Hausse des poids moyens des carcasses de porcs dans l’UE
Le poids de carcasse des porcs suit une tendance haussière ces dernières années, malgré une forte variabilité inter et intra pays. Plusieurs facteurs expliquent cet alourdissement.
Le poids de carcasse des porcs suit une tendance haussière ces dernières années, malgré une forte variabilité inter et intra pays. Plusieurs facteurs expliquent cet alourdissement.
En 2020, le poids moyen à l’abattage dans l’UE était de 93,6 kilos équivalent carcasse, soit près de 3 kilos de plus qu’en 2015 (90,8 kg). Cette moyenne cache toutefois une large disparité entre les différents États membres. Si, pour la plupart des pays, le poids de carcasse est compris entre 90 kilos et 100 kilos, d’autres États s’éloignent de ce standard : la Grèce, le Portugal et la Bulgarie présentent des porcs dont le poids moyen est inférieur à 70 kilos équivalent carcasse. À l’inverse, les porcs italiens atteignent 125 kilos de moyenne.
Cette tendance à la hausse des poids moyens à l’abattage se retrouve depuis vingt ans dans la plupart des pays de l’UE. Au cours des dix dernières années, le poids augmente annuellement de près de 400 grammes en moyenne. En France, entre 2002 et 2009, le poids de carcasse était resté stable, à peine au-dessus les 88 kilos. Depuis la croissance annuelle dépasse 500 grammes, pour atteindre 94,5 kilos en moyenne nationale.
Ajustement des gammes de poids à l’abattoir
La hausse des poids apporte une réponse à la baisse du nombre de têtes produites et permet un maintien du tonnage global. Progressivement, les abattoirs ont procédé à des ajustements de la gamme de poids dans les grilles de classement afin de maintenir les volumes dans un contexte de baisse de l’offre de porcs. De plus, l’alourdissement des carcasses améliore la rentabilité de l’industrie de la viande puisque sur une même période et pour les mêmes opérations, plus de kilos de viande sont traités. Par ailleurs, l’alourdissement des porcs est un levier d’augmentation de la rentabilité de l’atelier porcin tant que le coût du kilo supplémentaire d’engraissement (aliment, capacités de logement du bâtiment) est inférieur au gain du kilo produit. Les améliorations continues des performances grâce aux progrès de la génétique, de la conduite et grâce aux innovations techniques permettent de produire des porcs plus lourds pour une même durée d’engraissement tout en limitant la dégradation des indices. L’optimum de poids pour l’éleveur est guidé par le prix du porc et de l’aliment : plus le prix du porc est élevé et le prix de l’aliment faible, plus il lui est rentable d’alourdir les carcasses.
Toutefois, les carcasses ne peuvent s’alourdir indéfiniment et des freins entravent la tendance haussière des poids de carcasses. Les chaînes des abattoirs, notamment les plus petits ou plus anciens, peuvent être mal adaptées aux porcs lourds. La cadence est alors perturbée, des frais d’entretien et de réparation supplémentaires sont engagés. Des problèmes d’hygiène avec risque de saisie, dus au mauvais dimensionnement de la ligne ou des frigos de stockages, peuvent être engendrés. Ces questions de dimensionnement se retrouvent dans le transport des porcs vivants. Par ailleurs, les porcs lourds ne répondent pas à tous les marchés : certains cahiers des charges définissent des limites de poids des pièces, les pièces de porcs trop lourdes perdent l’opportunité d’exporter sur certaines destinations telles que le Royaume-Uni ou le Japon. De plus, les abattoirs doivent répondre aux problématiques des fabricants de jambon cuit (poids de la pièce et pH). Enfin pour la production de mâles entiers, le poids est une variable importante puisque avec l’âge de l’animal augmente le risque de viandes odorantes. Le développement du mâle entier en France pourrait donc être de nature à ralentir l’alourdissement des porcs.
De fortes hétérogénéités entre filières et entre pays
Bien qu’il soit obligatoire pour l’ensemble des pays de l’UE de déclarer le nombre et le poids des porcs abattus, les abattages à domicile subsistent dans certains pays et passent ainsi sous le radar des statistiques. Ces pratiques restent très courantes notamment en Roumanie et en Bulgarie. Par ailleurs, lorsque coexistent plusieurs filières porcines spécifiques au sein d’un même pays, le poids moyen à l’abattage ne reflète pas la diversité des systèmes. L’Italie est connue pour sa production de « porcs lourds », destinés à sa production traditionnelle de jambon. Cette filière représente environ 70 % de la production et leur poids de carcasse environne les 140 kilos. Les porcs restants correspondent à une production conventionnelle, pour un poids de carcasse d’environ 90 kilos. Cet équilibre change chaque année, en fonction de la situation du marché et des stocks de jambons en séchage, de sorte que le poids à l’abattage fluctue annuellement. En Grèce et au Portugal, une partie de l’activité des abattoirs est constituée d’abattage de porcelets ou de jeunes porcs légers qui impactent à la baisse les poids d’abattage. L’Espagne regroupe les deux situations précédentes : la filière du porc conventionnel cohabite avec la filière du porc ibérique, plus lourd, dont le poids d’abattage moyen est de 128 kilos. De plus, ce pays a également une tradition d’abattage de porcelets « lechones », autour de Pâques. Ils représentent toutefois de faibles volumes et en tendance, le fort alourdissement des carcasses se constate en Espagne.
Si les perspectives des poids de carcasses sont à la hausse, la poursuite de la segmentation du marché et des types de porcs conduit à la multiplication des grilles de paiement utilisées dans les abattoirs européens (mâles entiers ou castrés, divers indicateurs de qualité, etc.). Certaines entreprises d’abattage disposent aujourd’hui de plusieurs grilles, répondant aux différents marchés sur lesquels elles s’expriment.
La crise sanitaire a accéléré l’alourdissement des carcasses
Avec la crise de la Covid-19, la réduction voire la suppression des capacités des outils (personnel absent ou malade et fermetures administratives pour éviter le développement de clusters de Covid-19) a entraîné des baisses ponctuelles des abattages, et par conséquent des retards d’enlèvement des porcs. Les mesures sanitaires de distanciation en abattoir ont provoqué un ralentissement des cadences, aggravé encore par les cas de Covid-19. Les restrictions de circulation, en Allemagne notamment, ont empêché les employés de se rendre sur leur lieu de travail. Enfin, les perturbations logistiques en aval freinent les exportations.
Repères
Comment sont analysées les données d’abattage
Les abattoirs doivent déclarer leur activité (nombre d’animaux et poids) aux offices statistiques nationaux. Ces derniers appliquent des corrections selon les spécificités nationales ou individuelles des abattoirs pour respecter la définition de la carcasse fixée par la Commission européenne. Les offices statistiques nationaux transmettent ensuite mensuellement la somme normalisée des déclarations d’activité de tous les abattoirs à Eurostat. Ces données d’abattage par pays, comprenant le nombre de porcs abattus ainsi que le volume total produit en tonnes, permettent de calculer un poids moyen de carcasse par pays.