Aller au contenu principal

FCO : qui sont les culicoïdes, ces insectes vecteurs de la fièvre catharrale ovine ?

Les culicoïdes sont les moucherons qui transmettent le mortel virus de la FCO en se nourrissant du sang des animaux. Plongée dans l’univers de cet insecte vectoriel avec Claire Garros, entomologiste au Cirad.

Culicides Nubeculosus
Seules les culicoïdes femelles se nourrissent de sang.
© J.-B. Ferré/EID-Med

« Les culicoïdes ne sont pas des mouches ni des moustiques, ce sont des moucherons. Des moucherons de toutes petites tailles puisqu’ils mesurent de 1 à 3 mm maximum. Vous aurez du mal à les voir en vol, éventuellement sur les parties glabres des animaux. Ces moucherons n’ont pas d’appareil piqueur long. Ils ont des pièces buccales qui dilacèrent la peau et qui vont créer un lac de sang dans lequel ils vont se nourrir. On peut d’ailleurs voir de petits confettis roses sur le mufle, sur la tête de l'animal ou sur les parties sans poils. Il existe une très grande diversité d'espèces en France que les spécialistes différencient grâce à leurs ailes. Ce ne sont pas des espèces invasives mais bien des espèces autochtones » explique Claire Garros, entomoligiste au Cirad.

Seules les culicoïdes femelles qui transmettent la FCO

Seule les culicoïdes femelles transmettent le virus de la FCO. Car si les mâles et les femelles se nourrissent de jus sucrés, seule la femelle a besoin d’un repas de sang pour faire maturer ses œufs. A chaque fois qu'elle va vouloir pondre, elle va chercher ce sang. En piquant, les femelles vont ingérer un bol de sang dans lequel il peut avoir le virus. Parfois, le virus ne passe pas la barrière intestinale et la moucheronne ne deviendra pas infectante. Sinon, une fois que les glandes salivaires sont atteintes par le virus, la culicoïde reste infectante toute sa vie. 

A noter que les culicoïdes peuvent aussi piquer les humains. En Europe, l'espèce Culicoides impunctatus peut provoquer des nuisances extrêmement fortes, limitant les activités de plein air. En France, l'espèce Culicoides obsoletus peut à la fois transmettre la FCO et piquer les humains, notamment en forêt. En revanche, le virus de la FCO ne se transmet pas à l'espèce humaine.

Lire aussi : « La FCO a touché notre troupeau il y a une semaine et demie et nous en sommes à trois bêtes mortes »  : les éleveurs ovins partagent leur désarroi

Le culicoïde est un moucheron qui vole la nuit

« Les culicoïdes sont actives depuis le coucher du soleil jusqu’à son lever. S’ils peuvent voler jusqu’à deux ou trois kilomètres avec leurs ailes, ils peuvent se déplacer sur des centaines de kilomètres avec le vent. On peut croiser des culicoïdes adultes toutes l’année mais ils se font très rares en hiver. Selon les régions et les climats, il y a deux pics d’abondance, au printemps et à l’été, plus ou moins marqués . On trouve aussi des culicoïdes en montagne puisqu’on en a observé jusqu’à 2 000 m d’altitude et l’insecte semble actif jusqu’à 12°C », souligne l'experte du Cirad.  

Les culicoïdes peuvent se déplacer sur des centaines de kilomètres avec le vent

Lire aussi : Contre la FCO 3, 4 et 8 : cinq recommandations sanitaires pour les éleveurs ovins

Les larves de culicoïdes aiment l'humidité et la matière organique

Dans son cycle de vie, le culicoïdes passe du stade œufs puis larves jusqu’au stade de nymphes dans des zones humides riches en matières organiques d'origine animale ou végétale. Ensuite, la vie d’adulte avec des ailes dure 15 à 20 jours et se passe partout dans le milieu extérieur. 

