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Rester vigilant lors des achats de bouteilles

Les irrégularités sur les bouteilles peuvent avoir de lourdes conséquences pour les vignerons, allant d’une oxydation prématurée aux problèmes de bris de verre. Voici comment s’en prémunir.

C’est ce qui s’appelle jeter un pavé dans la mare. En 2013, la chambre d’agriculture de la Gironde avait révélé que 20 % des 276 bouteilles testées dans le cadre d’un panel présentaient des défauts. En cause, des problèmes d’irrégularités sur le diamètre des cols, pouvant entraîner une oxydation prématurée des vins. Un chiffre pour le moins alarmant. Mais suite à la réaction houleuse des verriers, l’organisme refuse aujourd’hui de s’exprimer sur le sujet. Et pourtant, les problèmes seraient toujours d’actualité à en croire certains opérateurs. « Chez certains verriers peu consciencieux, il peut y avoir 15 à 25 % d’anomalies sur les cols », annonce Fabrice Plançon, directeur de Gai France. S’il ne pointe pas les grands groupes, il déplore en revanche l’attitude de certains professionnels moins regardants qui, pour tirer les prix, prolongeraient trop la durée de vie de leurs moules.

Or, « si le bec n’est pas bien centré (NDLR : suite à un diamètre de col irrégulier), le parapluie qui se crée au moment où le vin se déverse n’est pas régulier. Cela se traduit par une perturbation, et donc une oxygénation, au niveau du col, qui est la zone la moins bien inertée, précise-t-il. Néanmoins, les nouvelles machines avec becs électropneumatiques et embouteillage sous gaz inerte permettent de s’affranchir de ce problème. » Mais le risque ne s’arrête pas là. « Lorsque le col n’est pas droit, le bec peut en briser une partie et des débris de verre peuvent atterrir dans la bouteille. Il s’agit du point le plus critique et le plus contrôlé. Malgré tout, le risque zéro n’existe pas », témoigne pour sa part le directeur propriétaire d’une société d’embouteillage. Du côté des verriers pourtant, les cahiers des charges se durcissent. « À ma connaissance, les problèmes de cols sont très rares. Mais il ne faut pas oublier que ce sont des réglages très fins et des défaillances peuvent arriver », observe Éric Martin, responsable recherche et développement chez Verallia. Certains négociants disposent aujourd’hui de dispositifs optiques, permettant de vérifier l’absence de corps étrangers dans les bouteilles, mais c’est loin d’être la majorité, ce type d’équipement restant très onéreux.

Des tailles de cols proches des seuils de tolérance

Outre les problèmes de moules, certains verriers ne se montreraient pas assez pointilleux sur les contrôles en sortie de four, d’après Fabrice Plançon. « La plupart du temps, cela ne va pas jusqu’à l’anormalité. Les cols sont simplement dans le maximum de tolérance imposés par les normes verrières, observe-t-il. Mais sur les lignes d’embouteillage, les ajustements sont très précis et doivent correspondre, à 2 millimètres près. » En conséquence, le simple fait d’être dans les limites maximales de tolérance peut perturber la cinétique d’embouteillage et aller jusqu’à des problèmes de casse. « Ce qui entraîne un arrêt immédiat des lignes et peut être à l’origine de pertes économiques importantes pour le vigneron », commente Philippe Floriot, responsable technologie verrière chez OI. Nous avons des contraintes de plus en plus importantes sur le taux de casse, qui nous imposent de ne pas dépasser un certain seuil. » Et les irrégularités de cols sont d’autant plus préjudiciables que le bouchage est technique. « Si le vigneron opte pour des capsules à vis ou du bouchon en verre, la bouteille doit être vraiment parfaite », rappelle Fabrice Plançon. Au-delà des risques de casse ou de dommages organoleptiques, les bouteilles peuvent aussi présenter des déficiences esthétiques. Cela va du défaut de couleur à la présence de bulles, ou de déformation du verre. Ce qui peut entraîner des soucis dans la pose des étiquettes. Pour anticiper ce genre de soucis, les verriers réalisent des contrôles tout au long de la ligne. « Un système de caméra nous permet de déceler toute inclusion dans le verre, telle qu’une bulle ou un grain », assure Philippe Floriot. Fort heureusement, les problèmes demeurent occasionnels d’après la société d’embouteillage interrogée. « Néanmoins, certains verriers s’entourent de normes et les cas de litiges se soldent rarement par un dédommagement intégral de la part de l’entreprise. Y compris lorsque leur responsabilité est avérée et que les problèmes de moules sont pointés du doigt », déplore-t-il.

Éviter le verre reconditionné et récupérer les débris en cas de casse

Des solutions peuvent être mises en œuvre pour anticiper tous problèmes. À commencer par la réflexion en amont des achats. « Les vignerons sont en droit d’imposer un cahier des charges précis des conditions d’embouteillage et je le leur recommande vivement, assure Fabrice Plançon. Mais ils doivent surtout choisir leurs bouteilles en fonction de critères techniques, et non pas seulement du marketing ou du prix. Cela peut leur éviter d’avoir à gérer les conséquences a posteriori. » Du côté de la société d’embouteillage, l’expert conseille d’être très attentif à la traçabilité des lots. « Il faut toujours récupérer la fiche palette au moment de la livraison. C’est ce qui va permettre de remonter jusqu’aux moules en cas de litiges », rappelle-t-il. Il recommande ensuite de refuser toute palette détériorée, pouvant présenter des risques de casse. Il déconseille également d’acheter du verre reconditionné. « Dans ces cas-là, il peut y avoir des défaillances en termes de traçabilité. Mieux vaut opter pour du neuf. » Enfin, si vous êtes soumis à un problème de casse sur la ligne d’embouteillage, sachez que les verriers préconisent de ramasser les débris. « Pour mener à bien nos analyses et détecter la source du problème, il est idéal de pouvoir récupérer tous les morceaux de verre. En particulier ceux qui se situent à proximité du point de cassure », souligne Éric Martin. Ainsi, les firmes peuvent procéder à des analyses poussées, remontant parfois jusqu’aux nuances d’acier ayant été en contact avec le verre. Et ce, pour déterminer de manière claire la source de l’incident, car le lien entre l’embouteilleuse, l’obturateur et la bouteille demeure très étroit. Un dernier auto contrôle au moment de la mise s’impose donc pour vérifier la qualité du remplissage et valider le choix des matières sèches.

Attention à la maintenance des embouteilleuses

La qualité de la ligne d’embouteillage constitue un paramètre essentiel à prendre en compte pour une mise réussie. Et l’efficacité des machines passe nécessairement par des opérations de maintenance régulières. « Sans révision annuelle des becs, il peut y avoir des joints défectueux et des problèmes de prise d’air. La prévention est indispensable », rappelle Fabrice Plançon, directeur de Gai France. Si l’entreprise œuvre pour systématiser les contrats de maintenance, la pratique ne semble pas encore entrée dans les mœurs. « Certaines machines sont en circulation depuis plus de quarante ans et n’ont jamais été révisées », poursuit-il. Ce qui se traduit souvent par un impact sur les caractères organoleptiques du vin.

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