Les « mardis de l’info » : la formation en visioconférence des éleveurs adhérents de Porc Armor Evolution
Depuis 2020, Porc Armor Évolution propose à ses adhérents et leurs salariés des formations à distance. Pour beaucoup d’entre eux, ce rendez-vous hebdomadaire fait désormais partie de leur agenda. Son instigateur, Daniel Bellec, nous explique les clés de son succès.
Comment et pourquoi avoir mis en place ce programme de webinaires ?
Daniel Bellec - À la fin des années 2010, les règles de biosécurité mises en place face au risque de FPA [fièvre porcine africaine] ne permettaient plus d’organiser des visites de groupes en élevage.
J’avais donc construit un programme de formation en salle : « les fondamentaux de l’élevage ». Mais en 2020, dans le contexte Covid, j’ai dû imaginer un nouveau format à distance. Pour qu’il soit adapté aux contraintes des éleveurs et de leurs salariés, il fallait un créneau court, régulier et qui ne perturbe pas le déroulement de la journée. Le créneau de 13 h 30-14 h 00 et le rythme hebdomadaire se sont imposés. Désormais, tous les adhérents de Porc Armor Évolution et leurs salariés ont le réflexe « aujourd’hui c’est mardi, il y a les mardis de l’info ». Et cela fait trois ans que ça dure.
Quelles difficultés as-tu rencontrées ?
D. B. - En 2020, nous étions au début de l’utilisation des outils de visioconférence. Il a fallu accompagner les éleveurs pour qu’ils se les approprient. Ensuite, j’ai dû convaincre les techniciens du groupement de l’intérêt de cette démarche. Parfois réticents au départ, ils ont pu constater que ces webinaires leur permettaient de déployer toute leur expertise auprès d’un plus grand nombre d’éleveurs que le cercle d’adhérents qu’ils côtoient habituellement. Et bien sûr, il faut construire un programme de formation riche pour être en mesure de fournir un sujet hebdomadaire. Mais ce n’est pas un problème, car les thématiques sont infinies. Tous les jours nous avons de nouvelles idées.
Quels sont les principaux atouts de ce format ?
D. B. - Tout d’abord, il a amené les techniciens à développer de nouvelles compétences et manières de travailler. La coconstruction des programmes et des supports ainsi que la réalisation à deux voix de certaines interventions ont permis de renforcer les collaborations internes. Accessible aussi en interne, il permet également à de nombreux collaborateurs, notamment le personnel administratif, d’acquérir rapidement des connaissances techniques. Il constitue donc aussi un outil de formation pour les salariés du groupement. Surtout, le succès rencontré par ce rendez-vous nous prouve que nous répondons à un vrai besoin. Le nombre de personnes connectées peut varier d’une semaine à l’autre, selon le sujet ou la météo. Mais l’enregistrement des webinaires a permis la constitution d’une vidéothèque très riche qui constitue un véritable outil de transmission du savoir. Certaines vidéos ont ainsi été déjà consultées en replay par plusieurs dizaines d’adhérents.
Qui sont les intervenants ?
D. B. - Nous mettons d’abord en avant notre expertise interne, mais nous la complétons par des intervenants extérieurs pour environ un tiers des séances. La diversité des profils complète et enrichit le programme sur des thématiques diverses : les marchés, la stratégie marketing des partenaires, la gestion des ressources humaines… L’intervention d’experts tels que les chargés d’études de la Chambre d’agriculture permet aussi de bénéficier des derniers résultats de la recherche appliquée. Ils élargissent le champ des sujets en abordant des thématiques que nous travaillons moins en interne ; par exemple, l’ergonomie de travail via une intervention sur les exosquelettes. Cela nous donne aussi l’occasion d’accéder aux résultats de travaux innovants relatifs ; par exemple, aux conditions de réussite de l’adaptation de nos pratiques à des enjeux sociétaux tels que la suppression de la contention des truies, de la caudectomie ou encore de la castration. En proposant des sujets divers, présentés par des acteurs variés, les mardis de l’info constituent un véritable carrefour des connaissances et des acteurs, conçus avant tout pour répondre aux besoins des éleveurs.
