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Loi d’orientation agricole : tout savoir sur le texte adopté à quelques heures du salon de l’agriculture

Ce 20 février, le projet de loi d’orientation agricole est définitivement adopté par le Parlement, après le vote du Sénat qui vient d'avoir lieu. Retour sur le texte de compromis trouvé en commission mixte paritaire, un an après la forte mobilisation agricole et juste avant le salon de l’agriculture 2025.

Annie Genevard devant les députés le 19 février 2025.
Annie Genevard lors du vote du texte de compromis de la CMP sur la loi d'orientation agricole le 19 février à l'Assemblée nationale.
© Assemblée nationale

[Mis à jour à 17h11]

Après l’Assemblée nationale (qui a adopté le 19 février le texte à 369 voix contre 160), le Sénat vient d'adopter, soit quelques heures avant l’ouverture du salon de l’agriculture, le compromis trouvé le 18 février en commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de loi d’orientation agricole (LOA) (avec 230 voix contre 103).

« Un peu moins d’un an après le dépôt du texte sur le bureau de l’Assemblée nationale, après de multiples rebondissements politiques ayant empêché son examen dans les délais initialement prévus, nous touchons au but », s’était satisfait Annie Genevard ministre de l’Agriculture, le 19 février devant l’assemblée nationale. 

Relire : Annie Genevard : « Je veux mener rapidement à son terme la loi d’orientation agricole »

Quelles mesures phares de ce projet de loi d’orientation agricole ?

« Un an après un premier mouvement de protestation d’ampleur et à quelques jours seulement de l’inauguration du soixante et unième Salon de l’agriculture, l’adoption du projet de loi d’orientation agricole résonnera puissamment dans chaque ferme », a assuré la ministre, avant de citer plusieurs mesures du texte dont il est encore difficile d'en évaluer le réel impact :

  • L’inscription de l’agriculture comme « intérêt général majeur de la Nation »
  • Instauration de conférences sur la souveraineté alimentaire, dirigées par les filières avec le soutien de l’État, pour définir des objectifs de production à dix ans
  • Objectif de former via l’enseignement agricole 30 % d’apprenants supplémentaires en 2030
  • Création d’un « bachelor agro »
  • Création du réseau France Services agriculture, comme guichet unique pour l’installation
  • Instauration d’un diagnostic modulaire volontaire pour les agriculteurs sur la viabilité économique, sociale et environnementale de leur exploitation.
  • Instauration d’un essai d’association pour les personnes qui veulent préparer un projet d’exercice en commun de l’activité agricole
  • Réduction des délais de traitement des recours contentieux à l’encontre des projets d’élevage et des ouvrages agricoles et hydrauliques
  • Création d’un statut unique de la haie
  • Facilitation des tirs de défense pour les éleveurs confrontés à la prédation du loup
  • Dépénalisation des atteintes non intentionnelles à l’environnement
  • L’amélioration du statut des femmes dans l’agriculture inscrit explicitement dans les objectifs de la politique agricole
     

Au-delà de ce rappel des principales mesures du texte, Reussir.fr vous aide à y voir plus clair sur ce qui a changé en commission mixte paritaire depuis la mouture du texte adoptée par le Sénat le 18 février.

Relire : Où en est la loi d’orientation agricole à la veille du salon de l’agriculture ?

Une dépénalisation des atteintes environnementales moins large que voulue par les Sénateurs

Dans ses articles 13 et suivants, le texte de compromis prévoit une dépénalisation des atteintes environnementales moins large que celle adoptée au Sénat, soulignent nos confrères d’Agra Presse. 

Pas plus de 450 euros d’amende pour une atteinte non intentionnelle

En cas d’atteinte commise de manière non intentionnelle ou par négligence grave à la conservation d’espèces animales non domestiques, d’espèces végétales non cultivées ou d’habitats naturels (en violation des interdictions prévues à l’article L. 411‑1 ou des prescriptions prévues par les règlements ou par les décisions individuelles pris en application de l’article L. 411‑2), le texte prévoit que la sanction ne peut excéder 450 euros (contre aujourd’hui trois ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende).

