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Bienvenue à la ferme
Quand l’auberge s’invite à la ferme

Déguster sur place les produits de la ferme et du terroir, c’est le défi original que se sont lancé deux sœurs dans la Haute-Vienne.

Dans le petit hameau de Bayerie, à quelques kilomètres de Saint-Laurent-sur-Gorre dans l’ouest de la Haute-Vienne, Emmanuelle et Marie-Pierre Lacour ont repris depuis trois ans une exploitation avec une idée bien précise en tête. En plus de la vente directe sur les marchés hebdomadaires et les foires estivales, en plus des événements organisés par la chambre d’agriculture à travers le label Bienvenue à la ferme, les deux sœurs proposent aujourd’hui à leurs clients un service de restauration sur la ferme. Emmanuelle, 42 ans, qui a une formation et une solide expérience comme restauratrice, s’occupe entièrement de la transformation et de la préparation des agneaux et volailles produits sur l’exploitation. Marie-Pierre, qui a toujours voulu s’installer après son BTSA productions animales, est responsable aujourd’hui des ateliers ovin et avicole, qui fournissent chaque année respectivement une grosse centaine d’agneaux et près de 2 000 volailles. « À la reprise de l’exploitation, il y avait des Romanes et des Îles de France, mais les premières ne convenaient pas à mon système herbager et les secondes sont trop lourdes à manipuler. Je fais donc des tests avec des Charmoises, des Solognotes et des Causses du Lot, précise l’éleveuse de 36 ans. Je cherche avant tout à avoir des animaux rustiques qui valorisent bien les parcelles ». Les agneaux sont tout de même de bonnes taille et conformation car les béliers, utilisés en monte naturelle, sont de race bouchère. « La vente directe permet aussi plus de souplesse quant au poids des agneaux à l’abattage, car telle personne voudra plutôt des petites côtelettes, alors qu’un autre client se tournera plus facilement sur un gros gigot », explique Marie-Pierre.

La vente directe, la solution la plus rentable

L’objectif aujourd’hui pour l’éleveuse est de parvenir à désaisonner naturellement ses brebis, afin de pouvoir fournir à la clientèle des agneaux tout au long de l’année et ce, sans faire exploser les coûts d’entretien et d’engraissement. Sur l’atelier ovin, l’autonomie alimentaire est quasiment atteinte grâce aux 32 hectares de la ferme. Les travaux aux champs sont faits soit par un prestataire de services pour les céréales, soit par un voisin qui vient aider pour faire le fourrage. Avec sa conduite de troupeau, Marie-Pierre vise un maximum de temps passé au pâturage. L’exploitation n’adhère pas au label bio, mais tout est pensé pour que les pratiques s’en rapprochent le plus possible. Aussi ne traite-t-elle pas les cultures et les animaux sont soignés préférentiellement par homéopathie, les antibiotiques étant un ultime recours. « C’est un peu le revers de la médaille de la vente en direct, les consommateurs veulent goûter à une agriculture la plus proche de ce qu’ils imaginent, analyse l’éleveuse. Néanmoins, après mes différentes expériences, la vente directe m’est apparue comme la solution la plus rentable pour une exploitation, si on ne compte pas ses heures », reconnaît-elle. Les deux sœurs ont heureusement pu récupérer les places sur les marchés des précédents propriétaires de la ferme, leur permettant ainsi de tenir économiquement avant de développer leur communication autour de leur ferme-auberge. Elles ont ainsi agrandi leur cercle de clientèle grâce à leur venue sur d’autres marchés, au bouche-à-oreille, à leur page Facebook ou grâce à des visites de l’exploitation. Elles profitent de leur proximité géographique avec les bassins de population de Limoges et d’Angoulême et de la saison estivale, notamment avec un nombre important de vacanciers britanniques, friands d’agneau. Dans un cadre agréable, au milieu de la vieille ferme en pierres, Emmanuelle peut accueillir jusqu’à 60 personnes dans la salle boisée où ronfle un feu de bois.

Retrouver les saveurs d’antan

« Notre clientèle est avant tout familiale, il y a également beaucoup de personnes âgées qui viennent retrouver les saveurs d’antan, mais nous faisons aussi de l’accueil de groupes, qu’il s’agisse de professionnels ou d’événements de particuliers », explique la restauratrice. Celle-ci a à cœur de proposer des plats traditionnels « à la bonne franquette », composés au maximum de produits locaux, qu’elle prend soin de goûter et de sélectionner elle-même. Les volailles sont abattues et découpées sur place tandis que l’agneau est abattu à Confolens, à l’ouest de Limoges. Emmanuelle élabore ensuite toute une gamme de produits transformés dans son laboratoire flambant neuf. « C’était l’investissement le plus urgent à faire lors de notre installation. Les machines ne sont pas données mais le gain de temps et le confort de travail sont considérables, explique l’aînée des deux sœurs. De plus, nous avons installé une chambre de surgélation, ce qui nous évite d’avoir des pertes sur les invendus ». Les investissements pour l’élevage arriveront dans un second temps, Marie-Pierre souhaite elle aussi gagner en confort et en rapidité de travail, tout en espérant augmenter son cheptel ovin d’une vingtaine de têtes. Emmanuelle prépare saucisses, paupiettes, plats cuisinés vendus sous vide, merguez de brebis ou encore brochettes d’agneau.

L’auberge paye davantage, le marché écoule plus

L’auberge permet de mieux valoriser la viande, avec un menu complet à 25 euros mais les marchés permettent d’écouler plus de volume. « On vend entre 4 000 et 6 000 brochettes d’agneau et de volaille par été. À trois euros la brochette, ces ventes ne sont pas du tout négligeables, détaille-t-elle. Cependant, la plus grande part d’agneau vendue est à la découpe ». L’agneau est valorisé à 10,45 euros par carcasse, sachant que le prix a été fixé par rapport à l’agneau que l’on trouve dans les grandes surfaces de la région. La ferme-auberge représente néanmoins plus de risques puisque son fonctionnement est très dépendant chaque année du calendrier. « Nous nous efforçons de toujours servir en priorité de l’agneau à nos convives, mais si Pâques arrive tôt comme cette année, nous n’en aurons pas et cela risque de se ressentir sur la fréquentation du restaurant », remarque Emmanuelle Lacour. L’année 2017 a également été très dure pour les deux sœurs, avec une consommation de viande globalement morose et une période électorale troublée. Cela reste une activité très enrichissante pour Marie-Pierre comme pour Emmanuelle qui, grâce à leurs plus fidèles clients, peuvent faire des essais de nouveaux produits. « D’une semaine à l’autre, nous avons leurs retours, cela nous évite de nous lancer dans des productions trop importantes qui ne partiraient pas, explique la restauratrice qui avoue fuir la monotonie du travail grâce à l’innovation. Par exemple, les rillettes d’agneaux ont fait un flop, alors que le burger d’agneau marche très bien ! »

32 hectares de SAU

- 10 à 12 hectares de fourrages, dont des essais de méteil
- 6 hectares de céréales (pour les brebis, agneaux et volailles)
- 12 à 14 hectares de pâturage

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