En Bourgogne
Un Gaec à trois en zone céréalière
Le Gaec Saunois complète ses cultures par 300 brebis Île de France conduites classiquement en bergerie.
Située à Etais, en Côte-d’Or, à 340 m d’altitude, l’exploitation du Gaec Saunois reflète le savoir-faire traditionnel de ces terres argilo calcaires peu profondes. Le Gaec créé en 1992 compte trois frères associés : Philippe installé en 1985 avec 80 ha, Patrick en 1992 et Emmanuel en 2000. La surface agricole utile de 342 ha se compose de culture : blé, orges d’hiver et de printemps, colza, pois, tournesol, de prairies temporaires avec luzerne et ray gras et également 75 ares de vigne (Crémant de Bourgogne) sur une autre commune.
Avant les années 1900, le nord-est de la Côte-d’Or était constitué de prairies et de parcours utilisés par des troupeaux de brebis Mérinos précoce conduits par des bergers. Avec les améliorations techniques et le machinisme, les tracteurs ont poussé les éleveurs à diminuer, voire faire disparaître les troupes ovines. L’histoire et la demande des consommateurs ont modifié le paysage de cette région par le labour accru des terres, la demande moins importante de laine et l’amélioration des carcasses d’agneaux. C’est tout naturellement que la brebis Île de France s’est imposée, car c’est la race de prédilection avec ses agnelages à contre saison. « C’est l’atelier complémentaire à la culture des céréales », résume Philippe. La filière ovine régionale demande des carcasses d’agneaux lourdes et la race île de France, avec ses qualités bouchères, son désaisonnement naturel et sa capacité à valoriser la paille de céréale, correspond tout à fait au système de production.
Un système de reproduction simple et une alimentation classique
La troupe de brebis oscille entre 300 et 315 têtes en fonction des pertes et des réformes. « Nous réformons presque systématiquement un millésime complet, détaille Emmanuel Saunois. Dans notre système de semi-bergerie, les femelles peuvent produire jusqu’à huit ans. Nous ne mettons les antenaises en lutte qu’à 18 mois ; ça leur permet un meilleur développement. » La lutte se déroule uniquement la nuit en bergerie en mai et juin. Les prés attenants au bâtiment simplifient les manipulations. Les brebis sont regroupées en un seul lot avec 11 béliers tous inscrits et qualifiés RM (recommandé mixte) minimum. Cette collective se traduit par un taux de fertilité de 95 % et il reste une petite repasse en janvier-février. Une échographie en décembre sur les retardataires permet de réformer les brebis vides. « La marge brute pourrait être meilleure, mais les agnelles ne sont pas mises à la reproduction à un an, décrit Emmanuel. Nous avons essayé également de produire quelques béliers pour la vente, mais on s’est vite aperçu que c’était un métier de spécialiste avec plutôt une demande de reproducteurs inscrits. »
Simplicité et efficacité dans une grande structure céréalière
Les brebis sont au pâturage six mois de l’année et utilisent du mois d’avril à octobre une pâture de 12 ha séparée en trois parcelles d’herbe et une quatrième d’avoine d’hiver venant compléter la rotation. D’octobre à mars, elles reçoivent du foin de pré, enrubannage de ray-grass, paille, orge, luzerne déshydratée et un correcteur azoté. Les agneaux reçoivent un aliment complet à volonté jusqu’à deux mois et demi ainsi que des foins de pré et luzerne. La luzerne est utilisée en foin et 6 hectares sont déshydratés par une Cuma dont 30 tonnes sont restituées à l’exploitation. « Nos rations ne sont pas forcément économiques mais nous produisons presque tout sur l’exploitation, se justifie Emmanuel, 47 ans. Et surtout, les agneaux sont vendus entre 90 et 100 jours avec un poids de 20 à 21 kg de carcasse. Ils consomment entre 60 et 65 kg de concentré. »
Un logement adéquat et des précautions sanitaires
La bergerie de 864 m² a été construite en 1998. Le vieux bâtiment en pierre de 300 m² n’était plus assez fonctionnel et trop exigu pour un troupeau important. Quatre longueurs de ratelier-auge en bois autoconstruits bordent deux allées d’alimentation. Les brebis sont réparties en huit lots de 30 animaux et les agnelles et les béliers sont logés dans l’ancien bâtiment. « En période d’agnelage, nous passons tous les trois chacun une heure pour alimenter et prodiguer les soins et une heure à deux en vitesse de croisière », explique Philippe, 55 ans. Le travail est manuel avec des chariots à paille et des brouettes à concentrés adaptés. « Nous n’avons pas investi dans du gros matériel peu amortissable sur un troupeau de cette taille et il y a six bras ! » plaisante Patrick, 50 ans. Le machinisme en propriété reste conventionnel et les engins qui servent peu souvent son la propriété d’une Cuma : la presse, le broyeur à cailloux et à végétaux et l’épandeur à fumier.
Pour les questions sanitaires, là encore, les interventions restent traditionnelles et modestes. Sur les brebis, nous effectuons deux traitements contre les strongles (juillet et octobre) et deux vaccins contre la pasteurellose et le rouget (arthrite des agneaux). Les agneaux quant à eux, ne reçoivent qu’une injection de sélénium à quelques jours de la naissance.
Pour Patrick Saunois, "le mouton est le bon complément des cultures des céréales". L’agnelage correspond à la période creuse des travaux des champs et les prairies sont indispensables dans l’assolement des terres à potentiel céréalier faible. De plus, c’est une production qui a toujours existé sur l’exploitation. "Dernièrement, nous avons acquis une cage de retournement et un couloir de contention mobile. Avec l’âge qui avance, nous aurions dû le prévoir avant car ça minimise les efforts. Notre système n’est pas ultra-performant mais il nous convient. »