" Le jeune doit être acteur de son projet "
Jérôme Pannier est chargé d’expertise agricole au Crédit Agricole Anjou-Maine. Il vient en appui aux agences de la banque pour les demandes de financement des situations dites « à enjeu fort », dont les installations.
Jérôme Pannier est chargé d’expertise agricole au Crédit Agricole Anjou-Maine. Il vient en appui aux agences de la banque pour les demandes de financement des situations dites « à enjeu fort », dont les installations.
La première condition – une des plus importantes – est la motivation. J’attends de sentir l’âme d’un chef d’entreprise chez un jeune homme ou une jeune femme qui souhaite s’installer. Je suis certes un partenaire financier important mais comme porteur de projet il/elle doit en être l’artisan. Dans un second temps, il faut un diplôme validé (Bac pro, BTS ACSE, BTS production animale, ou équivalent) ainsi que de l’expérience. Cette dernière peut s’acquérir en travaillant après ses études, mais aussi avant. Certains jeunes « tombés dans la marmite » et qui ont pris l’habitude d’aider leurs parents sont capables de s’installer rapidement.
Nous organisons un entretien sur le site de la future exploitation. On « capte » beaucoup de choses pendant cette rencontre. Il faut pouvoir cerner en 3 ou 4 heures la capacité d’une personne à être chef d’entreprise, c’est-à-dire sa capacité à la gestion, ses facultés d’adaptation, d’évolution, sa polyvalence, mais aussi son aptitude au management… Cette rencontre est déterminante, d’autant plus que nous sommes partenaires sur une carrière entière.
Nous examinons la gestion du compte bancaire du candidat à l’installation. A-t-il une conduite prudente ? A-t-il su se constituer une épargne ? S’est-il déjà lancé dans l’achat de sa résidence et dans la constitution d’un patrimoine ? La gestion personnelle en dit long sur les aptitudes à la direction d’une entreprise.
Nous faisons le tour du projet global de l’aspirant à l’installation. Son travail doit s’articuler avec ses ambitions personnelles et il faut dès le début chercher un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. A-t-il envisagé son organisation dans sa globalité ? A-t-il impliqué son ou sa partenaire de vie dans sa décision ? Pensé à ce qu’il ferait à l’arrivée d’un enfant ? Nous devons au moins susciter la réflexion. Dans le cas d’un Gaec parents-enfants, souvent, le jeune peine à trouver sa place dans les décisions. Or, c’est son installation, il doit en maîtriser les chiffres et être acteur de son projet. On interroge alors l’organisation du quotidien : par exemple, psychologiquement, c’est très différent si les discussions au sujet de l’exploitation se font dans la maison des parents ou dans une pièce neutre. La charge de travail doit quant à elle être soutenable sur la durée. Les jeunes ont tendance à la minimiser mais il est important d’être lucide. Il faut aussi savoir passer moins de temps à l’atelier et plus sur l’administration de la ferme. C’est cela, se comporter en chef d’entreprise. Enfin, il doit avoir envisagé l’avenir à long terme. S’il s’installe avec ses parents, que fera-t-il à leur départ en retraite ?
Nous passons bien sûr en revue l’état des bâtiments, du cheptel, les besoins de travaux et d’investissements, etc. Nous tenons également compte de la présence ou non d’une FAF et de la SAU. Nous savons que d’une manière générale, plus une exploitation a un lien fort au sol, plus elle est résistante. Nous travaillons sur le prix d’équilibre, qui doit être réaliste, et le budget de trésorerie, pour avoir de la lisibilité sur son évolution. Enfin, nous sommes attentifs à la présence des appuis techniques : relations avec le groupement, GTE, GTTT. C’est une relation de confiance qui doit s’établir sur la durée entre le futur exploitant et son partenaire bancaire.