Les larves vivent, selon les espèces, dans les prairies, les déjections ou dans les bords de mares. Ce sont des zones très larges que l’on retrouve partout dans nos régions d’élevages. C’est donc assez compliqué de lutter à ce niveaux-là, surtout que l’on a très peu d’études qui se sont intéressées à la question. La pulvérisation d’insecticides dans l’environnement ou à proximité des élevages ne réduisent pas les abondances de culicoïdes. La désinsectisation des véhicules de transport pourrait avoir un effet protecteur mais cela n’a jamais été prouvé.

Sans traitement continu et régulier, les traitements insecticides ne sont pas efficaces comme moyen de lutte collectif

La désinsectisation individuelle est possible même s’il n’y a aucune autorisation de mise sur le marché spécifique pour les culicoïdes. Les culicoïdes sont sensibles aux insecticides de la famille des organochlorés et surtout de celle des pyréthinoïdes. Mais leur efficacité reste limitée dans le temps. Par exemple, nous avons testé le Butox, un pyréthinoïde, sur les ovins. Moins de la moitié des culicoïdes, en contact avec l’animal traité, meurent quatre jours après l’application du traitement et, au bout de dix jours, cet effet protecteur avait disparu. Des études australiennes et américaines n’ont pas montré de différence de transmission du virus de la FCO avec ou sans traitement insecticide. Aucune résistance aux insecticides n’a été observée. L’efficacité des huiles essentielles n’a été que très peu étudiée.

Lire aussi : Fièvre catarrhale ovine : « Se lever le matin pour ramasser des cadavres et donner des antidouleurs aux brebis à terre ça brise le cœur »

Si les moutons rentrent, les culicoïdes les suivent !

Quant à rentrer les animaux en bâtiment, les culicoïdes aussi peuvent rentrer et s’y balader, explique Claire Garros, entomoligiste au Cirad.… « Ces moucheronnes utilisent les mêmes attractants que chez les moustiques pour repérer les animaux, les émanations de CO2, les odeurs corporelles ou la chaleur par exemple. 

A moins d'avoir un bâtiment fermé tout le temps avec des moustiquaires, c'est dur d'empêcher les culicoïdes d'y rentrer

A moins d’avoir un bâtiment fermé tout le temps avec des moustiquaires, c’est dur d’empêcher les culicoïdes d’y rentrer. On peut plus facilement isoler les animaux malades ou virémiques sous des tentes moustiquaire pour limiter la circulation du virus et réduire la contamination du troupeau. »

Remerciements à Thomas Balenghien du Cirad

Les plus lus

Laura Chalendard, éleveuse ovin dans la Loire
« On n’a plus d’autre choix que d’abandonner, de renoncer à son rêve » - Des inégalités de genre encore omniprésentes dans le monde agricole
« Vous vous en sentez capable ? » : une question que les femmes en cours d’installation connaissent par cœur…
Vincent Bienfait
« Je gagne 2,6 Smic avec le système ovin pâturant que j’ai développé »
Éleveur multiplicateur de brebis Romane dans le Morbihan, Vincent Bienfait a mis en place un système très pâturant, encore peu…
Maxime Taupin
« On a beaucoup diversifié, j’ai besoin de revenir au métier d’éleveur ovin »
Maxime Taupin est en Gaec avec ses parents sur une exploitation multi-ateliers, entre troupe ovine, grandes cultures, vente…
Lauriane, étudiante en école d’ingénieurs à AgroParisTech
« Les violences sexuelles salissent le monde agricole »
À la campagne, l’anonymat n’existe pas. En raison de la promiscuité dans les zones rurales peu denses où « tout le monde se…
Le pâturage hivernal des brebis sur les prairies bovines fait partie des études en cours au sein du Ciirpo.
Le Ciirpo se projette dans l’avenir de la production ovine
En 2024, une trentaine d’études est en cours au Ciirpo. Et les projets ne manquent pas, entre l’adaptation au changement…
Pierre Stoffel avec son chien
« J’ai à cœur de maintenir la commercialisation en circuit court de mon élevage ovin ! »
Confiant, Pierre Stoffel, à peine 20 ans, vient tout juste de reprendre l’exploitation familiale en individuel, que son père a…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre