Pour une gestion durable des ressources en phosphore
La préservation des ressources en phosphore nécessite une meilleure connexion entre les besoins des cultures et les ressources issues des élevages. C’est une des conclusions obtenues suite à un état des lieux des ressources en phosphore en France et dans le monde et des pistes de gestion présentées par Thomas Nesme de Bordeaux Sciences Agro et de l’UMR ISPA de Bordeaux lors d’une conférence organisée par l’Académie de l’agriculture de France. À l’échelle mondiale, l’agriculture consomme 82 % des réserves en roches phosphatées pour la production d’engrais minéraux. Les données scientifiques convergent vers un risque sérieux d’épuisement total des réserves avant 2150. Cela s’explique notamment par une augmentation de la demande en lien avec l’augmentation des revenus, tandis que l’offre reste relativement stable du fait des difficultés croissantes d’accession à de nouveaux gisements. La préservation de cette ressource passe d’abord par une meilleure gestion des boucles de recyclage au sein des systèmes alimentaires. En France, environ 800 000 tonnes (t) par an de phosphore sont apportées au sol, mais seulement 80 000 t par an arrivent dans l’assiette du consommateur. Chaque année, 33 000 t sont en effet perdues par gaspillage alimentaire, 58 000 t sont perdues depuis les sols et 156 000 t sont stockées dans les sols. Dans les régions d’élevages spécialisés telles que la Bretagne où une fertilisation élevée a permis de constituer des stocks de phosphore dans les sols, les apports peuvent être diminués. Au contraire, dans les régions de grandes cultures, les apports de phosphore n’ont pas été suffisants pour pouvoir être stockés et des engrais phosphatés provenant des régions excédentaires doivent être apportés.
Avis d’expert : Anne-Sophie Langlois, chambres d’agriculture de Bretagne
« Concentrer le phosphore pour mieux l’exporter »
« Cette présentation rappelle l’importance de la gestion collective des effluents d’élevages et la nécessité de ne pas déconnecter les élevages des cultures, dans le but d’améliorer la souveraineté alimentaire française. L’exportation hors région excédentaire de coproduits solides, plus concentrés en phosphore et plus faciles à transporter que des effluents bruts est alors la solution la plus simple de transfert. Pour pouvoir être commercialisés et exportés, les coproduits doivent être transformés. Le produit final doit respecter un cahier des charges pour répondre à l’une ou l’autre des deux normes s’appliquant aux effluents porcins : la norme « engrais organique » NF U 42-001 et la norme « amendement organique » NF U 44-051. »