins actuels et futurs. Évaluer le degré de difficultés de l’entreprise va permettre de chercher des solutions adaptées et de construire ensemble une stratégie de rebond à la fois technique et économique.
Anticiper les problèmes et négocier
À court terme, plusieurs dispositifs amiables peuvent être mis en place, en association avec le partenaire bancaire : l’établissement d’échéanciers sur des dettes fournisseurs ou des dettes fiscales et sociales est une solution simple mais qui ne peut pas être une solution unique à un problème financier de fond. De même, le refinancement d’investissements autofinancés peut permettre de dégager de la trésorerie mobilisée à tort dans des investissements moyen ou long terme (plantation par exemple).
Selon les options contractuelles, une modulation de l’échéance de certains prêts peut être mise en place facilement. Ainsi, une pause de 6 à 12 mois peut laisser du temps à l’entreprise pour remuscler sa trésorerie. Dans ce cas, mieux vaut privilégier l’allongement de la période de remboursement des intérêts que le report sur la durée restant à courir afin de maintenir les échéances initiales. Le recours à « l’année blanche » sur la totalité des prêts en cours reste possible (modulations non contractuelles) mais nécessite une instruction plus poussée par les services de crédit.
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L’allongement de la durée de certaines dettes (PGE notamment - voir l’encadré) est une autre option à étudier afin de limiter les remboursements d’emprunt en période de crise et ainsi diminuer les besoins de trésorerie. Enfin, lorsque la situation nécessite une restructuration totale de la dette, le viticulteur peut solliciter une consolidation des crédits, autrement dit un groupement des crédits. Cette demande de financement n’est pas neutre pour l’entreprise et sa poursuite d’activité.
Plusieurs de ces dispositifs peuvent être articulés ensemble. Si la banque est réticente, il est possible de recourir au médiateur du crédit (PGE inférieur à 50 000 euros) ou au conseiller départemental à la sortie de crise (PGE supérieur à 50 000 euros).
Se faire accompagner pour affronter les difficultés
Le mandataire ad hoc et le plan de sauvegarde peuvent également être actionnés en amont des difficultés. Lorsque la situation est trop dégradée et l’état de cessation de paiements constaté, c’est la procédure de redressement judiciaire qui s’impose. Toutes ces procédures dites « collectives » sont efficaces. Il ne faut pas les craindre mais l’entreprise et son dirigeant doivent bien s’y préparer.
La politique de l’autruche ne fonctionne jamais. Actionner ces dispositifs reste inévitable pour passer les périodes de crises. Pour autant, leurs conséquences ne sont pas neutres sur l’entreprise et la poursuite de son activité. L’accompagnement a un coût qui doit être intégré : honoraires d’intervention, frais de dossiers bancaires, nouveaux taux d’intérêt… De plus, selon l’estimation de la fragilité financière de l’entreprise et du dispositif actionné, l’entreprise peut se voir refuser l’obtention de nouveaux financements du fait de la dégradation de sa notation bancaire, ce qui limitera son développement.
Être accompagné est primordial pour gérer au mieux ces périodes difficiles.
Les prêts bonifiés, relais des PGE
Jusqu’au 31 décembre 2023, il est possible de renégocier son prêt garanti par l’État (PGE) afin d’allonger la durée de remboursement (jusqu’à dix ans) via la médiation des établissements bancaires.
Dès janvier 2024, les entreprises viticoles peuvent demander à basculer leur PGE sur un dispositif de prêt à taux bonifié. L’objectif étant d’étaler dans le temps leurs obligations bancaires. Mais attention, ce dispositif sera adossé aux « aides de minimis » et donc plafonné.
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