Crise viticole : un plan se met en place
Au sortir de la réunion du 6 février avec le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, la filière vin se sentait rassurée de voir ses solutions concernant l’arrachage, les PGE et la distillation prises en compte. Elle espère les voir se finaliser d’ici le salon de l’Agriculture qui débute le 25 février.
Au sortir de la réunion du 6 février avec le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, la filière vin se sentait rassurée de voir ses solutions concernant l’arrachage, les PGE et la distillation prises en compte. Elle espère les voir se finaliser d’ici le salon de l’Agriculture qui débute le 25 février.
La filière vin avait rendez-vous le 6 février avec le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau pour examiner les dispositifs à actionner face à la crise viticole. Il s’agissait de la réunion initialement prévue le 26 janvier qui avait été reportée « en raison de contraintes d’agenda et de sujets et propositions qui nécessitent un temps d’expertise supplémentaire », avait alors indiqué le ministère. Autant dire que ce rendez-vous était particulièrement attendu.
Les outils avancés par la filière retenus
« Il y a une vraie volonté du ministre d’avancer », estime Gérard Bancillon, président de VinIGP, au sortir de la réunion, constatant une reconnaissance de l’atout économique du vin pour l’économie française et donc l’intérêt de soutenir ce secteur.
« Avec satisfaction, nous avons constaté que le ministre s’était engagé sur les solutions que nous proposons », se réjouit de son côté Jean-Marie Fabre, président des Vignerons Indépendants. « Le ministre a compris l’enjeu des difficultés de la filière et a commencé à élaborer un plan de crise. Il est à affiner et préciser car des mesures vont nécessiter des arbitrages au niveau européen », résume pour sa part Jérôme Despey, président du Conseil spécialisé vin. La filière attend des précisions sur la mise en œuvre concrète des mesures évoquées, au plus tard pour le salon de l’Agriculture (25 février – 5 mars 2023).
Une première campagne de distillation dès le printemps
Sur la distillation, outil de crise conjoncturel demandé notamment par le Languedoc, Gérard Bancillon, qui porte ce dossier, estime le besoin à 3 millions d’hectolitres. Jérôme Despey évoque plutôt l’objectif de 2,5 millions d’hectolitres. Mais c'est d'abord sur le budget envisageable que les discussions ont porté.
Pour cette mesure, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau propose un financement étalé sur deux exercices du Feaga (chaque exercice débute mi-octobre), à raison de 80 millions d’euros pour chacun, donc pour un total de 160 millions d’euros. La première salve serait lancée au printemps, et la seconde après le 15 octobre 2023. Le financement proviendrait à part égale de l’Etat et de crédits non consommés de l’OCM vitivinicole, donc sans amputer le montant des appels à projets actuellement lancés. Mais Jérôme Despey indique que le souhait de la filière est un financement a minima à hauteur de 200 millions d’euros.
La filière compte donc sur le ministre pour porter la demande d’une mobilisation du Fonds d’urgence européen à hauteur de 40 millions d’euros. Une perspective qui reste en deçà de ce que plaide Gérard Bancillon, qui évoque plutôt un besoin total de 240 millions d’euros avec un prix moyen d’hectolitre de 80 euros. « On est loin du compte », estime-t-il. Sur ce point, Jérôme Despey précise que le fonds d'urgence représente 450 millions d’euros par an à l’échelle de l’Union européenne et que la France peut compter sur 70 millions d’euros mais pour tous les secteurs agricoles confondus, ce qui de fait limite les possibilités.
Le budget de 200 millions d'euros serait donc proche des 211 millions d’euros consacrés à la distillation lors de la crise sanitaire. Au total, 2,6 millions d’hectolitres avait été distillés.
Une « task force » pour étudier l’étalement des PGE
Sur les prêts garantis par l'Etat (PGE), jusque-là, le ministère de l’Economie et des Finances opposait une fin de non-recevoir aux demandes d’étalement du remboursement de 6 à 10 ans, formulées tout particulièrement par les Vignerons indépendants. « La porte s’est entrouverte », positive Jean-Marie Fabre. Il constate la prise en compte du besoin d’accompagnement des entreprises viticoles dont la trésorerie est prise en tenaille par la baisse des recettes et la hausse des coûts.
Il est prévu de faciliter l’accès à la médiation du crédit aux entreprises pour rééchelonner les PGE par la mise en place d’une « task force ministérielle ». Elle serait placée au sein du ministère de l’Agriculture. Il s’agit, selon un communiqué du ministère, « d’accompagner les agriculteurs et les orienter vers les solutions les plus adaptées à leur situation ». Jean-Marie Fabre évoque la participation de la fédération des banques. La piste de prêts bonifiés à taux zéro a aussi été envisagée. « Il faut passer à l’opérationnel », presse le président des Vignerons Indépendants. Il attend sur ce point « des annonces claires » avant le Salon de l’agriculture au plus tard.
Des solutions à finaliser pour l’arrachage
Le besoin d’arrachage, au départ seulement bordelais est désormais évoqué ailleurs, comme dans les côtes du Rhône. Le ministre souhaite d’ailleurs des dispositifs qui puissent être mobilisables dans les différents vignobles.
Les solutions qui ont été abordées sont celle d’une mobilisation du Feader autour de projets de diversification avec un cofinancement de l’Etat. Autre voie, celle d’un recours au Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental (FMSE) dans le cadre d’un programme interprofessionnel de prévention contre le développement de la flavescence dorée, favorisée aujourd’hui par les friches viticoles. Si les hectares concernés par l’arrachage sont estimés pour l’heure à 15 000 hectares dans le vignoble bordelais, ce qui relèverait de l’une ou l’autre des possibilités n’est pour l’heure pas connu.
Lors de ce rendez-vous ministériel, le référentiel HVE, le plan stratégique de la filière attendu pour juin 2023 ou encore l’inquiétude de la filière face à la stigmatisation de la consommation de vin, notamment à travers les campagnes de Santé publique France, ont été évoqués. Mais tous ces sujets feront l’objet d’autres échanges, l’agenda étant décidément dense pour la filière vin en ce début d’année 2023.