Cinq moyens de lutte contre la réduction
Les difficultés fermentaires ou l’élevage sur lies peuvent entraîner l’apparition de phénomènes de réduction (odeur d’œuf pourri, de croupi) qui représentent un défaut majeur. Comment lutter lorsque son vin se retrouve infesté de mercaptans nauséabonds ? Voici cinq solutions.
Les difficultés fermentaires ou l’élevage sur lies peuvent entraîner l’apparition de phénomènes de réduction (odeur d’œuf pourri, de croupi) qui représentent un défaut majeur. Comment lutter lorsque son vin se retrouve infesté de mercaptans nauséabonds ? Voici cinq solutions.
Les premiers signes de caractère réduit apparaissent souvent en fin de fermentation ou pendant l’élevage, lors d’un contact prolongé avec les lies. Plusieurs solutions existent, mais il est important d’avoir un raisonnement adapté à chaque vin. Dans l’idéal, des tests olfactifs et de tenue à l’air seront réalisés afin de déterminer le type de composé mis en cause et l’intensité du phénomène. Une attention particulière devra être portée aux cépages où l’on recherche l’expression de thiols variétaux (sauvignon, colombard, syrah…) pour ne pas déstructurer les arômes positifs.
1 - L’oxygénation
Il s’agit de la méthode la plus simple à mettre en œuvre et de la moins chère. Mais c’est aussi la plus risquée pour le vin. Un soutirage à l’air ou un cliquage à l’oxygène, plus ou moins soutenu selon l’intensité du goût réduit, permettent de déstructurer les molécules les plus volatiles, telles que l’H2S (odeur d’œuf pourri). L’action est toutefois inefficace sur les composés plus complexes comme l’éthanethiol (odeur d’oignon) ou le méthionol (odeur de chou cuit). Pire, certains composés monomères nauséabonds deviennent plus stables en s’oxydant. D’autre part, le contact avec l’oxygène peut entraîner une perte de thiols variétaux positifs, voire amener des goûts d’oxydation. Il y a donc un risque d’obtenir un vin combinant les deux défauts, oxydé et réduit, qui ne sont pas incompatibles.
2 - L’ajout de lies fraîches
C’est un constat empirique, l’ajout de lies de levures fraîches peut avoir un effet positif sur le vin en cas de réduction. Si les mécanismes sont encore flous, les chercheurs ont observé qu’une telle pratique contribue à l’élimination de composés lourds (notamment le méthanethiol et l’éthanethiol). Pour ce faire, il faut prélever des lies de fin de fermentation et les ajouter au vin réduit, à hauteur de 5 % (limite réglementaire). L’apport doit être suivi d’une homogénéisation puis d’une clarification, pour éviter le relargage des composés soufrés par ces mêmes lies. Le déclenchement de la clarification se fera après dégustation, en fonction de l’évolution du goût réduit.
3 - Les sels de cuivre
Ce sont les produits les plus répandus, même si leur action sur les composés lourds est inexistante. On les trouve sous plusieurs formes : solution de sulfate de cuivre (Mercaptol Boland, Redustop), citrate du cuivre (Kupzit, Mannocup), ou en association avec des tannins (Cuprovin, Mercapton). Ils sont autorisés à dose maximale d’un gramme par hectolitre. Il est important de déterminer la dose d’emploi par test préalable. Elle varie en fonction de la couleur du vin et de l’intensité du goût de réduit. L’ajout se fait en diluant dans cent fois son volume de vin et en homogénéisant la cuve. Un collage est nécessaire après le traitement. Certaines formulations solides font précipiter des composés, permettant de les éliminer par simple soutirage. Le coût de revient de ces produits est en moyenne de dix centimes d’euros par hectolitre de vin.
4 - Les levures inactivées
L’Institut œnologique de Champagne a sélectionné des levures inactivées permettant de piéger les composés soufrés du vin. Le principe repose sur le fait que la paroi cellulaire des levures contient des mannoprotéines capables de se lier avec les composés incriminés dans les goûts de réduit (mécanisme similaire à l’action des lies fraîches). Il en résulte le développement de deux produits : le Netarom et Netarom extra. Le deuxième est plus adapté aux vins rouges fortement réduits. Les deux produits ont le même mode d’emploi : il consiste à mettre les levures en suspension dans dix fois leur poids en vin ou en eau à hauteur de 20 à 40 grammes par hectolitre suivant l’intensité du goût réduit. Homogénéiser à l’abri de l’air. Après cinq jours de contact, un soutirage doit être réalisé. Attention, ce produit n’est autorisé que lors de la fermentation alcoolique. S’il s’avère respectueux de la qualité du vin, il constitue aussi une méthode plus onéreuse (entre trente et cinquante centimes par hectolitre).
5 - Le chlorure d’argent
Autorisé par l’Organisation Internationale du Vin depuis le 14 novembre 2014, le chlorure d’argent pourrait apparaître dans nos caves lors des prochaines vendanges. Les scientifiques ont démontré son efficacité relative pour lutter contre les défauts olfactifs dus à l’H2S et à certains mercaptans. Il s’utilise à la dose d’un gramme par hectolitre et doit être absorbé sur un support inerte (kieselguhr, bentonite, kaolin). La teneur finale du vin en argent doit être contrôlée et ne doit pas dépasser 0,1 microgramme par litre. À l’heure actuelle, il est difficile de s’en procurer auprès des fournisseurs œnologiques classiques. C’est en revanche un produit disponible chez les fournisseurs de l’industrie chimique et des laboratoires. Son prix élevé (compter plusieurs euros par hectolitre pour un traitement) en fait un produit plus adapté aux vins haut de gamme.