Une visite en Finlande pour comprendre les queues longues
Couper la queue des porcs est interdit en Finlande depuis 2003. Les autorités européennes ont fait de leur réussite un exemple. Retour sur un voyage qui amène autant de réponses que de questions sur les leviers de ce succès.
Couper la queue des porcs est interdit en Finlande depuis 2003. Les autorités européennes ont fait de leur réussite un exemple. Retour sur un voyage qui amène autant de réponses que de questions sur les leviers de ce succès.
Des élevages de plusieurs centaines de truies, des porcs sur caillebotis alimentés en soupe, et pourtant des porcs avec des queues longues. Après une modification en 2003 de leur loi nationale et une période de transition de seulement 57 jours, les éleveurs finlandais ont su s’adapter et mettent aujourd’hui leur savoir-faire en avant. Mais malgré leurs arguments, les interrogations persistent sur les véritables leviers de leur réussite. C’est pour répondre à ces interrogations que les groupes de travail ''viande porcine'' et ''santé et bien-être animal'' de la Copa-Cogeca se sont retrouvés en Finlande en juillet dernier. Au programme, présentation de la filière finlandaise et visite de deux élevages.
Limiter le stress des animaux
Les exploitations visitées peuvent être considérées comme des élevages modèles. Ils ont déjà été mis en avant par la Commission européenne pour leur réussite sur l’arrêt de la coupe des queues, mais également sur leurs performances techniques. Chacun a été choisi afin de mettre l’accent sur une des phases de l’élevage des porcs. La gestation, la maternité et le post-sevrage pour l’élevage Heikkilä et le post-sevrage et l’engraissement pour l’élevage Antikainen. Les arguments avancés par les éleveurs sont relativement semblables dans les deux élevages. Un des paramètres le plus important pour eux est la gestion des stress. Les porcs non stressés présentent moins de risque de déclenchement d’un épisode de caudophagie. Ceci se traduit par une conduite qui minimise les stress sociaux (réduction des adoptions, des mélanges d’animaux) et environnementaux (qualité et régularité de l’ambiance). Un autre point crucial est le mode de gestion de l’alimentation qui vise à réduire le stress alimentaire. L’aliment doit être de qualité, et en quantité suffisante pour que les porcs mangent à leur faim. La place à l’auge doit être suffisante pour qu'ils s’alimentent tous au même moment. Dans l’idéal, les changements d’aliment doivent se faire de manière progressive. En revanche, et contrairement à une idée bien ancrée chez de nombreux scientifiques, l’apport de matériaux de manipulation ne semble pas être la solution privilégiée par les éleveurs finlandais pour gérer efficacement les porcs à queues longues. Ces matériaux trouvent un intérêt d’abord pour intervenir lors du déclenchement d’un épisode de caudophagie.
Les matériaux manipulables ne sont pas privilégiés
Bien que les leviers évoqués auparavant soient à creuser, quelques particularités pourraient également prendre part à la réussite de l’élevage de porcs à queue longue. Si les matériaux manipulables organiques ont peu été cités en dehors de leur rajout lors d’épisodes de caudophagie, ils étaient présents dans les deux élevages visités, au sol (sciure, tourbe) ou en râtelier (paille, foin). Ensuite, les porcs disposent de surfaces plus importantes que chez nous en post-sevrage et en engraissement (0,4 m² jusque 30 kg, 0,6 m² de 30 à 60 kg, 0,9 m² de 60 à 110 kg, 1 m² de 110 à 130 kg et 1,2 m² au-delà de 130 kg). Enfin, le statut sanitaire finlandais est très bon. En effet, le pays est indemne de SDRP et de rhinite atrophique. Les cas de dysenterie, de pneumonie enzootique, les infections aux salmonelles et à la gale sont exceptionnels. Ce statut sanitaire particulier est considéré comme précieux dans le pays. De nombreux contrôles réalisés aussi bien dans les usines d’aliment que dans les élevages visent à le maintenir.
Les pratiques des éleveurs finlandais interpellent l’ensemble des producteurs européens à la recherche de solution pour élever des porcs sans couper les queues. Certaines pratiques mises en œuvre par les éleveurs finlandais sont probablement transposables dans les élevages français. Pour d’autres, cela sera plus compliqué, le statut sanitaire ou l’organisation des élevages et de la filière étant des spécificités nationales. Reste aussi la question du prix du porc et de la prise en charge financière des aménagements nécessaires. En Finlande, l’interdiction de la caudectomie a été accompagnée par un soutien fort aux producteurs.
En savoir plus
La Copa (Comité des organisations professionnelles agricoles) et la Cogeca (Confédération générale des coopératives agricoles de l’Union européenne) sont les représentant des syndicats et des coopératives à l’échelle européenne. Différents groupes de travail, composés de représentants des organisations partenaires de ces deux organismes, traitent de thématiques précises dont celle de la caudophagie et la caudectomie chez le porc.