Candidature à l'Unesco : des écueils à éviter
C'est lors de l'inauguration du Salon International de l'Agriculture en 2008, que Nicolas Sarkozy a évoqué l'idée d'être le premier pays à déposer une candidature pour demander l'inscription de son « patrimoine gastronomique » au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco. Le rapport préliminaire a été confié à la Commission culturelle du Sénat qui a désigné Catherine Dumas, Sénatrice de Paris pour le constituer.
Vingt sept personnes ont ainsi été entendues par Catherine Dumas, venant d'horizons différents voire contradictoires tels la restauration, la distribution, les arts de la table ou la philosophie dans les arts culinaires. Le fooding en même temps que Slow food et le guide Michelin. Le projet est intéressant en lui-même et la demande de la France est légitime par son antériorité en matière de savoir culinaire et son patrimoine de produits et de savoir faire. Reste que Jean Musitelli, conseiller d'Etat, n'a pas caché les difficultés engendrées par un tel projet : ne pas faire d'exaltation d'un nationalisme des fourneaux, éviter les démarches de caractère commercial ou mercantile. Autres écueils possibles, une représentation importante à l'Unesco de pays émergents touchés durement par la famine et les conséquences de la hausse des matières premières qui obligeront à faire preuve d'habileté diplomatique.
D'ores et déjà, parmi les 27 personnes auditionnées par la Sénatrice de paris, aucune, en dehors de Stéphane Blohorn, président de la maison Androuët (crémier, fromager réputé), n'a abordé la question d'une des composantes fondamentales, voire inhérentes de l'art culinaire, en l'occurrence les produits servant à édifier cet art culinaire.
L'Inao oubliée
On aurait pu trouver judicieux, par exemple, que l'Inao figure parmi les organes ou les personnalités interviewés. Comment faire l'impasse sur les AOC, AOP ou IGP qui ont toute justification de faire partie de ce patrimoine culinaire. C'est avec les produits de patrimoine, tout en étant résolument modernes, répondant aux critères de durabilité, d'environnement, en un mot aux attentes sociétales, que nos grands chefs peuvent offrir un tel ravissement. Espérons que le président de la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires, Jean-Robert Pitte, géographe et ancien président de l'Université Paris-Sorbonne réparera cet oubli alors qu'il a parmi les membres de la mission Sophie Villers, ancienne directrice de l'Inao.