Ils ont ramené de bonnes idées de Nouvelle-Zélande
Des éleveurs du Limousin sont partis aux antipodes pour visiter des élevages ovins à la fois simples et productifs. Ils ont ramené des bonnes idées qu’ils commencent à appliquer dans leurs fermes. Récit de voyage.
Des éleveurs du Limousin sont partis aux antipodes pour visiter des élevages ovins à la fois simples et productifs. Ils ont ramené des bonnes idées qu’ils commencent à appliquer dans leurs fermes. Récit de voyage.
20 éleveurs de Haute-Vienne sont partis deux semaines en Nouvelle-Zélande pour tenter de percer les secrets de leur compétitivité de l’élevage ovin. Aux antipodes, ils n’ont pas vu des gens qui marchaient tête en bas mais au contraire des éleveurs pragmatiques avec les pieds bien sur terre et sur l’herbe. Car c’est bien l’herbe qui est la base de l’alimentation des troupeaux kiwis. « Tout le calendrier est calé sur la pousse de l’herbe » explique Pascal Babaudou, éleveur de 250 brebis en Haute-Vienne et président de Limouz’inNZ, l’association créée pour ce voyage organisé en partenariat avec la chambre d’agriculture de Haute-Vienne.
La seule période de mise bas est au printemps, en lien avec la disponibilité en herbe. L’objectif premier est bien de faire pâturer avec des chargements instantanés importants et des rotations très courtes au printemps. « Dès que la production d’herbe diminue, les animaux à forts besoins, les agneaux principalement, sortent et sont vendus maigres si nécessaire ». A contrario, en cas d’excédents d’herbe, ils achètent des animaux pour les finir.
Ils vérifient fréquemment la croissance des animaux en les passant régulièrement à la bascule. Si le lot ne suit pas la courbe de croissance prévisionnelle, l’ajustement se fait sur la surface et la qualité des prairies mises à disposition. « C’est une vraie alimentation 100 % à l’herbe, témoigne Pascal Babaudou. En deux semaines de voyages, nous n’avons pas vu un seul nourrisseur. Ça ne les empêche pas d’avoir des croissances rapides grâce aux prairies riches en trèfle, luzerne ou plantain. »
Les éleveurs se concentrent sur leur métier d’éleveurs et ils délèguent facilement l’échographie, l’installation des clôtures, la tonte, l’épandage, le travail du sol ou les semis. « En France, on fait plus facilement un peu de tout, des céréales, des clôtures, et au final on est moins concentré sur ce qui rapporte ». Autres atouts des Kiwis, les investissements sont limités. À commencer par l’absence de bâtiment pour les animaux. « Certains ont des bâtiments pour abriter le parc de tri ou la salle de tonte mais jamais de cathédrale ». Les animaux ont peu de besoins en hiver et ils restent dehors sans fourrages autres que l’herbe pâturée. Peu de sentimentalisme non plus au moment des reformes. Une brebis ou une agnelle vide au moment des réformes est immédiatement reformée.
Si les éleveurs ont ramené des bonnes idées de Nouvelle-Zélande, tout n’est pas forcément transposable en France. Le climat océanique plus doux, la taille des structures, le parcellaire regroupé, une main-d’œuvre moins coûteuse et l’absence de prédateurs sont des atouts que n’ont pas les éleveurs français. « Mais ce n’est pas forcément un pays de Cocagne, explique Frédérique Mariaud, éleveuse de Haute-Vienne. Les meilleures terres ont été prises pour faire du lait et la pluviométrie peut varier du simple au double selon les zones ».
Une gestion pragmatique de l’herbe et des troupeaux qui a inspiré les éleveurs
Avis d’expert
« Un projet impliquant qui a bouleversé les exploitants »
« Ce voyage en Nouvelle-Zélande a demandé beaucoup d’implication de la part des éleveurs. Ce n’était pas que des simples visites. Les éleveurs se sont préparés pendant un an et demi pour être le plus efficaces possible. Ils ont suivi des formations avec l’aide de Vivea : un peu d’anglais courant et agricole, prise de notes, stratégie d’exploitation, conditions géo-pédo-climatiques, freins au changement… Ils ont dû aussi trouver des partenaires financiers et organiser leur absence sur la ferme. En plus des 2 000 euros apportés par chacun, les participants ont passé plus de 20 jours sur le projet en plus des 20 jours de voyages. Sur place, les éleveurs n’ont pas chômé et deux rapporteurs étaient chargés d’écrire, le soir même, le compte rendu de chacune des 15 visites, dont 10 exploitations agricoles. Chacun a aussi pu passer une journée seul en immersion dans un élevage. Même s’ils sont partis en février 2014, la valorisation des résultats se poursuit encore. Chaque éleveur avait un projet d’exploitation associé à ce voyage et beaucoup sont allés loin dans la remise en cause de leur exploitation. Tous ont été marqués par le fait que, là-bas, être éleveur est un métier comme un autre. On y met beaucoup moins de sentimentalisme qu’ici. Les éleveurs ont des objectifs et des stratégies et ils s’y tiennent. »
Céline Boyard, Chambre d'agriculture de Haute-Vienne