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Mil’ouv, un outil pour aider les éleveurs à mieux valoriser les parcours

La lutte contre la fermeture des milieux est renforcée par la méthode Mil’ouv qui permet aux éleveurs de mieux gérer la végétation des parcours et préserver le paysage et la biodiversité du territoire.

Avec la désertification des campagnes se pose un problème agro écologique majeur : la fermeture des milieux. En effet, c’est traditionnellement les animaux au pâturage qui entretiennent les milieux, empêchant l’enfrichement des paysages pastoraux ouverts (landes, pelouses sèches, garrigues) et la perte en valeur nutritionnelle des végétaux qui vont avoir tendance à se lignifier s’ils se développent sans contraintes. Le développement de Mil’ouv, financé à 50 % par le programme européen Life, a pour objectif de permettre aux bergers et éleveurs de valoriser au mieux la végétation présente sur leurs parcours en visant la réouverture ou l’entretien de leurs parcelles. Le projet Mil’ouv est piloté par le Conservatoire d’espaces naturels de Languedoc-Roussillon, entouré de l’Institut de l’Élevage, du parc national des Cévennes et de l’Institut d’éducation à l’agroenvironnement de Florac. La méthode Mil’ouv a été mise en place sur 40 exploitations agricoles volontaires dans le périmètre des Causses et Cévennes, zone inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. Bien que majoritaire dans le nombre d’actions conduites sur son territoire, l’ancienne région Languedoc-Roussillon partage cette expérience avec d’autres territoires limitrophes tels que l’Aude, l’Ardèche, les Pyrénées-Orientales et PACA. Il permet aux éleveurs de définir les caractéristiques pastorales et environnementales, d’étudier la dynamique d’embroussaillement et les éventuels dysfonctionnements de leur gestion des parcours. Ils bénéficient d’une approche globale de leurs exploitations, profitant des différents domaines d’expertise des animateurs du projet. « Cette démarche permet une combinaison intéressante entre partenaires agricoles et environnementaux », explique Fabienne Launay, en charge du projet Mil’ouv pour l’Institut de l’Élevage. Mil’ouv se compose de quatre étapes qui vont amener l’éleveur à repenser ses pratiques pastorales en accord avec son environnement.

Valoriser le parcours pour répondre aux objectifs de l’éleveur

Il s’agit en premier lieu de prendre connaissance de l’exploitation et d’avoir une compréhension globale des pratiques de l’éleveur, des enjeux de son élevage et de ses objectifs de production, de son niveau d’autonomie alimentaire, etc. Le technicien Mil’ouv en charge du suivi de l’exploitation va également questionner l’éleveur sur les attentes que celui-ci aura vis-à-vis du résultat de la démarche à l’instar de Bastien Giacobbi. Cet éleveur aveyronnais de 380 brebis allaitantes dans la vallée du Cernon explique : « je voulais récupérer les zones embroussaillées pour la pâture de mes brebis et une fois cela fait, sécuriser mon autonomie alimentaire en gérant au mieux les ressources de mes parcours ». Une fois cette première approche effectuée, il va falloir dresser le diagnostic éco-pastoral. Il s’agit de faire ressortir les stratégies pastorales et d’alimentation grâce aux données récoltées lors de la phase d’observation.

Gérer ses parcelles en fonction de leurs potentiels

L’éleveur va alors disposer d’un profil pastoral qui permet de visualiser, décade par décade, la contribution des différentes ressources végétales des parcours dans l’alimentation des animaux. L’éleveur peut ainsi hiérarchiser ces parcours selon leurs richesses, « on ne va pas laisser les animaux la même durée sur une même parcelle selon l’époque de l’année. Ça peut être trois jours au printemps contre une semaine à l’automne par exemple », détaille Nicolas Fabre, éleveur de 530 brebis laitières sur le causse du Larzac. Les parcelles (ou unités de gestion) vont ensuite être analysées une à une afin de caractériser la qualité du pâturage et l’impact de celui-ci sur l’état des milieux ouverts. Viennent ensuite la saisie et le traitement des données qui vont produire des rendus visuels facilement exploitables par l’éleveur et le technicien Mil’ouv chargé du suivi de l’élevage. Celui-ci va accompagner l’éleveur dans la mise en place de la nouvelle gestion de ces parcours et les évolutions de la qualité et de l’ouverture des milieux vont elles aussi être suivies de près par des techniciens et des botanistes. Guillaume Constant, berger au groupement pastoral du Serre de Mijavols en Lozère, témoigne : « c’est bien d’avoir un avis extérieur sur la gestion des parcours, car le berger ou l’éleveur est souvent seul face à ses questions et trouve par lui-même des réponses qui ne sont pas toujours les bonnes ».

"Le manque d’eau, nous savons le gérer. Le loup, nous n’y arrivons pas."

Cette méthode prend toute sa place sur ce territoire que d’aucuns considéreraient comme inhospitalier. La ressource en végétation est intéressante mais le défi majeur est la faible pluviométrie. « Nous nous sommes habitués aux contraintes climatiques mais, cette année, la sécheresse a été très compliquée à gérer. Nous avons pu maintenir les brebis dehors grâce aux surfaces importantes de parcours dont nous disposons », explique Nicolas Fabre. Il s’agit alors de valoriser au mieux les ressources végétales disponibles, en « apprenant aux agnelles, dès leur mise à l’herbe, à pâturer efficacement. On ne leur apporte alors quasiment pas de concentrés », développe l’éleveur caussenard. Le pastoralisme s’est toujours adapté aux conditions particulières des milieux dans lesquels évoluent les troupeaux : une pluviométrie faible, des variations de températures importantes, tout cela demande à l’éleveur de constamment trouver des solutions, comme « faire pâturer les brebis la nuit quand il fait trop chaud la journée », raconte Nicolas Fabre. Il est, depuis plusieurs années maintenant, un obstacle qui lui paraît insurmontable et met en péril le pastoralisme dans les Causses et Cévennes. « Tout devient compliqué avec le loup… c’est une hantise permanente, le troupeau s’est déjà fait attaquer deux fois en deux ans. C’est vraiment préjudiciable pour nous et l’indemnité reçue ne compense qu’une infime partie de la perte occasionnée », confie l’éleveur lorsqu’on lui demande quelle la difficulté actuelle dans son métier. La situation est paradoxale : d’un côté l’Union européenne soutient le pastoralisme pour protéger les habitats naturels et d’autre part surprotège le loup qui remet en cause le pastoralisme dans son ensemble.

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