Baratins et autres luttes d'influence
Le 7 février dernier nous alertions dans ces colonnes sur le pouvoir d'influence croissant des ONG. Des évènements intervenus ces derniers mois ne font que confirmer le phénomène. Début novembre, Envoyé spécial diffusait un reportage mettant en cause le saumon norvégien. À la veille de Noël, le journaliste avait choisi comme guide un militant écologiste, Kurt Oddekalv, de l'association Green Warriors of Norway. Si l'on peut critiquer le caractère partial du documentaire, il a in-contestablement marqué l'opinion des Français. Quelques mois après sa diffusion, au salon international des produits de la mer à Bruxelles (Seafood expo global), début mai, les fabricants de saumon fumé constataient – impuissants – une forte baisse de leurs ventes, au profit en partie de la truite fumée, qui pâtissait pourtant depuis de nombreuses années d'une image moins favorable. La semaine dernière, c'est l'ONG allemande Foodwatch qui a fait une entrée fracassante sur le sol français, dénonçant les « ruses légales » de grandes marques (Repère, Puget, Vrai, Lustucru et Maggi). Résultat : plusieurs articles dans la presse (Le Monde notamment), une pétition signée plus de 50000 fois (entre autres par le député Razzy Hammadi, qui promet sur son blog « de faire primer l'intérêt des consommateurs face à certaines pratiques de l'industrie agroalimentaire ») et la réaction de Michel-Édouard Leclerc, quelque peu maladroite, dans un billet intitulé « Une polémique sur le jambon de dinde ? Baratin ! ». Une réponse visiblement attendue par l'ONG qui a aussitôt rétorqué : « Chercher à minimiser la critique massive des clients est-ce là une façon de prendre leurs préoccupations au sérieux ? ». Dans la bataille du marketing, il semble que le distributeur ait trouvé un adversaire à sa taille. En Allemagne, l'ONG est parvenue à faire renoncer la Deutsche Bank à proposer des produits financiers sur des matières premières agricoles. L'industrie agroalimentaire a facilement le mauvais rôle auprès de l'opinion publique, souvent à tort. C'est malheureusement un fait. Et pour remonter la pente, mépriser les ONG aux méthodes d'influences très pointues n'est certainement pas la solution.