Stress thermique : des risques avérés pour la reproduction des truies
Les températures élevées peuvent dégrader les résultats de reproduction. Mais les impacts varient selon les élevages, y compris dans une même région. Pour faire une bonne prévention il faut identifier les stades les plus sensibles et les niveaux de risque.
Les températures élevées peuvent dégrader les résultats de reproduction. Mais les impacts varient selon les élevages, y compris dans une même région. Pour faire une bonne prévention il faut identifier les stades les plus sensibles et les niveaux de risque.
Les truies sont particulièrement sensibles au stress thermique avec des risques de mortalité et des effets possibles sur la fertilité, les tailles de portées, la mise bas, la lactation, l’appétit… Mais en pratique, on ne sait pas prédire précisément les problèmes de reproduction selon la température ambiante. L’lnrae et l’Ifip ont donc réalisé une étude à partir des relevés météorologiques locaux et des résultats de fertilité GTTT de plus de 800 élevages entre 2002 et 2012.
Ceci a permis de préciser le lien entre les températures extérieures et la fertilité. Mais l’impact varie selon les élevages. Est-ce dû à la diversité des bâtiments et du pilotage de l’ambiance ? L’Ifip a réalisé des mesures en élevages pour évaluer l’exposition réelle des truies.
Pas de stress thermiques avant les IA
L’analyse de la fertilité selon les températures maximums journalières dans les deux mois entourant les inséminations, confirme les stades les plus critiques : pour les truies sevrées, la période à risque se situe entre le 20e et le 5e jour précédant les inséminations. Elle correspond aux deux dernières semaines de maternité. Pour les cochettes, elle est comprise entre le 30e et le 3e jour avant la première insémination. Ce sont les quatre semaines correspondant à la fin de quarantaine et la phase de synchronisation. Cette période est deux fois plus longue que celle des truies. Dans les deux cas, il s’agit de stades où un stress thermique important peut impacter les ovaires, la qualité et la survie des embryons, de même que la sécrétion des hormones et donc les chaleurs et le maintien des gestations. Les effets indirects sur l’appétit et la perte d’état sont aussi impactant. Il faut cependant rester vigilant pendant toute la gestation, et en particulier durant le premier mois. Une étude espagnole montre ainsi que des températures élevées dans les deux à trois semaines suivant l’insémination réduisent le taux de mise bas. Pendant les dernières semaines de gestation, c’est le risque de mortalité des truies et de mise bas trop longues qui augmentent.
Les primipares sont les plus impactées
Les jeunes truies ont les fertilités les moins bonnes et seront les plus impactées par des températures supérieures à 25 °C. Quand la température extérieure maximum passe de 20 à 30 °C pendant le stade critique, leur fertilité chute de 8 % contre 4 à 5 % pour les multipares. L’infertilité saisonnière est également plus longue chez les primipares avec des fertilités réduites dès juin et jusqu’en octobre selon les années. Néanmoins, le rôle des températures élevées ne doit pas être surestimé. En effet, chez les jeunes truies, la température extérieure à elle seule prédit mal les problèmes de reproduction. Ceux-ci dépendent de nombreux facteurs liés aux truies (taille de portées, pertes d’état, santé…) et à la conduite (détection des chaleurs, insémination, durée de lactation, alimentation, gestion de l’ambiance…).
Plus de risques d’infertilité dans certains bâtiments
Pour évaluer l’impact du stress thermique sur les animaux, des mesures ponctuelles sont moins pertinentes que des enregistrements continus dans les bâtiments. C’est ce que démontre une série d’enregistrements de température en continu pendant trois semaines d’été réalisée par l’Ifip dans neuf élevages. Des sondes USB ont été placées à l’extérieur et dans les bâtiments, aux stades les plus à risque : maternité, verraterie-gestante, quarantaine. Les résultats montrent que les mesures dans les bâtiments sont utiles et complémentaires des relevés extérieurs. En effet, selon les élevages et les stades, les bâtiments atténuent ou, au contraire, aggravent le risque de stress thermique. Ceci pourrait expliquer des différences de sensibilité à l’infertilité saisonnière dans une même zone géographique. Beaucoup d’élevages ont des dispositifs de rafraîchissement en maternité qui atténuent le stress thermique. Mais d’autres stades sensibles (verraterie et quarantaine) sont moins concernés par cet équipement.
Sylviane Boulot, sylviane.boulot@ifip.asso.fr
Les contrôles en continu cernent mieux les risques
Dans un élevage du Grand Ouest suivi par l’Ifip, les relevés de température dans les bâtiments ont prouvé que le stress thermique subi par les truies est nettement plus élevé que ne suggèrent les relevés extérieurs. Lors du jour de la visite réalisée par les ingénieurs de l’Ifip, uniquement la quarantaine et la maternité avaient une température supérieure au seuil de risque potentiel de stress thermique (24 °C). Pour la verraterie et la gestante, rien ne portait à croire qu’il y avait un problème. Et pourtant, un risque de stress thermique a été détecté en verraterie par l’enregistrement des températures en continu. Sur les trois dernières semaines, les truies ont passé un quart de leur temps en stress thermique avec une intensité forte (plus de 4 °C au-dessus de 25 °C). Dans le même temps, la température extérieure n’a dépassé les 25 °C que durant 14 % de la période. En maternité, les contrôles continus ont également permis de déterminer l’ampleur du stress. En effet, les truies ont passé environ 70 % de leur temps en situation de stress thermique. Sur plusieurs jours à suivre, la température de la salle n’est pas descendue en dessous du seuil de 25 °C. L’intensité du stress était en moyenne de 2 °C au-dessus de 25 °C. Elle a ponctuellement atteint des valeurs proches de 30 °C.