Aliments à la ferme
Optimiser les formules pour contrer la flambée des matières premières
Dans le Sud-Ouest, la formule de base maïs-tourteau de soja est sérieusement concurrencée par les alternatives de formulation qui s'offrent aux éleveurs.

Avec des champs de maïs à perte de vue, et un approvisionnement en tourteau de soja tout proche au port de Bilbao, dans le nord de l’Espagne, le bassin de production porcin du Sud-Ouest utilise traditionnellement ces deux matières premières pour l’alimentation de ses porcs. Mais la hausse de leur prix d’achat met à mal ce monopole. « Face au cours du tourteau de soja qui dépasse les 500 euros/tonne depuis juillet dernier, et à la hausse du prix du maïs tiré par la production intensive de bioéthanol aux Etats-Unis, il est nécessaire en FAF d’op- timiser le coût des formules en faisant appel à d’autres matières premières », explique Daniel Ferreira, directeur d’Alitec, une société basée à Pau (Pyrénées-Atlantiques) fabricant d’aliments minéraux et prestataire de services pour éleveurs fabricants à la ferme. Pour lui, trois voies d’optimisation se dégagent actuellement. En premier lieu, la substitution du maïs par des céréales à paille, blé et triticale essentiellement, apporte au moins 2,5 points de protéines en plus dans la formule. « Combiné à l’apport des acides aminés de synthèse dans le minéral, cela permet de réduire le taux d’incorporation du tourteau de soja de 10 %. » Ensuite, les éleveurs peuvent faire appel à des tourteaux de substitution, colza essentiellement et tournesol dans une moindre mesure. « Le prix d’intérêt du tourteau de colza est de 67 % par rapport au soja. C’est-à-dire que si le tourteau de soja est à 500 €/t, le tourteau de colza sera intéressant si son prix est inférieur à 335 €/t, ce qui est le cas actuellement. » Le tourteau de colza peut être intégré à hauteur de 12 % en croissance, et 14 % en finition. Une incorporation qui permet de limiter l’apport de tourteau de soja à 13 % dans une formule d’engraissement, contre 26 % s’il est utilisé seul avec du maïs. « En associant céréales à paille et tourteau de colza, on peut diminuer le coût des formules d’engraissement de 14 euros/tonne à valeur nutritionnelle identique », calcule Daniel Ferreira. Alitec propose également à ses clients d’incorporer de la xynalase, une enzyme qui permet d’améliorer l’indice de consommation par une meilleure valorisation des matières premières. Pour lui, le surcoût de 1,5 €/tonne est largement compensé par une amélioration du GMQ de 3 %, et par une baisse de l’indice de 2,6 %. « Dans un contexte de prix de matières premières élevé, il est rentable d’incorporer des additifs de ce type qui permettent une meilleure valorisation de l’aliment », explique-t-il. L’anticipation sur des contrats à terme est aussi une source d’optimisation importante du coût des formules. « Dès décembre 2011, Alitec préconisait à ses clients de se couvrir en "six de mai" (contrat sur six mois à partir du mois de mai 2012) en tourteau de soja au prix de 283 euros/tonne », affirme Daniel Ferreira. Une décision difficile à prendre, puisque ce prix était déjà largement supé- rieur aux cotations des mois précédents. « C’est pourquoi nous organisons tous les mois des réunions d’information sur la conjoncture des matières premières, en collaboration avec le Céréopa (1). » Alitec incite aussi les éleveurs à se couvrir en céréales sur le marché à terme Euronext, pour ne pas subir d’éventuelles hausses de prix. « Pour un maïs actuellement à 240 euros/tonne, nous avions conseillé en juin dernier de se couvrir à 191 euros/tonne. » Pour Daniel Ferreira, cette stratégie de couverture devrait se développer dans les années à venir. « L’alimentation constitue 60 % du coût de production des ateliers porcins. Les éleveurs fabriquant à la ferme ont la possibilité de sécuriser leurs achats de matières premières pour sécuriser leurs marges. Ils doivent en profiter », conclut-il.
(1) Céréopa : Centre d'étude et de recherches sur l'économie et l'organisation des productions animales.