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« L’avenir se joue chez les cavistes des grandes villes »

Ancien président de Système U, Serge Papin entrevoit une mutation profonde de la distribution au détail du vin. Selon lui, les cavistes des grandes villes développeront des lieux de convivialité pour les citadins avec des formations à la dégustation dans des espaces qui mettront en valeur les régions d’origine. Les metteurs en marché et les interprofessions cofinanceront cette théâtralisation commerciale. Aux vignerons indépendants de se regrouper pour affirmer leur présence dans ces endroits de convivialité. Il nous a détaillé sa vision du futur de la vente de vin le temps d’une interview.

Ancien PDG de Système U, Serge Papin croit en l'avenir de lieux de vente mettant en scène le vin.
© X. Delbecque

D’après vous, quelle forme va prendre la distribution de vin au détail à l’avenir ?

Observons l’évolution de la demande sociétale. Le commerce n’en est que le reflet. Nous constatons depuis plusieurs années que les métropoles concentrent toujours plus la richesse et l’emploi au détriment des territoires. Les mouvements sociaux récents en sont l’illustration. L’âge d’or de l’hypermarché des villes moyennes de province est terminé. Or, dans les métropoles, il est difficile pour les citadins de stocker leurs vins. Alors, la cave de chaque habitant est celle du caviste le plus proche qui aura mis du rosé et du champagne au frais prêts à déguster.

Ce n’est pas nouveau, le nombre de cavistes ne cesse-t-il pas de croître depuis plusieurs années ?

Dans ces grandes villes, le caviste n’est pas seulement un lieu de distribution. Cet espace de vente deviendra de plus en plus un lieu de convivialité comme le sont les Starbucks aux États-Unis. Les consommateurs s’y rendent autant pour faire un break et rencontrer du monde que pour consommer un café. Les cavistes auront un rôle encore plus important. Quoi qu’on en dise, les Français connaissent mal le vin. Aux professionnels de proximité de développer dans leurs lieux de convivialité leur approche pédagogique du vin.

Certains cavistes ne développent-ils pas déjà des formations ?

Quand j’étais dans la grande distribution, les producteurs me reprochaient de maltraiter leurs produits dans les linéaires banalisés à coups de promotions. Pour les cavistes urbains de demain, il en sera différemment. Chaque vin est associé à un terroir qui doit être magnifié par une théâtralisation de l’espace de vente. Ainsi différents endroits dans le magasin pourraient devenir des ambassades conviviales des régions viticoles qui permettraient aux consommateurs de se situer, voire voyager par procuration. Regardez déjà comme le champagne est magnifié dans certains duty free d’aéroports.

Qui va financer cette théâtralisation des espaces de vente ?

Les interprofessions chargées de la promotion de leurs produits, tout comme les grandes maisons, devraient, demain, participer à la mise en avant de leur terroir dans les points de vente avec des éléments de décors adaptés. Les viticulteurs indépendants ont également leur carte à jouer. En se regroupant à plusieurs autour d’une même thématique, des producteurs pourront mutualiser le coût de la scénarisation de leurs produits chez certains cavistes.

Voyez-vous d’autres mutations des points de vente dans les grandes villes ?

Ces espaces de convivialité devraient renouer avec certains modes de la distribution de vins aujourd’hui disparus. Dans le respect du développement durable, nous pourrions assister au retour des tireuses. Les habitants des grandes villes pourraient venir chercher leur vin dans leurs bouteilles d’un litre et demi personnelles et réutilisables. Voire des contenants plus importants. À la différence d’autres produits, le vin dispose de cette faculté de pouvoir réunir des gens dans des moments agréables d’échanges et de détente. Aux cavistes de répondre aux attentes sociétales des habitants des grandes villes. Et à leurs points de vente de devenir des lieux de convivialité.

Serge Papin prévoit la fin de l’hypermarché

Après treize ans passés à la tête de Système U, Serge Papin a quitté en mai 2018 ce groupement de commerçants indépendants. Désormais consultant, cet ancien distributeur accompagne les entreprises dans leurs mutations stratégiques. Ce spécialiste du commerce de détail estime que le concept de l’hyper « avec tout sous le même toit » des années 80 est terminé avec un déplacement de la consommation là où s’installent les jeunes actifs, les côtes atlantique et méditerranéenne et dans les 22 métropoles.

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