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Étiquetage : une nouvelle conception de l'harmonisation

Le règlement Inco a autorisé les États membres à prendre ou à conserver des mesures nationales sur de nombreux points. Cette latitude nationale ne facilite pas la tâche des entreprises…

Le règlement européen relatif à l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (dit règlement Inco) harmonise la présentation et l'étiquetage des denrées alimentaires sur le territoire de l'Union européenne, en établissant une liste de mentions obligatoires, en organisant leurs conditions de présentation et en encadrant les mentions facultatives. Mais le règlement autorise aussi, expressément, six hypothèses dans lesquelles les États membres peuvent prendre ou conserver des mesures nationales.

Nouvelles mentions obligatoires nationales

Tout d'abord, ils peuvent ajouter de nouvelles mentions obligatoires, en plus de celles prévues par le règlement et ce, pour des catégories spécifiques de denrées alimentaires, justifiées entre autres par des motifs de protection de la santé publique ou de protection des consommateurs (art. 39). Ces mesures sont extrêmement nombreuses : par exemple, le décret français no 2013-2010 du 12 novembre 2013 relatif aux fromages et spécialités fromagères, précise que l'étiquetage de ce type de denrées doit également porter l'indication du pourcentage de matière grasse sur le produit fini.

D'autre part, des mesures nationales peuvent déroger aux dispositions du règlement en ce qui concerne le lait et les produits laitiers présentés dans des bouteilles en verre destinées à être réutilisées (art. 40) et les boissons alcoolisées (art. 41). Les États membres peuvent conserver leurs mesures na-tionales relatives à une expression de la quantité nette autre que celle au 100 g ou au 100 ml prévue par le règlement – si elles sont relatives à une catégorie spécifique de denrées alimentaires et si elles ont été adoptées avant le 12 décembre 2011 (art. 42). Ainsi, l'article L 112-7 du Code de la consommation français prévoit que pour les escargots préparés en coquille et les huîtres, l'indication de la quantité peut être exprimée en nombre d'unités, accompagnée de l'indication du calibre. Les États membres peuvent adopter des mesures nationales portant sur l'indication facultative d'apports de référence pour des catégories particulières de population (art. 43).

Le cas des denrées non préemballées

Il convient de rappeler qu'en ce qui concerne les denrées non préemballées, le règlement Inco a limité l'information obligatoire à la présence d'allergènes. Cependant, l'article 44 prévoit que des mesures nationales peuvent imposer d'autres mentions, parmi celles qui sont obligatoires pour les denrées alimentaires préemballées. En outre, les États membres peuvent préciser les modalités de communication et, le cas échéant, la forme de l'expression et de la présentation de ces informations. Ainsi, la France a adopté le décret no 2015447 du 17 avril 2015 relatif à l'in-formation des consommateurs sur les allergènes et les denrées alimentaires non préemballées, qui rend obligatoire l'indication par écrit de la dénomination de la denrée non préemballée, outre celle des allergènes. Plus de la moitié des États membres a adopté des mesures nationales sur la base de cet article 44. Le marché européen présente donc une cartographie très variée en termes de réglementation de l'information des consommateurs. Une absence d'harmonisation d'autant plus regrettable que l'accès aux différentes mesures nationales est difficile pour les entreprises.

Les États membres doivent notifier à la Commission européenne leur projet de texte, au moyen de la procédure générale d'information appelée « TRIS* » . Cette procédure permet, en principe, d'empêcher la création d'obstacles au commerce au sein du marché intérieur… Mais ce n'est pas un outil commercial à la disposition des entreprises, de nature à leur permettre un commerce intra-européen aisé. On peut donc s'étonner que la Commission européenne n'ait pas prévu un « registre européen » ou une liste consolidée de ces initiatives nationales.

*Directive 98/34/CE du Parlement et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux servies de la société de l'information, JOUE L 204 du 21 juillet 1998, p. 37.

LE CABINET KELLER & HECKMAN

Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaires, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avocate-associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est chargée de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu'en contentieux, auprès des industries de l'agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l'Union européenne.

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