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Stéphane Bern - " Depuis plusieurs années, j'achète directement aux producteurs "

© Wikipedia-Denis Probst-2012-CC BY-SA 3.olu

L’animateur paillette de « À la bonne heure » sur RTL apprécie beaucoup, et ce n’est pas une coquetterie, qu’on l’écoute sur son tracteur. Intarissable sur la Reine Claude et la duchesse d’York, c’est également un véritable amoureux de la terre, de son poulailler et de son potager. Habitué aux têtes couronnées, il est aussi doté d’un vrai bon sens paysan.

 

On connaît votre passion pour les rois, les reines et les grands de ce monde. En revanche, ce que l’on sait moins, c’est que vous êtes aussi un enfant de la campagne…

J’ai découvert la campagne vers l’âge de 7 ans. Nous avions une nounou qui s’appelait Bernadette, et on allait en vacances chez ses parents, à Villeroy-sur-Méholle, dans la Meuse. C’est là que j’ai appris à manier un tracteur, à conduire les vaches au pré, à nourrir les lapins, les poules…

 

On ne vous imagine pas…

Ça m’enchantait ! Et je me suis juré qu’un jour, je vivrai à la campagne. J’ai un bon sens paysan, un côté down to earth, avec les pieds sur terre.

 

D’ailleurs, vous vivez en partie à la campagne puisque vous avez une maison dans le Perche.

Je restaure un collège depuis plusieurs années, avec son abbaye. C’est l’œuvre de ma vie. Il y a une forêt tout autour, des champs, des chevaux, des vaches… Et je vais bientôt être propriétaire de quatre poules.

 

Vous avez un potager?

Oui, j’ai planté de la rhubarbe. Figurez-vous que j’ai une passion pour la rhubarbe. J’ai la chance d’avoir un verger du XVIIIe siècle…

 

Chez Stéphane Bern, même les vergers appartiennent à l’Histoire!

J’ai des cognaciers, des poiriers et des pommiers. La compote de rhubarbe, c’est une pure merveille ! Je fais pousser des salades, tomates, haricots… C’est un jardin organique. Par exemple, j’ai des plantes aromatiques qui éloignent les pucerons.

 

Quel type de consommateur êtes-vous?

Le samedi, je vais faire mon marché à Nogent-le-Rotrou. Là-bas, vous avez un marché bio incroyable. J’adore aller discuter le coup avec les agriculteurs du coin, on parle tomates, pommes, saisons… Pour moi, c’est un moment privilégié.

 

Que pensez-vous des hommes politiques qui se pressent chaque année au Salon de l’agriculture?

Il faut bien qu’à un moment ou un autre, ils voient des agriculteurs, quand même ! Le problème, c’est qu’ils leur font des promesses qu’ils ne vont pas tenir. Il serait plus utile d’aller négocier à Strasbourg et à Bruxelles toute l’année que de tâter le cul des vaches une fois par an. 

 

Dans ce numéro, Mac Lesggy, qui est ingénieur agronome avant d’être animateur télé, estime que tout le monde devrait assister à la mort d’un animal pour «conscientiser» davantage la consommation de produits animaux…

Il a raison, tout ça est aujourd’hui désincarné. En cinquante ans, il y a un fossé qui s’est creusé entre les villes et les campagnes. Je milite pour un retour vers les villages. On a poussé les gens à quitter les campagnes pour aller vivre dans les périphéries des grandes villes, où ils sont malheureux. Il n’y a plus de convivialité, ils ont perdu le sens du « vivre ensemble », il n’y a pas de travail.

 

Notre dossier de couverture concerne les femmes dans l’agriculture. Aujourd’hui, un agriculteur sur quatre est une femme…

C’est formidable. Mais il ne faut pas se leurrer, le milieu agricole reste encore très masculin, voire un peu macho. Et encore très conservateur, politiquement. Par exemple, il y a beaucoup d’agriculteurs qui votent Front National alors qu’ils n’ont jamais vu un étranger de leur vie. Leur vision du monde reste quand même un peu celle distillée par TF1. Bon, on va dire par les médias, pour ne froisser personne à TF1 !

