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Débats
Comment améliorer la résilience alimentaire des territoires

Pour certains, la crise liée à la Covid-19 a mis en lumière une forte résistance du modèle alimentaire français, pour d’autres, elle a, au contraire, pointé de nombreuses fragilités. La résilience alimentaire des territoires, tel était le thème de la première matinée parlementaire organisée par le CNRA.

Né en octobre 2020 à l’initiative de Maximilien Rouer, cofondateur de La Note globale, le Conseil national pour la résilience alimentaire (CNRA) tenait sa première matinée parlementaire sur la résilience alimentaire des territoires, le 8 avril 2021. Par « "résilience alimentaire", nous entendons la capacité des systèmes alimentaires et leurs entités à fournir une alimentation suffisante, adaptée et accessible à tous, même en temps de crise », a introduit le président du CNRA, Maximilien Rouer. « Mars 2020 a montré une certaine vulnérabilité alimentaire en France. Cette fois, c’est passé, mais la prochaine fois, est-ce que cela passera ? » s’interroge-t-il.

La France a fait preuve d’une résilience alimentaire, permettant de limiter les ruptures et de poursuivre l’approvisionnement des territoires.

Cette crise a joué un rôle de révélateur

« Cette crise a joué un rôle de révélateur, pas une seconde, nous avons manqué de quoi que ce soit, a déclaré Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture, dans une vidéo introductive de la journée, la crise a révélé la force de toute notre chaîne alimentaire française. » Et d’ajouter : « Je suis convaincu que les Français savent ce qu’ils doivent à toute cette chaîne. » Mais, selon lui, la crise a aussi révélé des fragilités et des « défis de reconquête de notre souveraineté alimentaire ».

Le ministre a évoqué les points d’amélioration et les pistes lancées par le gouvernement pour limiter la dépendance alimentaire de la France : le plan protéines de 100 millions d’euros lancé dans le cadre de France Relance ; l’attractivité des métiers agricoles ; le renforcement de la loi Egalim à la suite des travaux de Serge Papin et des députés Thierry Benoît et Grégory Besson-Moreau ; le développement des projets alimentaires territoriaux (PAT) auxquels 80 millions d’euros ont été alloués. « Renforcer notre résilience alimentaire, cela passe par l’ancrage alimentaire des territoires. Il y a une tendance forte vers les circuits courts, le local, les produits frais. L’État encourage cette dynamique positive entraînée par les PAT », a déclaré le ministre.

Les PAT, comme outil d’ancrage territorial

Le 30 mars dernier, le ministère de l’Agriculture rendait public les 65 nouveaux dossiers de PAT retenus dans le cadre d’un appel à projet lancé en décembre 2020, pour un montant global de subvention d’un peu plus de 5,3 millions d’euros. Ces nouveaux projets concernent des territoires de quarante-huit départements, dont quinze ne disposaient pas encore de PAT. « Cette nouvelle vague permet ainsi à 80 % des départements d’avoir au moins un PAT accompagné par l’État sur leur territoire », fait valoir le ministère qui souhaite que chaque département en soit pourvu d’ici à 2022.

Lire aussi : Travaux du CNA : Les PAT au service de la résilience alimentaire

Selon Gilles Maréchal, fondateur de Terralim et chercheur associé au CNRS, ces PAT permettent de « s’organiser localement », mais pourraient être améliorés. « Ils ne prennent pas en compte les accidents de parcours. Ils sont faits pour une économie en mode croisière. Il faut réfléchir aux réponses à apporter en cas de crise ou de choc soudain avant de valider ces PAT », estime-t-il.

Créer du lien

« La résilience repose sur l’interaction entre les acteurs, ajoute le chercheur, si on a tenu pendant le premier confinement, c’est bien grâce aux solidarités entre chaque acteur. » Yuna Chiffoleau, directrice de recherche à l’Inrae, abonde dans ce sens. « Il faut retisser des liens. Certaines métropoles s’allient avec des territoires où la production est plus riche pour sécuriser leurs approvisionnements, il faut rééquiper les territoires en outil de transformation », argue-t-elle. La directrice de recherche s’intéresse au « rééquilibrage entre les circuits courts et longs ». « Il ne s’agit pas de relocaliser, mais de reprendre en main les flux alimentaires, considère-t-elle, en s’intéressant aux dépendances. »

C’est sur cette question de la dépendance à d’autres territoires que la Métropole de Lyon a travaillé son projet alimentaire territorial. « Avec le nouvel exécutif, nous avons remis l’alimentation au cœur de notre politique et avons multiplié par quatre notre budget dédié à l’agriculture et à l’alimentation pour atteindre une enveloppe de 10 millions d’euros », se félicite Jérémy Camus, vice-président de la Métropole de Lyon.

Le PAT de la métropole porte notamment sur son autonomie alimentaire et la valorisation au sein de son territoire de ses propres productions. Elle souhaite notamment réorienter des cultures en circuit long vers les circuits courts et servir 50 % de produits locaux dans les établissements scolaires dans les six ans à venir.

Amener un peu de bien commun dans cette filière

« La polyvalence des territoires peut amener la résilience, selon Serge Papin, médiateur pour l’agriculture, amené à intervenir lors de la dernière table ronde de cette matinée, et non plus une spécialisation des cultures. » Et de conclure : « Si on veut la résilience alimentaire, il faut changer le rapport de force et craquer le modèle dominant de guerre des prix. Les pouvoirs publics doivent s’impliquer, pour amener un peu de bien commun dans cette filière. »

Deux exemples de nouveaux projets alimentaires territoriaux

Parmi les 65 nouveaux projets alimentaires territoriaux retenus par le ministère de l’Agriculture, citons par exemple celui de la communauté de communes Cœur de Beauce (Eure-et-Loir) et Pays Dunois (Creuse). Elle a construit son projet autour de la valorisation des circuits courts, de la création de points de vente collectifs, du travail avec des associations sur la précarité alimentaire et de l’intégration de produits locaux en restauration collective. Le PAT porté par le conseil départemental des Alpes-Maritimes vise, de son côté, à favoriser l’installation d’agriculteurs en agriculture biologique ou labellisés HVE et à développer l’activité de la plateforme « 06 à Table ! » pour la restauration collective.

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