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« Une exploitation ovine autonome avec peu d’astreinte »

Olivier Le Jeune s’est installé en 2021, dans le Morbihan, avec deux objectifs principaux : être le plus autonome possible en alimentation pour ses moutons et engrais et travailler dans de bonnes conditions pour limiter l’astreinte.

Après dix années de salariat comme conseiller porcin, ingénieur nutritionniste et responsable d’une station d’expérimentation en nutrition animale, Olivier Le Jeune a choisi de s’installer sur les terres familiales, à Saint-Jean-Brévelay, dans le Morbihan, en élevage ovin et production de volailles démarrées. Il a auparavant réalisé dix mois de stage sur des exploitations ovines. « J’ai toujours travaillé dans l’agriculture, mais je manquais de pratique, explique-t-il. Avant de m’installer, j’ai choisi de me former sur trois fermes aux systèmes différents, en cumulant les périodes d’agnelage. Ces stages m’ont permis d’affiner mon projet et de bien raisonner la conception de la bergerie et l’organisation de la reproduction. » L’exploitation se répartit sur deux sites, avec d’un côté 15 hectares de prairies et 1 500 m2 de bâtiment et de l’autre 40 hectares et 1 850 m2 de poulaillers, à 2 kilomètres du premier site. Le cheptel, en cours de création, vise 375 brebis de race Romane et 25 brebis de race Noire du Velay. « La Romane est prolifique et laitière, souligne l’éleveur. La Noire du Velay – que j’ai notamment choisie parce que ma femme est auvergnate – est une race rustique et qui s’accélère correctement. Et comme elle est un peu moins prolifique que la Romane, cela me permet de faire des adoptions. »

Optimiser la place en bergerie

Une attention particulière a été portée à la conception de la bergerie. « Je voulais travailler dans de bonnes conditions et limiter l’astreinte, car je veux préserver un équilibre entre vie professionnelle et vie privée » précise Olivier Le Jeune. La bergerie, de 950 m2, compte 270 places de cornadis réparties de chaque côté d’un couloir d’alimentation. En plus du large couloir central, qui autorise le paillage et la distribution des fourrages avec une dérouleuse pailleuse, un couloir à l’arrière des cases permet d’observer les animaux sans devoir passer au milieu du troupeau. S’y ajoutent neuf caméras, qui facilitent la surveillance des agnelages, et un bureau surélevé d’où l’éleveur a une vision sur l’ensemble du bâtiment. Olivier Le Jeune a aussi investi dès le départ dans une chaîne d’alimentation pour l’engraissement des agneaux. « Je ne voulais pas porter de seaux, insiste-t-il. Une chaîne d’alimentation n’est pas si coûteuse pour le temps qu’elle fait gagner. J’en ai posé une partie, ainsi que tous les câbles électriques. » Hors périodes d’agnelage, 30 minutes par jour suffisent ainsi pour dérouler le fourrage, pailler et distribuer le grain aux brebis avec une brouette. La reproduction a été organisée pour optimiser la place en bergerie, avec quatre périodes de mise bas, en septembre, décembre, mars et juin, et quatre mises bas en trois ans. L’éleveur a choisi pour l’instant d’acheter son renouvellement. Le croisement terminal se fait avec des béliers charolais et suffolk. L’éleveur utilise aussi des béliers Noire du Velay vasectomisés, permettant des luttes courtes de 28 jours. Un contrôle est fait par échographie avec dénombrement 40 jours après le retrait des béliers. Les vides passent dans le lot suivant. Le schéma de fonctionnement du troupeau prévoit une prolificité de 215 %, une productivité numérique de 200 % et 20 % de renouvellement. Les premiers résultats sur les agnelles en 2022 sont plutôt encourageants, avec une productivité numérique de 1,5 agneau par agnelle et des agneaux vendus à moins de 100 jours. La commercialisation se fait dans le cadre de Ter’elevage. « Je voulais être sûr que les agneaux soient enlevés à temps, explique l’éleveur. Cela permet aussi d’avoir des prix contractualisés et de valoriser la qualité des agneaux par la segmentation du marché, avec le label Rouge Brocéliande et les démarches Bleu-Blanc-Cœur et Celtes. »

Céréales et méteil grain

Un autre point important pour Olivier Le Jeune est d’être le plus autonome possible au niveau de l’alimentation et des engrais. L’exploitation dispose de 30 hectares de prairies temporaires à base de ray-grass anglais, ray-grass hybride, trèfle, lotier, chicorée… destinés au pâturage. « Je sors les brebis dès que possible, rapidement après le sevrage, précise l’éleveur. Elles sont avec les béliers et font toute leur gestation dehors. Les prairies produisent en moyenne 5 tonnes de matière sèche par hectare. En 2022, alors que je n’avais encore que 15 hectares, j’ai réussi à nourrir 200 brebis et à faire des stocks avec ces 15 hectares. » Un objectif est d’optimiser le pâturage, avec des paddocks d’un à trois jours, 0,25 à 0,5 hectare pour 125 brebis selon la pousse de l’herbe et de l’eau sur toutes les parcelles. L’éleveur exploite aussi 5 hectares de prairies de luzerne et dactyle, récoltées en enrubannage et utilisées pour les lactations qui se passent en bergerie. Et il cultive 9 hectares d’orge, 3 de maïs grain, 4 de triticale et 5 de méteil récolté en grain (40 kg/ha avoine, 80 kg/ha triticale, 40 kg/ha pois protéagineux, 40 kg/ha pois fourrager). Les rotations sont conçues pour optimiser le fumier. « L’objectif est que la complémentation des brebis se fasse avec les céréales et le méteil grain, qui contient en moyenne 13-14 % de protéines, et l’engraissement des agneaux avec une ration constituée pour moitié d’orge et de maïs grain, le reste de complémentaire acheté », précise Olivier Le Jeune.

Des investissements réfléchis pour le bâtiment

Le coût du bâtiment de 1 500 m2, comprenant 950 m2 de bergerie et 550 m2 pour le stockage des fourrages et céréales et la fabrication d’aliment, s’est élevé à 331 000 euros (56 000 euros de terrassement, 45 000 euros pour la maçonnerie, 192 000 euros pour la charpente et aménagements intérieurs 38 000 euros d’aménagements intérieurs), sur lesquels l’éleveur a bénéficié de 54 000 euros d’aides PCAEA (plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles) et 4 500 euros d’aides BEA (bien-être animal). Olivier Le Jeune a aussi investi 158 000 euros dans 1 000 m2 de panneaux photovoltaïques installés sur le toit du bâtiment, financés sur quinze ans, qui devraient permettre une rémunération de 22 543 euros par an.

Alain Gouedard, chambre d’agriculture d’Ille-et-Vilaine

« Un projet bien réfléchi »

« L’installation d’Olivier Le Jeune a été bien réfléchie et bien préparée. Olivier a pris le temps de se former sur plusieurs fermes. Il a été très vigilant sur l’organisation et les lots de reproduction, selon les places disponibles, ainsi que sur la conception du bâtiment et l’ergonomie pour travailler dans de bonnes conditions. L’autonomie alimentaire qu’il recherche ne devrait pas poser de problème. Les terres ont un bon potentiel, les prairies représentent plus de 60 % de la superficie agricole utilisée et Olivier travaille aussi des enrubannages de luzerne et dactyle, espèces productives et qui résistent bien à la sécheresse. »

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