La filière cognac exhorte le gouvernement à agir alors que 70 % de son activité est en danger
Lors d’une conférence de presse organisée le 19 mars, les représentants de la filière cognac ont exhorté le gouvernement à agir alors que les taxes chinoises et américaines menacent 70 % de leurs ventes.
Lors d’une conférence de presse organisée le 19 mars, les représentants de la filière cognac ont exhorté le gouvernement à agir alors que les taxes chinoises et américaines menacent 70 % de leurs ventes.

« C’est 70 % de notre business qui est en jeu, 70 % de l’emploi et de l’écosystème régional qui pourrait être anéantis si rien n’est fait », a introduit Florent Morillon, président du Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC), lors d’une conférence de presse organisée le 19 mars. Au dossier de la taxation chinoise, en cours depuis 15 mois, s’ajoute désormais la menace des 200 % de taxes américaines énoncée par Donald Trump, le 13 mars dernier. Les États-Unis représentent 40 % de la valeur et 45 % du volume des exportations de cognac en 2024. La Chine cumulait 25 % de la valeur et 20 % du volume en 2023. La part est passée à 20 % de la valeur et 18 % du volume en 2024.
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« 200 % de taxes, ça veut dire qu’on ne vendra plus une bouteille. Nous prenons cette menace très au sérieux. Nous sommes pris en otage de décisions politiques nationales et européennes qui mettent à mal une filière pluricentenaire. À chaque fois nous n’avons pas été écoutés et nos alertes ont été minimisées », a fustigé le président du BNIC. Une trentaine de rendez-vous avec des ministres ont eu lieu depuis un an, sans que la menace de taxes ne s'efface.
Une accélération des pertes de marché en Chine
« Il est en train d’arriver une catastrophe d’une ampleur inenvisageable, a abondé Christophe Véral, vice-président du BNIC. Les plans sociaux commencent ». Il a aussi évoqué les ruptures de contrats qui lient les viticulteurs et les négociants. La filière, qui compte 4 400 viticulteurs et 250 négociants, évalue les emplois directs et indirects à 70 000.
De son côté, Patricia Gaborieau, vice-présidente de l’ODG cognac et représentante du négoce, a constaté que « le marché chinois se ferme à une vitesse effroyable avec une forte accélération ». À l’effet du cautionnement bancaire de 35,8 % en moyenne, en vigueur depuis octobre 2024, en attente des conclusions de l’enquête anti-dumping, s’ajoute depuis décembre 2024 le bannissement du cognac des rayons des duty free, du fait de la suspension de la détaxation. Ce canal représente 25 % des exportations de cognac en Chine. La filière évalue ses pertes à 60 millions d'euros rien que sur le seul mois de février.
Les échéances du 1er et du 5 avril
« Les dix prochains jours seront décisifs » a martelé Florent Morillon. Le 5 avril, la Chine prolongera ou non pour 3 mois l’enquête anti-dumping lancée depuis octobre 2023. Autant dire que la filière attend énormément de la visite en Chine du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, les 27 et 28 mars, annoncée il y a quelques jours.
« Nous savons qu’il existe une voie pour que notre pays et la Chine trouvent une issue », a encouragé Anthony Brun, représentant de la Viticulture au sein du BNIC. « Les Chinois veulent entrer en négociation », a estimé Christophe Véral, mettant la balle dans le camp du gouvernement.
Autre échéance, le 1er avril. Ce jour entrent en vigueur les taxes européennes en rétorsion à celles imposées par les États-Unis sur l'acier et l'aluminium européen. La filière cognac, à l'unisson de l'ensemble de la filière des vins et spiritueux, demande à l'Union européenne d'enlever le bourbon de la liste des produits taxés et plus généralement de n'y mettre aucun vins et spiritueux américains. Le seul bourbon, avec ses 600 millions d'euros d'exportation vers l'Union européenne, pèse peu face aux 10 milliards d'euros d'exportations de vins et spiritueux européens vers les États-Unis.
« Si rien n’est fait, nous ne nous laisserons pas crever en silence », a prévenu Anthony Brun.
Un plan d'arrachage a été validé début février mais la filière n'élude pas la nécessité de « calibrer de nouveaux outils » si les taxes étouffent le cognac.