Joël Passieux à Yenne en Savoie
"Je suis seul en montagne quatre mois par an"
Berger d’alpage, Joël apprécie de vivre avec les animaux au milieu de la nature.

Rien, ou presque, ne me prédestinait à travailler avec les brebis. Même si j’ai grandi proche de la montagne et que j’apprécie beaucoup ce milieu, j’ai d’abord été attiré par un métier artistique : j’ai fait des études de graphisme jusqu’au niveau bachelor. J’ai compris au travers de mes premières expériences professionnelles que je n’avais pas envie de travailler huit heures par jour face à un écran d’ordinateur. À cette époque, un de mes amis avait des chèvres pour entretenir son jardin, j’appréciai tellement le contact avec les animaux que je passais de plus en plus de temps chez lui. Il m’apprit alors qu’une formation de berger existait, je me suis dit « chouette, cette formation est pour moi ! ».
Sans aucune expérience dans le domaine, j’ai d’abord effectué des stages en élevage pour tester concrètement cette aspiration. Cela m’a conforté dans cette voie. Ensuite, je me suis dirigé vers la formation « berger-vacher d’alpage », une formation se déroulant sur trois départements (Drôme, Isère et Savoie) en association avec les services pastoraux locaux.
J’ai commencé par une première expérience en tant qu’aide-berger avant d’entamer des saisons en autonomie. J’ai donc pu appliquer mes connaissances en termes de conduite de troupeau, de contention, de parage, de soins (comment faire un plâtre ou administrer des piqûres). J’ai aussi appris à appréhender la qualité et la quantité de nourriture disponible, indispensable pour l’organisation des parcours de pâturage.
Ayant à cœur de trouver un job qui était à la fois un engagement et un plaisir, j’ai tout de suite trouvé mon équilibre dans ce métier qui me permettait d’allier ma passion de la randonnée, mon amour de la nature et des animaux, avec un cadre montagnard. C’est, à mes yeux, aujourd’hui un des derniers espaces sauvages encore préservés de l’activité humaine. De pouvoir travailler dans un tel cadre m’a fait me sentir vraiment privilégié.
Ce que j’apprécie aussi beaucoup dans ce métier c’est la sensation de liberté que j’ai ressentie malgré les contraintes fortes de la gestion du troupeau en alpage, c’est aussi la relation avec les éleveurs, basée sur la confiance puisqu’ils nous laissent l’entière responsabilité de leurs animaux pendant les quatre mois de l’estive.
Je me suis rendu compte à quel point le métier de berger était riche et diversifié. Entre la connaissance de la flore, la gestion des pâturages, le déplacement du troupeau, les soins vétérinaires, le métier est vraiment complet en termes de compétences et de connaissances, basées sur l’observation qui s’affine au fil des saisons. C’est aussi un métier engageant au niveau personnel. Vivre à l’écart de la société pendant plusieurs mois m’a paru parfois pesant même si au départ l’idée m’enthousiasmait.
Si dans le futur j’ai l’idée de m’installer en tant qu’éleveur, je ne suis pas encore certain de la filière dans laquelle j’ai envie de m’investir. J’ai à cœur de continuer à découvrir toutes les facettes du métier : ayant déjà travaillé avec des brebis, des chèvres, des vaches, j’ai envie de voir comment ça se passe avec d’autres espèces. D’ailleurs, la prochaine saison, je vais travailler avec des ânes dans les Cévennes."