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« L’idée est d’être le plus naturel possible »

Sur l’exploitation de Mickaël Giraud à Saint-Joseph-des-Bancs, les agnelages suivent la pousse d’herbe, particulièrement en avril et en mai.

C’est entre le plateau du Haut-Vivarais et les serres cévenoles que Mickaël Giraud s’est installé en élevage ovin et castanéiculture en 1996, hors cadre familial. Ébéniste pendant une dizaine d’années, ce fils d’agriculteurs du canton de Saint-Pierreville en Ardèche ne voulait plus entendre parler de salariat. Il a pu constituer le noyau de son exploitation ovine sur 70 hectares à Saint-Joseph-des-Bancs et a acquis une centaine d’hectares morcelés à proximité, suite à deux départs en préretraite et une installation dans le cadre d’une DJA. Il élève 450 brebis de race grivette croisées île-de-France pour le côté maternel, recroisées avec la race vendéenne pour garder la conformation des agneaux. Pour gagner en temps et en simplicité de travail, il a choisi d’aménager deux bâtiments d’élevage, dont le plus grand (500 m2) dispose d’un parc de tri. Ces bâtiments mécanisés sont indispensables pour l’éleveur ardéchois qui travaille seul sur son exploitation, assure un statut d’élu à la chambre d’agriculture et a une activité syndicale. Ancien président de la Fédération départementale ovine, il est également administrateur à la FNO.

Les agnelages suivent la pousse d’herbe

Marqués par des crêtes étroites et des gorges infranchissables, ces espaces de pâturage se composent essentiellement de landes à genêts et de parcours non mécanisables. Ils apportent une alimentation naturelle et diversifiée aux brebis. Elles y pâturent au printemps et à l’automne, tout en arrivant à valoriser l’herbe sèche d’été. Les agnelages suivent la pousse d’herbe, particulièrement en avril et en mai. « Nous faisons avec ce qui pousse. Jusqu’en juillet, les mères et les agneaux restent à l’extérieur, nous avons de l’herbe », explique Mickaël Giraud. « L’idée est d’être le plus naturel possible. » En cas de période sèche marquée, l’éleveur dispose de 25 ha de prairies de fauches situées sur le plateau ardéchois, à une vingtaine de kilomètres. « Nous ne produisons pas de céréales, nous sommes à peine autosuffisants en fourrage et les périodes sèches sont de plus en plus marquées. Nous devons avoir de la marge en surface pour que les brebis puissent consommer la pousse du printemps durant l’été. » Pour Mickaël Giraud, pas question d’utiliser l’alimentation biologique : « Je ne m’y retrouve pas. Se convertir n’entraîne pas assez d’écart de valorisation par rapport à ce que je produis aujourd’hui, bien que mes pratiques y ressemblent beaucoup. J’utilise très peu d’antibiotiques et un traitement antiparasitaire unique sur la carrière de l’agneau… ».

La complémentarité de l’élevage ovin et de la châtaigne

Dans ce décor, « nous n’avons pas non plus beaucoup de moyens pour travailler sur la fertilisation des sols donc nous utilisons les ressources végétales naturelles du mieux que nous pouvons… ». Et les châtaigniers ne sont jamais bien loin. Beaucoup de brebis pâturent sous ces arbres emblématiques en Ardèche, particulièrement sur l’exploitation de Mickaël Giraud. Il y cultive la variété traditionnelle AOP de Comballe en agriculture biologique sur 5,5 ha, vendue en frais auprès de grossistes ou en transformation (farine). « La châtaigne apporte des revenus aléatoires et peut représenter jusqu’à 20 % des ressources de l’exploitation, parfois plus, mais c’est une activité complémentaire avec l’élevage ovin », constate-t-il. « C’est une manière d’occuper les pâturages, de nourrir les brebis à l’automne tout en nettoyant les châtaigniers. J’essaie de ne rien gaspiller et de valoriser le plus possible le produit. » Quant aux travaux de débroussaillage sur ses parcours, la seule alternative dont il dispose est de pratiquer le brûlage. « Nous réalisons des coupe-feu, préparés et bien encadrés. C’est un véritable outil de travail parce que nous ne pouvons pas nous rendre sur le terrain avec du matériel », explique-t-il. « Le genêt repart très vite sur les landes et étouffe tout. Au bout de quatre à cinq années, les espaces se referment. Il faut y revenir régulièrement pour les maintenir ouverts. » Cette pratique permet également d’entretenir les territoires. Même son de cloche pour l’entretien des clôtures qui serpentent sur une trentaine de kilomètres. Ces systèmes d’exploitation très extensifs représentent des atouts considérables pour valoriser sa production d’agneaux auprès des consommateurs. En matière environnementale aussi, la pression du pâturage et la pratique du brûlage assurent l’entretien et la mise en valeur du territoire, la biodiversité, la lutte contre les incendies…

Chiffres clés

450 brebis grivette croisées île-de-France et recroisées vendéenne.
200 ha de SAU situés en zones de pentes et 25 ha de prairies de fauches sur le plateau ardéchois.
1 UTH
1,4 agneau par brebis de taux de prolificité 
10 t de châtaignes par an en moyenne

Un agneau 100 % ardéchois

Expliquer ses pratiques et les valoriser auprès des consommateurs de son territoire. Ce sont les objectifs visés par la marque « Agneau de l’Ardèche » lancée en juin 2018 par le Syndicat départemental ovin. Cette démarche suscite de grands espoirs auprès des éleveurs. Pour cause, elle valorise à la fois leurs systèmes d’exploitation, leur territoire marqué essentiellement par des landes et des parcours, et les outils économiques présents en Ardèche notamment les abattoirs (Annonay, Privas, et Aubenas). En clair, « l’agneau part de chez moi, il est tué à 30 km et vendu aux alentours en boucherie », explique Mickaël Giraud, ancien président de la Fédération départementale ovine et actuellement administrateur à la FNO. Une quarantaine d’éleveurs du département sont engagés dans cette démarche. Le cahier des charges se distingue par un élevage très extensif, une alimentation garantie sans OGM à base de céréales, une période de pâturage de 6 mois minimum, et une conformation et un état d’engraissement pour les bouchers. Il n’a pas été construit sur un produit imposé mais en concertation avec les attentes des éleveurs, des bouchers et des grossistes ardéchois. « Nous ne révolutionnons pas nos systèmes d’exploitation, au contraire, nous les mettons en valeur », rajoute-t-il. Ils répondent aussi à un fort potentiel de commercialisation car parmi les 45 000 agneaux vendus chaque année en Ardèche, seuls 30 % étaient jusqu’ici estampillés sous label « Agneau de l’Adret ». À long terme, l’objectif de cette démarche est de créer une IGP ardéchoise.

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