Propos recueillis par Marie Laurence Grannec, marie-laurence.grannec@bretagne.chambagri.fr
L’expertise R&D de la Chambre d’agriculture au service des éleveurs
Les travaux de recherche appliquée menés par l’équipe porc de la Chambre d’agriculture de Bretagne au sein de la station expérimentale de Crécom, au travers d’enquêtes terrain ou bien sous forme de veille bibliographique ont pour vocation de répondre aux attentes et demandes d’innovations de la filière. Leur diffusion doit permettre une large appropriation par les éleveurs et leurs partenaires. Cela repose sur la communication faite directement par la Chambre d’agriculture, au travers de l’organisation de journées techniques ou de la rédaction de documents. Mais cela s’appuie aussi sur le travail de transfert fait par les OP vers leurs techniciens et adhérents. C’est dans cet objectif que, depuis de nombreuses années, la Chambre d’agriculture a signé avec la majorité des OP bretonnes une convention de partenariat prévoyant la mise à disposition annuelle de journées d’expertise. Dans le cadre de la convention avec Porc Armor Évolution, une partie des journées est utilisée pour la construction du programme des « mardis de l’information ». En 2024, ce sont ainsi dix interventions qui sont prévues tout au long de l’année. Les thèmes abordés sont divers. Depuis un rappel de fondamentaux techniques (sur des bases nutritionnelles, par exemple) jusqu’aux résultats des derniers essais à Crécom sur la sociabilisation précoce des porcelets ou la suppression de la caudectomie.
Vulgariser les résultats
Les chargés d’études apprécient de pouvoir « vulgariser les résultats de recherche en mettant en avant les aspects pratiques ». C’est ce que souligne notamment Caroline Depoudent à la suite de ses interventions sur les exosquelettes ou sur l’attractivité des métiers. Ces interventions sont aussi l’occasion de rappeler des fondamentaux. Par exemple, et parce que l’alimentation représente la part la plus importante du coût de production, Daniel Bellec considère qu’« il est nécessaire que les éleveurs maîtrisent les bases de la nutrition ». Cette conviction l’a conduit à solliciter auprès de Constance Drique une série d’interventions sur les concepts de l’énergie, des protéines et acides aminés.
M. L. G.
« La formation, un levier pour impliquer et motiver »
Dominique Morvan, éleveur à Pont-de-Buis-lès-Quimerch (Finistère) participe aux mardis de l’info depuis leurs débuts. Il trouve le format court très efficace et apprécie le créneau horaire. Ses salariés y participent avec lui à 13 h 30 avant de repartir travailler. « Ces formations constituent aussi un moment d’échanges, une manière d’impliquer les salariés et d’être à leur écoute pour qu’ils fassent progresser l’entreprise », souligne-t-il. Il y trouve un tel intérêt qu’il a installé un écran pour pouvoir tirer le meilleur parti de ce moment. Jérôme, un des salariés, est également convaincu : « En tant que salarié, c’est très important d’avoir accès aux informations. Il est essentiel de continuer à se former dans un monde qui évolue. Et pouvoir échanger avec son patron et son collègue à partir des "mardis de l’info", c’est super ! Je me sens "considéré" et on a envie d’avancer ensemble. »
M. L. G.
Repères
Chaque année, l’équipe porc de la Chambre d’agriculture de Bretagne est impliquée dans plus de cinquante projets de recherche régionaux, nationaux ou européens. Ils traitent de sujets variés (bâtiments, conduite, travail…) et visent à accompagner les éleveurs dans leur adaptation aux transitions économiques, environnementales ou encore sociétales. En apportant des résultats innovants, ils éclairent les choix que les éleveurs sont amenés à faire sur leurs exploitations.