Il reprend l’élevage familial et le transforme en bio
Florent Isambard, 31 ans, a repris l’élevage-naisseur engraisseur de ses parents à Bazouges La Pérouse en Ille-et-Vilaine. Il a entrepris une complète transformation des bâtiments pour produire du porc bio, avec un contrat de prix garanti sur dix ans.
Florent Isambard, 31 ans, a repris l’élevage-naisseur engraisseur de ses parents à Bazouges La Pérouse en Ille-et-Vilaine. Il a entrepris une complète transformation des bâtiments pour produire du porc bio, avec un contrat de prix garanti sur dix ans.
L’atelier des parents de Florent est un "classique" de l’élevage familial breton : 140 truies naisseurs-engraisseurs, 60 hectares… Mais quand le jeune éleveur décide de s’installer au départ à la retraite de ses parents, il change radicalement de modèle. L’élevage produira du porc bio avec 100 truies et un contrat de prix garanti signé avec le Gouessant (voir ci-contre), avec un engagement sur une durée de dix ans avec "un abattoir breton" garantissant un prix minimum du porc, indexé sur le prix de l’aliment.
Florent va récupérer le maximum des bâtiments construits entre les années 1980 et 2000. Avec un énorme chantier qui consiste à utiliser l’existant en enlevant les caillebotis pour loger tous les animaux sur paille, et reconfigurer totalement les salles : la verraterie gestante sera transformée en complément de salle de mise bas, sachant que chaque truie disposera de 10 m2. Les engraissements seront transformés en verraterie et gestantes… Il faut donc construire 700 places d’engraissement avec courettes, une obligation qui vaut aussi pour les truies gestantes. Avec un prix de la place d’engraissement de 600 euros environ.
Un chantier conséquent qui, au final, va coûter 800 000 euros. Deux banques, le CMB et BPO, ont donné leur accord de financement. "Il a fallu des heures de discussions entre nous, le Gouessant, les banques. Le contrat de dix ans avec l’abattoir a fini par faire accepter le projet, qui se traduit aussi par l’embauche d’un salarié qui pourra être financé par la rémunération assurée par le contrat. Donc une perspective de qualité de vie très importante dans mon projet !"
Dans un premier temps, Florent aura recours à l’aliment complet bio de l’Ufab, filiale du Gouessant. À terme, une part de l’aliment des porcs charcutiers sera assurée par les céréales bio produites sur l’exploitation. Les 60 hectares sont en cours de conversion et seront certifiés bio dans trois ans. Les porcs, eux, le seront dès novembre 2017. Le cheptel est en train de se reconstituer avec des cochettes Danbred qui peuplent progressivement l’élevage. Florent investit dans la technique, avec l’objectif d’être performant. "Tout sera suivi en GTTT et GTE, des outils qu’il regrette que les producteurs actuels de porcs bio n’utilisent pas assez. D’où un manque de références qui rebute sans doute les financeurs… "
Les cochettes sont arrivées. Les premières mises bas attendues pour mai et les premières ventes de porcs en novembre. Un beau projet pas facile à faire aboutir. Mais Florent est confiant et souligne que l’acceptabilité de son élevage par le voisinage est nettement facilitée par le fait qu’il produise bio.
Le Gouessant engage un développement raisonné et raisonnable de porcs bio
La coopérative lamballaise est en cours de « construction » d’une filière de production de porcs bio, avec la conversion ou l’installation de sept producteurs à ce jour, au sein d’un « modèle » parfaitement calé de l’amont à l’aval. À savoir un type d’élevage naisseur-engraisseur bien défini tant au niveau de la conduite d’élevage que du type de bâtiments, et, au final un débouché garanti pour des volumes précis avec un contrat de prix de reprise des porcs sur dix ans.
David Brillouet, responsable porc du Gouessant, en détaille le contenu. Au niveau des producteurs, tout d’abord, il précise le profil des élevages candidats : des ateliers naisseur-engraisseurs de 70 à 140 truies (donc un à deux UTH), avec un lien au sol, des équipements d’alimentation automatisés (machine à soupe ou multiphase) permettant de maîtriser les distributions d’aliments. Le service bâtiment a conçu un plan type sur les principes suivants : séparation des différents bâtiments – verraterie gestante, maternité, PS et engraissements – avec marche en avant, respect facile des règles de biosécurité… Les techniciens sont allés voir ce qui se faisait en Europe du Nord où le bio est plus présent. Ils se sont inspirés de leur parc bâtiment plus moderne qu’en France, tout en l’adaptant car la réglementation varie d’un pays à l’autre. "Ainsi la paille n’est pas obligatoirement bio en France, ce qui nous permet de faire des plus grands bâtiments sans courettes extérieures, tout en restant conformes aux exigences du bio avec, évidemment le respect des surfaces au sol imposées à chaque stade. Au final, là où nous pourrions loger 240 truies en système naisseur-engraisseur conventionnel, nous en logeons 85 en production bio. Soit trois fois moins, et, bien sûr, un surcoût de la place conséquent. » Plus précisément, ce bâtiment type conduit à un coût de 10 000 euros par truie et sa suite, « soit le double du prix dans un système conventionnel ».
Un contrat qui garantit le débouché et le prix
Dans ces conditions, comment convaincre les banquiers ? Avec une assurance de débouché et de prix. C’est ce qu’a obtenu le Gouessant en partenariat avec un abatteur et une enseigne de distribution (qui ne souhaitent pas être cités). Celle-ci, en recherche de produits en quantité et qualité suffisantes de porcs bio origine France pour alimenter ses magasins en jambons et viande fraîche, a signé pour la fourniture de 200 porcs bios par semaine produits selon le cahier des charges Gouessant. « La demande en jambons pouvait doubler ces volumes. Mais ces volumes n’auraient pas trouvé de marché pour la viande fraîche. Or la pérennité de cette filière passe par l’équilibre carcasse. Il est donc essentiel de ne produire que ce qui peut être valorisé en totalité, sous peine de déstabiliser le marché », affirme David Brillouet. Par ailleurs, l’abatteur s’engage auprès de la Section fermière du Gouessant, qui sera l’organisation de vente des porcs bio, sur un contrat de reprise des porcs, indexé sur le prix de l’aliment, et conclu pour dix ans. « Ce contrat vise à assurer la rentabilité de la production pour les éleveurs, mais aussi pour l’enseigne. Dans ces conditions, les banquiers sont rassurés sur la pérennité des élevages candidats aux investissements. »
Aujourd’hui, sept élevages de 50 à 140 truies sont en cours de transformation pour produire dès le mois de mars les porcs attendus par Kermené. Des éleveurs qui produiront dans un souci d’efficience technique, de maîtrise des coûts de production, avec tous les enregistrements de suivi nécessaires, et qui formeront un groupe de travail où les échanges respectifs sur les plans techniques et économiques seront facteurs de progrès.
C. G.
Le Gouessant, leader de l’aliment bio en France
La coopérative a investi dans le bio dès 1992 en reprenant une usine d’aliment, l’UFAB, à Noyal-sur-Vilaine en Ille-et-Vilaine, qu’elle a intégralement dédiée à l’aliment bio. Aujourd’hui, cet outil modernisé produit 52 000 tonnes d’aliment complet bio par an pour toutes les espèces (sauf l’aquaculture, où 10 000 tonnes par an sont fabriquées à Saint-Aaron dans les Côtes-d’Armor.
Le Gouessant occupe donc la position de leader en aliment bio, mais aussi en production d’œufs et de poulettes bio.