Accords commerciaux
Mieux suivre les conséquences de l’accord UE-Canada
Un rapport pointe le manque d’outils pour assurer le suivi des effets du Ceta notamment sur les filières sensibles et propose d’adopter indicateurs et structures dédiées.
L’accord économique et commercial global (Ceta), accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Canada, est entré en vigueur de façon provisoire le 21 septembre 2017, suscitant de vives craintes au sein de certaines filières agricoles. Sur demande conjointe de plusieurs ministères, le conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), l’Inspection générale des finances (IGF) et le conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) ont été chargés d’identifier les données et les gouvernances à même de mesurer les effets de ce traité sur cinq filières sensibles : viandes bovine et porcine, aviculture, sucre et éthanol.
Quantifier les effets
Pour suivre les effets de cet accord, leur rapport relève l’importance de disposer de données fiables sur les marchés français, européens et canadiens pour ces filières sensibles. Or, selon les filières considérées, les données pertinentes ne sont pas les mêmes ni l’échelle géographique. Il est aussi difficile de mettre en œuvre des données pas toujours comparables.
Ainsi, pour certains produits, comme la viande bovine, le niveau de nomenclature à six chiffres commune à tous les systèmes douaniers est insuffisant, et un niveau de classification plus fin est nécessaire. Mais dès lors que l’on descend à ce niveau, les catégories statistiques ne recouvrent pas exactement les mêmes produits en France et au Canada. Les rédacteurs du rapport conseillent de se tourner notamment vers les données des Douanes, de FranceAgriMer, d’Agreste, de la DG Agri et d’Eurostat.
Créer des instances
La Commission européenne est responsable de la politique commerciale des pays de l’UE, mais n’a pas vocation à analyser les échanges résultants des traités. La gouvernance du Ceta est assurée par treize comités de suivi sectoriels. Le rapport préconise de créer une entité identifiée, afin de suivre de manière globale les effets des accords commerciaux. Au niveau national, plusieurs opérateurs observent déjà le suivi économique des filières agricoles. Il apparaît néanmoins nécessaire de mieux les coordonner entre eux pour assurer un dispositif de suivi efficace. Le rapport suggère qu’un groupe de travail interministériel se réunisse deux fois par an, pour assurer la veille et le suivi de la mise en œuvre des accords de commerce pour les filières agricoles sensibles.
Le ministère de l’Alimentation rappelle que la Pac ne peut servir de compensation des effets de la politique commerciale, mais doit au contraire la guider. Si les préconisations du rapport ne s’attellent qu’à mesurer les conséquences économiques du traité, la mission rappelle que les éventuels effets environnementaux et de santé publique doivent aussi être pris en compte et évalués par une structure dédiée.
Des risques différents selon les filières
Pour la viande bovine, le principal risque du Ceta est lié à l’entrée de morceaux de haute qualité à moindre coût, ce qui pourrait mettre en péril l’équilibre des carcasses européennes. En 2022, 67 950 tonnes équivalent carcasse (téc) pourraient être importées par l’UE sans droits de douane. Pour le porc, le traité semble être une occasion pour l’UE mis à part un risque de concurrence accrue sur le jambon. Le contingent à droit nul en 22 atteindra 80 549 téc. L’enjeu reste limité pour le sucre et les produits sucrés, mais pourrait créer un précédent pour d’autres accords, car le contingent n’est pas soumis à une règle d’origine. Enfin, la volaille de chair est exclue du Ceta, mais elle constitue un enjeu majeur dans d’autres négociations commerciales en cours.