Souveraineté alimentaire : Terre de Liens dénonce « un scandale made in France »
A quelques jours du salon de l'Agriculture, la Fondation Terre de Liens publie son rapport annuel sur l'état des terres agricoles en France dans lequel elle dénonce une surutilisation de la surface agricole pour l'exportation et à l'inverse un recours à l'importation qui consomme des terres agricoles aux quatre coins du monde. Et ce alors que la France pourrait produire 100% de son alimentation. Point de vue.
A quelques jours du salon de l'Agriculture, la Fondation Terre de Liens publie son rapport annuel sur l'état des terres agricoles en France dans lequel elle dénonce une surutilisation de la surface agricole pour l'exportation et à l'inverse un recours à l'importation qui consomme des terres agricoles aux quatre coins du monde. Et ce alors que la France pourrait produire 100% de son alimentation. Point de vue.
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Une semaine avant la parution de son rapport « Souveraineté alimentaire : un scandale made in France » relatif à l’état des terres agricoles, Terre de Liens en a présenté le 11 février les grandes lignes à la presse. « Les pays dont l’agriculture est commandée par les marchés internationaux ont perdu leur souveraineté alimentaire. La France qui est dans ce cas a perdu son lien à l’agriculture » estime Philippe Pointereau, président de la Fondation Terre de Liens.
Et de rappeler que l’Hexagone est le sixième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires avec une part de marché de 4,6 % , derrière les Etats-Unis, le Brésil, les Pays-Bas, l’Allemagne et la Chine et que 70 % de la production agricole française est transformée.
A relire : « Etat des terres agricoles en France», le premier rapport de Terre de liens
« La France dispose d’assez de terres agricoles pour nourrir sa population »
Coline Sovran, coordinatrice du rapport, affirme qu’avec un potentiel nourricier de 130 %, la France dispose d’assez de terres agricoles pour nourrir sa population mais que près de la moitié de ses terres produisent pour l’exportation. « Dans ces conditions, la surface disponible par habitant est réduite à 2 100 m2, là où il en faudrait le double pour se nourrir » souligne-t-elle. Les produits agricoles exportés mobilisent 43 % de la surface agricole utile, soit 12,4 millions d’hectares, calcule Terres de Liens. Coline Sovran détaille que plus de la moitié des surfaces céréalières, fruitières et maraîchères et un quart de surfaces d’élevage produisent pour l’exportation, selon le rapport de l'association.
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« La France mobilise 120 millions d’hectares aux quatre coins du monde pour se nourrir »
La coordinatrice du rapport affirme que la France importe chaque année 8,5 millions de tonnes d’engrais pour fertiliser les cultures, créant une dépendance vis-à-vis de la Russie et du Maroc. L’Hexagone importe aussi 4 millions de tonnes de soja d’Amérique du Sud pour nourrir le bétail. « Pour les produire, il faudrait y consacrer toutes les terres agricoles de la Bretagne » souligne Coline Sovran qui ajoute que notre alimentation mobilise près de 120 millions d’hectares aux quatre coins du monde. « Une surface équivalente à la taille de l’Islande ! » précise-t-elle.
« Les agriculteurs sont obligés de se plier aux standards imposés par les industriels »
« Les agriculteurs sont obligés de se plier aux standards imposés par les industriels » affirme Coline Sovran qui note que pour s’imposer sur le marché mondial, l’agriculture française s’est fortement industrialisée et spécialisée et de rappeler que quatre cultures (blé, orge , colza et maïs) couvrent 55 % des terres arables et qu’au moins 5 millions de ces terres sont consacrées à l’alimentation animale.
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Une PAC employée à contre-courant, selon Terre de Liens
Tanguy Martin, chargé de plaidoyer estime que « la Pac est employée à contre-courant » et que ce sont les acteurs de l’aval qui « mènent la danse ». Il explique que les soutiens publics au système agroalimentaire s’élèvent à 48 milliards d’euros en 2021 mais que ces montants « sont peu utilisés comme levier pour faire évoluer le système alimentaire ». Il ajoute que les acteurs de l’aval reçoivent 16,4 milliards (34 %), « principalement sous forme d’exonérations fiscales et de cotisations sociales ». Tanguy Martin souligne qu’en trente ans, la taille moyenne des fermes a doublé, « avec un nombre d’emplois agricoles en chute libre ». Tout en précisant qu’en haut de l’échelle, 10 % des agriculteurs dépassent les 150 000 euros de revenus annuels et qu’à l’autre bout, 10 % des agriculteurs se situent à moins de 15 000 euros.
« Le foncier agricole est le grand absent du projet de loi d’orientation agricole »
Et Astrid Bouchedor, responsable pôle plaidoyer, de déplorer que la loi d’orientation agricole examinée actuellement au Sénat ne s'intéresse pas au foncier agricole : « Les sénateurs se focalisent sur la compétitivité mais laissent de côté de grands enjeux comme la juste rémunération, le renouvellement des générations, l’accès à la terre ».