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Bretts : les bons réflexes de prévention

La société AEB a consacré un séminaire aux biocontaminations des vins, en mars dernier. L’occasion de revenir sur des points essentiels, mais souvent sous-estimés, de la prévention des Brettanomyces.

« Le sulfitage a fonctionné pendant des années mais a fabriqué des souches résistantes. Il faut maintenant changer de méthode », a rappelé Christophe Gerland, directeur d’Intelli’Œno, lors du séminaire AEB. Pour le microbiologiste, le point fondamental de la prévention demeure l’hygiène. Brosses et huile de coude sont indispensables pour éliminer les biofilms formés par les levures, et qui résistent au simple lavage à l’eau sous pression.

Démonter les pompes trois fois par an

« Les corps de pompe renferment quasi systématiquement des souillures, de l’eau résiduelle nauséabonde et, dans plus de 50 % des cas, des Bretts vivantes, a indiqué Christophe Gerland. Mon conseil est de ne pas se contenter de nettoyants désinfectants mais de démonter toutes les pompes au moins trois fois par an, en frottant énergiquement et en laissant sécher. » L’idéal est d’ailleurs d’avoir une vanne de purge au point le plus bas du corps de pompe, à laisser ouverte lors du stockage. Ne pas non plus oublier de nettoyer les membranes des cloches, ainsi que de démonter et récurer vannes et robinets. Une attention particulière doit également être portée au brossage des godets et tapis des machines à vendanger, fonds de conquets, canalisations…

Prévenir les contaminations dans les blancs

Autre point sous-estimé : le pressoir. Pour Christophe Gerland, il serait même source de contamination des moûts blancs. « Un pressoir mal nettoyé en fin de saison va contaminer les premiers jus du millésime suivant. Cette contamination croisée explique que l’on rencontre de plus en plus de cas de phénols volatils sur vin blanc. Je l’ai observée sur des moûts de champagne, bourgogne et côtes du rhône, y compris sur des pH de 3. » À noter que l’inox du pressoir est toujours plus contaminé que la membrane, et devrait être brossé au moins en début et fin de campagne.

Attention au couvercle des tireuses

Les couvercles des tireuses peuvent abriter des Bretts et contaminer les vins lors de la mise en bouteilles. À noter que lors d’un arrêt de la chaine, le redémarrage engendre une montée en pression dans le circuit avec libération potentielle de biofilm dans les 10 à 50 premières bouteilles. « Une bonne précaution consiste à écarter ces bouteilles pour refiltrer le vin », a indiqué Christophe Gerland.

Séparer temporairement les lies

« On fait chuter la population de Bretts en réalisant, une semaine après écoulage et pressurage, un soutirage avec séparation temporaire des lies. » Les lies élevées séparément, aux alentours de 10 °C, sulfitées et bâtonnées, pourront être réincorporées après mortalité des Bretts. Plus généralement, le soutirage demeure intéressant pour diminuer nettement les populations.

Prélever dans les lies

Pour réaliser un contrôle microbiologique de cuve ou barrique en élevage, il est conseillé de prélever dans les lies plutôt qu’au milieu de la cuve ou de la barrique. Cela permet de prévoir un soutirage si besoin. En matière de prévention, l’idéal est de surveiller précisément la concentration des vins en sucres résiduels. Il suffit de 0,1g/l de glucose/fructose pour voir la levure se multiplier à un niveau dangereux. Seuls quelques laboratoires assurent le dosage avec cette précision.

Raisonner la lutte curative

Inutile de stresser dès qu’une analyse microbiologique révèle une teneur de 10 000 UFC/ml. « Les Bretts ne produisent que 6µg/l d’éthyl-phénol par mois à cette concentration. On a le temps de bien raisonner la lutte avant de dépasser le seuil de perception (≈ 400µg/l). Une succession de soutirages peut suffire pour retomber sous le seuil de 1000/ml. » En revanche, à une concentration de 10 millions/ml, les 400µg/l sont atteints en deux jours.

Recherche : vers des Bretts inoffensives ?

Des souches de Bretts qui ne produisent jamais de phénols volatils, même en cas de forte population, pourraient faire l’objet de sélection pour « bioprotéger » les vins. Elles pourraient ainsi occuper le terrain au détriment des souches plus dangereuses. Une autre piste émerge autour des besoins de la levure en fer. Des techniques visant à limiter les teneurs de ce composé dans les vins pour ralentir leur multiplication sont envisagées. Parallèlement, plusieurs nouvelles molécules sont en cours de tests pour limiter les teneurs en phénols volatils déjà formés dans les vins, comme l’infusion de subérine, extraite du liège, ou encore la cellulose estérifiée ou l’emeraldine base…

IC-Gene : une nouvelle méthode de détection des Bretts, rapide et économique

AEB lance un kit portable de détection des contaminations microbiennes dans les vins. L’IC-Gene se présente sous la forme d’un boîtier d’analyse couplé à une tablette d’affichage des résultats et permet d’estimer les populations de Bretts (et de Botrytis) en 2h maximum directement sur site. Il s’adresse cependant davantage aux gros chais et aux laboratoires, qu’aux petites caves. « La manipulation est assez simple mais il est préférable qu’elle soit effectuée par du personnel habitué à travailler en laboratoire", précise Sébastien Chédozau, responsable matériel de laboratoire chez AEB.

Le principe d’analyse est basé sur l’amplification de l’ADN, estimée plus sensible et spécifique que la méthode PCR classique, selon AEB. « Elle détecte les souches viables non cultivables au contraire des cultures sur boîtes de pétri. Elle est donc précise même après un sulfitage. » La manipulation demande 1 h 15 pour 10 échantillons. Le vin est d’abord centrifugé (centrifugeuse fournie) ; on ajoute au dépôt recueilli une solution d’extraction de l’ADN, qui sera ensuite purifié, dilué, puis amplifié après ajout de réactifs spécifiques. Le résultat apparaît en 45 minutes, le seuil de détection, de 100 à 1000 cellules par millilitre, s’avère suffisant pour un suivi pratique en cave. La concentration peut être précisée par lecture de courbes de résultats.

L’IC-Gene est commercialisé à 8 000 € HT, auxquels s’ajoutent des kits de réactifs à 600 € pour 40 mesures (soit 15 euros par dosage).

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