Chaque année, vous animez sur France 2 Le Village préféré des Français. Ça n’est pas un peu dommage que ce soit la seule émission du service public sur le terroir?

Et encore, elle a failli passer à la trappe, je l’ai rattrapée au vol ! Avec ce collège que je restaure, j’ai la prétention de savoir comment redynamiser un village. J’ai eu cent artisans qui ont travaillé chez moi pendant trois ans. Ces gens-là sont allés déjeuner tous les jours dans des petites auberges, des petites épiceries, ils ont fait marcher le commerce.

 

Tout le monde n’a pas les moyens de se lancer dans la restauration de monuments historiques, cher Stéphane…

Détrompez-vous, ça coûte à peine plus cher de restaurer une vieille longère. Mais sur le temps et la durée, par rapport à un lotissement préfabriqué vite fait mal fait, financièrement, vous vous y retrouvez au centuple. Même à la revente. J’ai été élevé comme ça : je n’ai pas les moyens d’acheter pas cher.

 

Vous avez regardé L’Amour est dans le pré, le green-dating cathodique de Karine Le Marchand?

De temps en temps… On y voit une certaine solitude des agriculteurs. Mais bon, heureusement, on sait bien qu’ils sont juste accaparés par leur métier et qu’ils sont loin d’être désespérés !

 

Votre livre, Les Pourquoi de l’Histoire, tome 3, est rempli d’anecdotes qui mêlent histoire de France et agriculture. Par exemple, vous racontez qu’une reine a donné son nom à une variété de prune…

Oui, c’était au XVIe siècle, avec la Reine Claude, épouse de François 1er. On voulait rendre hommage à la reine, qui faisait le bien autour d’elle. Cette variété de prune était bonne comme la reine, et on lui a donné le nom de reine-claude. Les rois de France étaient très proches des paysans. Je n’oublie jamais la phrase de mon héros, Henri IV, qui disait : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ».

 

Ça fonctionne encore en 2017?

Bien sûr ! À telle enseigne que les Français sont profondément mobilisés pour leurs agriculteurs, sauf que si on leur demande de payer un peu plus cher leur litre de lait, ils rechignent. Il faudrait expliquer qu’il faut boire moins de lait, manger moins de viande… mais de meilleure qualité. On a voulu nous faire croire qu’il fallait manger de la viande une fois par jour, quelle bêtise !

 

On parle des rois de France, il y a parfois un sentiment de féodalité chez les agriculteurs d’aujourd’hui, qui vivent les tâches administratives et la paperasserie comme une nouvelle servitude…

Ça n’est pas faux. On devrait les aider davantage, les encourager à nous nourrir mieux, les encourager à faire du bio, simplifier leurs démarches. Vive l’ubérisation de la société ! Depuis plusieurs années, j’achète directement aux producteurs. Je peux vous citer vingt-cinq sites de primeurs qui livrent chez vous. Et si je mange de la viande, j’ai envie de connaître la bête et l’agriculteur qui me la vend. J’ai envie d’établir un contact.

 

On dit que le temps qu’il fait, la météo, c’est le début de toute conversation avec un agriculteur. Ça doit vous plaire ça, non?

Oui, parce que c’est comme avec les familles royales. La météo est un sujet non controversé. Un jour, j’étais avec la duchesse d’York, Sarah Ferguson, à Megève. Elle était encore mariée avec le duc Andrew, qu’elle me présente par téléphone. Je lui donne du « Votre Altesse Royale » et lui, tellement content, me demande : « Dites-moi, comment est le temps chez vous en ce moment ? » Ce sont les codes royaux. L’argent, la politique ou la religion sont des sujets bannis, de quoi voulez-vous parler ? Il reste la météo, qui met du lien entre les gens. Vous savez, la star, c’est Évelyne Dhéliat et personne d’autre ! 

 

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