Comment rénover les engraissements des élevages de porcs avec des grandes cases?
Les grands groupes semblent séduire de plus en plus d’éleveurs dans le cadre d’une rénovation de bâtiments. Mais certains points de vigilance sont à souligner.
Le projet Bâtiporc C4E piloté par l’Ifip consiste à imaginer une nouvelle génération de bâtiment d’engraissement.
Pour ce faire, de nombreuses visites d’élevages ont été réalisées pour échanger avec des éleveurs ayant déjà mis en place de nouvelles choses. Dans la mesure du possible, l’objectif est d’aboutir à un bâtiment multicritère qui offrirait des bienfaits à la fois sur le bien-être animal, l’ergonomie au travail, l’environnement et les attentes sociétales. C’est ainsi que certains éleveurs se sont tournés vers des engraissements en grands groupes. La taille des cases varie entre 100 à 450 places.
Donner une deuxième vie au bâtiment
Les grands groupes apparaissent comme une solution efficace et bon marché pour rénover des bâtiments existants. Deux configurations sont généralement rencontrées sur le terrain.
D’une manière générale, la principale difficulté du grand groupe est la gestion de l’hétérogénéité des porcs dans la bande : plus le groupe est important, plus l’écart entre la tête et la queue de bande peut se creuser. C’est pourquoi ce mode de logement est souvent associé à un système d’alimentation individuel (DAC) et/ou à une station de tri. Cette dernière peut être plus ou moins sophistiquée (nombre de voies de sortie, pesée par imagerie ou par pesons). Quelle que soit l’installation, il s’agit souvent d’un point crucial dans le fonctionnement du système. En effet, tous les animaux du groupe doivent comprendre son fonctionnement. Pour cela, il est souvent nécessaire de prévoir une période d’adaptation de dix jours en début de bande, suivie d’un passage quotidien. Concernant les fins de bandes, plus le groupe d’animaux est grand, plus il est préférable de prévoir une salle tampon ou une aire de stockage aménagée avec un système d’alimentation pour finir d’engraisser les queues de lot.
Isoler et trier les animaux
Il faut être vigilant dans la mise en œuvre de ces bâtiments, notamment pour faciliter le tri des porcs charcutiers. Certains équipementiers proposent un marquage des animaux lors de leur passage au DAC. Cela facilite le repérage dans la case des animaux prêts à partir mais demande du temps pour les sortir de la case. Dans ce cas, il faut souvent être à deux et travailler avec des jeux de cloisons mobiles permettant de diviser la case en deux lors des tris. D’autres concepts prévoient un espace spécifique dédié au tri des porcs charcutiers grâce à une station de tri. Cet espace s’avère pratique, mais il constitue une surface improductive. Pour éviter cela, certains équipementiers ont trouvé des astuces. En début de bande, la station de tri répartit les animaux dans deux zones d’alimentation. Cette répartition se fait selon le poids individuel de chaque animal et les courbes d’alimentation affectées à chacune des deux zones. En fin de bande, il est possible d’utiliser une zone d’alimentation comme parc de tri. Ainsi, lorsqu’un porc atteint le poids de départ paramétré par l’opérateur, il est orienté vers cette zone où il est mis à jeun. Une fois le tri terminé, l’éleveur n’a plus qu’à déplacer les animaux vers l’aire de stockage ou le quai d’embarquement. Il faut veiller à ne pas orienter plus d’animaux dans cette zone de tri que ce qu’elle est capable d’accueillir (paramétrage logiciel) et y disposer des systèmes d’abreuvement. Une fois les animaux partis, elle peut redevenir une zone d’alimentation pour les animaux restants.
Répondre à certaines attentes sociétales
Certains reproches formulés contre la production porcine portent sur le cloisonnement des bâtiments, la sensation de confinement ainsi que l’absence de parcours extérieurs. La création de grands groupes répond en partie à ces reproches. Leur rendu visuel renvoie souvent une sensation d’espace, surtout si le bâtiment est en grand volume. En début ou milieu de bande, notamment, le comportement grégaire et l’occupation des zones de vie par les animaux libèrent des espaces dans la salle. Néanmoins, en fin de bande, si la densité animale est proche des standards (0,70 m² par porc), le rendu visuel pour un public naïf peut être déplaisant et renvoyer une image de masse. Pour réaliser des ouvertures vers l’extérieur sur des rénovations de bâtiment, la création d’une case par bâtiment ou de deux cases en contact avec les murs donnant sur l’extérieur restent les solutions les mieux adaptées.
Attention au sanitaire
La gestion des porcs charcutiers en grands groupes semble une solution prometteuse. Néanmoins, à la lumière des évènements sanitaires passés (MAP, SDRP…), elle peut faire peur car la transmission de pathogènes est accélérée. De plus, si l’arrêt de la coupe des queues se généralise, il faudra proposer un mode de logement limitant les risques de caudophagie et développer des outils permettant d’identifier et d’isoler facilement les mordus et/ou les mordeurs.
Yvonnick Rousselière, yvonnick.rousseliere@ifip.asso.fr
À retenir :
Côté web
Dans le cadre du projet Bâtiporc C4E cofinancé par le fonds Casdar et en partenariat avec les Chambres d’agriculture de Bretagne et des Pays de la Loire, une plate-forme web a été mise en place pour télécharger des fiches techniques afin d’accompagner les éleveurs et leurs conseillers dans la conception de nouveaux bâtiments porcins. Rendez-vous ici