Concours
Le Mouton Boulonnais récompensé par un trophée de l'agriculture durable
Avec des agneaux bien valorisés et un estivage sur un site naturel sensible, la race Mouton Boulonnais sait allier économie et développement durable.
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« Je suis un habitué des concours, ça tient de famille, avoue Jean-Gustave Rivenet, éleveur de 230 brebis à Calais. Du temps de mon grand-père, c’était les bovins. Quant à mon père, il élevait des chevaux boulonnais. » Alors, quand il a su que le ministère de l’Agriculture organisait un trophée de l’agriculture durable, il n’a pas hésité. Il a fait postuler l’association Mouton Boulonnais qu’il préside, organisme de sélection de la race, et a obtenu une mention spéciale du jury, pour la valorisation d’une espèce animale.Ce trophée national récompense des démarches individuelles ou collectives, exemplaires d’une agriculture à la fois productive et particulièrement respectueuse de l’environnement et des hommes qui la font vivre.
Depuis le début des années 90, les gestionnaires de milieux naturels font appel aux éleveurs de Moutons Boulonnais pour entretenir des sites sensibles par pâturage. Cette race est particulièrement adaptée puisqu’à l’origine sélectionnée pour le parcours des coteaux et des talus du Boulonnais, elle en a gardé des caractéristiques raciales fortes : rustique, peu exigeante pour la qualité de la nourriture, bonne marcheuse… Cette année, les éleveurs ont signé un contrat d’entretien de 276 hectares (50 hectares en 2009) avec le Conseil général du Pas-de-Calais, qui rétribue un poste de berger depuis le mois de juin, Gaëlle Dubuis, originaire de Rhône-Alpes. Riche d’une expérience en alpages, elle garde 320 brebis sur le site du Cap Blanc-Nez jusqu’à fin octobre.
C’est un cas unique d’estive au nord de la France. Eden 62 est la structure chargée de la gestion de cet espace naturel sensible, en lien avec le Parc naturel régional des Caps et Marais d’Opale. Le centre régional de ressources génétiques du Nord-Pas-de-Calais basé à Villeneuve d’Ascq apporte quant à lui une assistance technique et administrative. « A terme, 500 à 800 brebisdevraient pâturer sur 350 hectares » espère Jean-Gustave Rivenet. C’est un retour aux sources pour la race, adaptée à la marche avec son grand gabarit, car elle pâturait sur ces terres avant de connaître une baisse d’effectifs. En effet, le Mouton Boulonnais a été un temps menacé, d’où la création de l’association pour le sauvegarder en 1984. « Il ne restait plus à l’époque que trois éleveurs réputés de Boulonnais, rappelle le président, alors qu’autrefois, les nombreux producteurs de betteraves mettaient des brebis dans leurs champs après la récolte. » C’est aujourd’hui une race en conservation avec 2500 brebis et qui regroupe 40 éleveurs, dont environ une dizaine de professionnels. « Il n’y a rien de plus intelligent que de rendre son territoire à celui à qui il appartenait, c’est de l’écologie raisonnée » souligne Jean- Gustave Rivenet.
UN EXEMPLE À SUIVRE ?
La race n’est pas des plus prolifiques avec une moyenne de 1,4, mais les agneaux sont bien valorisés par le biais d’une filière courte lancée en 1998 par les éleveurs, « l’Agneau Boulonnais, Agneau des Terroirs du Nord », auprès d’une dizaine de bouchers artisanaux locaux (19 agneaux commercialisés par semaine, soit un millier en 2009). Jean-Gustave Rivenet pense que l’histoire du Mouton Boulonnais pourrait servir d’exemple au niveau national. « Nous avons assisté à un colloque sur les grands sites en France en octobre dernier et depuis, nous avons été contactés par le Conseil général des Côtes-d’Armor en Bretagne qui se montre intéressé à mener le même type d’expérience avec la brebis Belle-Ile sur le Cap Fréhel. Cela pourrait fonctionner si sur place, ils ont comme nous des éleveurs qui ont foi en leur race. »
Édition 2011 des trophées
Le ministère de l’Agriculture a prévu une troisième édition des trophées de l’agriculture durable, en partenariat avec le Crédit Agricole. Deux catégories seront évaluées par le jury : « exploitant » à destination des agriculteurs, et « structures » pour celles qui suscitent ou accompagnent des démarches innovantes. Le jury national, présidé par Erik Orsenna, réunit des représentants du monde agricole et des personnalités qualifiées ainsi que les lauréats primés l’année précédente au niveau national. Les dossiers de candidature peuvent être téléchargés directement sur : http://agriculture.gouv.fr/ trophees-de-l-agriculture-durable, 698, ou être retirés auprès des Directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF). Ces dossiers doivent être renvoyés au plus tard avant le 1er novembre 2010. Le déroulement du concours se réalise en deux phases de sélection avec un jury régional puis national. Les catégories « exploitant » et « structures » sont dotées chacune de 10 000 euros. Les récompenses seront remises lors du prochain Salon international de l’agriculture à Paris.