Dépénalisation encadrée des installations classées

Si la mesure de dépénalisation est étendue aux réglementations relatives aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), une limite est toutefois posée. Ainsi la sanction est réduite à 450 euros d’amende (au lieu de 75 000 euros et 1 an de prison) quand l’éleveur dépasse les seuils d’enregistrement, mais jusqu’à 15% maximum. 

Et contrairement au vote des sénateurs le 21 janvier, cette dépénalisation ne s’applique pas aux installations, ouvrages, travaux et activités (Iota) soumis à la loi sur l’eau. 

La présomption de non-intentionnalité pourra être renversée

A propos de cet article qui suscite la polémique, « en aucune manière le texte n’accorde à nos agriculteurs je ne sais quel permis de détruire des espèces ou des espaces protégés », a assuré Annie Genevard devant les députés. « Seul le régime des peines est modifié, et pour les seules atteintes non intentionnelles à l’environnement – je le dis encore, encore et encore. Pour que le caractère non intentionnel soit retenu, il ne suffit pas, comme vous le prétendez, de dire : « Pardon, je n’ai pas fait exprès ». Le projet de loi encadre le périmètre de la non-intentionnalité », a-t-elle ajouté soulignant que « la police de l’environnement peut à tout moment, à l’issue d’une enquête, renverser cette présomption, tout comme le juge dans le cadre de l’enquête, toujours menée à charge et à décharge, en s’appuyant sur son intime conviction ». 

Lire aussi : LOA : « Le texte est vidé de ses ambitions » dénonce le Collectif Nourrir

Le bilan sur le contrôle des importations supprimé

Contre l’avis du gouvernement, les sénateurs avaient adopté un nouvel article (1 quinquies) qui imposait au gouvernement de remettre « dans un délai de six mois » au parlement, puis chaque année, un rapport comportant un bilan de la politique de contrôle sanitaire des denrées alimentaires importées. Cet article a été supprimé en Commission mixte paritaire.
 

Le rattachement des ETA aux activités réputées agricoles retiré du texte

Autre mesure ajoutée par les sénateurs et ne figurant pas dans le texte final : le rattachement des entreprises agricoles (ETA) aux activités réputées agricoles (article 12 ter A) qui avait reçu un avis défavorable du gouvernement.

Relire : Conférences des filières, agricultrices, fermes familiales, bio : 10 points à retenir du début de l’examen de la Loi d’orientation agricole au Sénat

L’ambition bio revient dans le projet de loi d’orientation agricole

Point de satisfaction pour la fédération nationale de l’agriculture biologique (Fnab), la commission mixte paritaire a réintroduit dans son article 1er parmi les objectifs de politique agricole de la France celui de « favoriser l’installation économiquement viable d’exploitations agricoles en agriculture biologique (au sens de l’article L. 641‑13 du présent code rural), en veillant à l’adéquation entre l’offre et la demande sur le marché national, et pour atteindre les objectifs inscrits dans le programme national sur l’ambition en agriculture biologique, de manière notamment à ce que l’agriculture biologique représente 21 % de la surface agricole utile cultivée au 1er janvier 2030 ». Un point qui avait été supprimé par les sénateurs contre l’avis du gouvernement.
 

Réécriture du principe « pas d’interdiction sans solution »

Les sénateurs avaient aussi voulu inscrire le principe de refus « des interdictions de produits phytopharmaceutiques sans solutions économiquement viables et techniquement efficaces apportées aux agriculteurs » dans le code rural. 

Le texte de la CMP se montre un peu plus mesuré en inscrivant parmi les priorités des politiques agricoles publiques le fait de « maintenir un haut niveau de protection des cultures, en soutenant la recherche en faveur des solutions apportées aux agriculteurs, économiquement viables, techniquement efficaces et compatibles avec le développement durable ». Et ce « afin de diminuer l’usage des produits phytopharmaceutiques ». L’article 1er du projet de loi stipule ensuite qu’à « défaut de telles solutions » les politiques publiques doivent s’abstenir « d’interdire les usages de produits phytopharmaceutiques autorisés par l’Union européenne ».

Relire : Elections aux chambres d’agriculture : que retenir du débat entre les syndicats agricoles ?

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