Les élevages de porcs qui réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre pourraient prétendre à un bonus financier
Un élevage porcin peut réduire ses émissions de gaz à effet de serre jusqu’à près de 20 %, et pourrait à terme prétendre à être rémunéré pour cela. C’est une bonne nouvelle pour la filière qui a des atouts à faire valoir sur le marché du carbone.
Un élevage porcin peut réduire ses émissions de gaz à effet de serre jusqu’à près de 20 %, et pourrait à terme prétendre à être rémunéré pour cela. C’est une bonne nouvelle pour la filière qui a des atouts à faire valoir sur le marché du carbone.
Grâce au label bas carbone, les réductions d’émissions de gaz à effet de serre pourraient à terme être rémunérées. L’Ifip a fait une première estimation des réductions atteignables pour un élevage porcin et de leur rémunération, en considérant l’échelle de cycle de vie du porc de la fabrication des matières premières alimentaires du champ jusqu’au porc produit au portail de la ferme. Grâce à la mise en place de bonnes pratiques, entre 200 et 1 800 tonnes de carbone sur cinq ans pourraient être économisées pour un élevage de 260 truies naisseur engraisseur, ce qui revient à une rémunération comprise entre 6 000 euros et 50 000 euros( 1). De quoi s’intéresser de plus près à la question. En élevage de porcs, les pratiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre sont au nombre de quatre.
1- Améliorer les performances techniques
Sur les dix dernières années, l’amélioration des performances techniques se confirme au travers du suivi de la gestion technico économique à l’Ifip. Sur cinq années, les tendances indiquent une progression de 0,73 porc produit par truie par an, une réduction de l’indice de consommation en engraissement de 0,07 et une augmentation du poids vif en sortie d’engraissement de 2,3 kilos. Ces améliorations permettent des réductions d’émissions de gaz à effet de serre car pour une même quantité de viande produite, les porcs ont consommé moins d’aliments. Il y a donc moins d’émissions des cultures au champ destinées à nourrir les animaux.
2- Utiliser des matières premières non associées à la déforestation
Les ressources alimentaires des porcs produites dans des régions du globe où il y a de la déforestation de forêt primaire ont un impact carbone plus important : c’est le cas par exemple du tourteau de soja brésilien, dont une partie est produite dans des zones déforestées. Remplacer ce tourteau par un tourteau garanti sans déforestation, ou par un tourteau de soja (tourteau expeller) produit en France, ou encore par d’autres sources en protéines européennes, permet de réduire de plus de moitié l’impact carbone de la matière première. L’incidence mesurée à l’échelle du porc dépend bien sûr du taux d’incorporation de la matière première dans les rations. Il est actuellement compris entre 3 et 13 % dans les aliments d’engraissement. Plus le taux d’incorporation en soja brésilien est élevé au départ, et plus l’élevage pourra réduire ses émissions de gaz à effet de serre avec la mise en œuvre de substitutions.
3- Baisser les protéines dans l’aliment et réduire des émissions d’ammoniac
Une alimentation à basse teneur en protéines permet de réduire les quantités de protéines ingérées par les porcs, et donc les excrétions azotées des animaux ainsi que les pertes gazeuses associées. Dans les élevages produisant du lisier, ces pertes se font principalement sous forme d’ammoniac. Ce gaz n’est pas un gaz à effet de serre. Mais au moment de l’épandage, il génère du protoxyde d’azote (N2O) qui, lui, est un puissant gaz à effet de serre avec un pouvoir de réchauffement global près de 300 fois supérieur à celui du CO2. Ainsi, lorsque les éleveurs agissent pour la qualité de l’air en mettant en place des pratiques de réductions des émissions d’ammoniac (évacuation fréquente des déjections, couverture des fosses, utilisation de pendillard), ils agissent aussi pour le climat.
4- Réduire les consommations énergétiques et produire des énergies renouvelables
Les consommations d’énergie en élevage participent au bilan carbone du porc car la production d’un kWh moyen en France émet des gaz à effet de serre. Ce n’est pas le poste le plus émetteur, mais les éleveurs disposent de nombreux leviers pour réduire leur consommation d’énergie. Ce serait donc dommage de ne pas les comptabiliser dans les leviers. Les éleveurs peuvent également, par l’intermédiaire de leurs effluents d’élevage participer à des unités de méthanisation qui produisent de l’énergie renouvelable. Le procédé valorise directement le méthane produit en injection ou convertit par cogénération des émissions de méthane en émissions de dioxyde de carbone : cette opération réduit de près de 25 fois le pouvoir de réchauffement global d’où le bénéfice sur les gaz à effet de serre.
Sur la base de ces premières estimations, la filière s’est mise en ordre de marche pour disposer elle aussi d’une méthode de calcul des émissions de gaz à effet de serre validé par le Ministère. Inaporc finance le projet et l’Ifip accompagné d’un comité de pilotage avec de nombreux partenaires se charge de rédiger la méthode. Cette dernière repart largement de l’outil GEEP qui permet aux éleveurs de suivre leur bilan environnemental. Un bilan carbone y est déjà possible mais ce dernier va être amélioré pour prendre en compte plus finement les leviers possibles.
Le label bas carbone a été créé par le ministère de la Transition écologique et solidaire pour accompagner l’atteinte des objectifs climatiques de la France. Le principe est simple : Le ministère valide des méthodes d’évaluation des émissions de gaz à effet de serre pour différents secteurs d’activité. En agriculture il existe à ce stade une seule méthode pour les élevages bovins : la méthode carbon’agri. Le secteur peut alors lancer à la suite des projets de réductions des émissions de gaz à effet de serre sur cinq ans. Un projet en porc pourrait être piloté par une structure relai qui accompagnerait un groupe d’éleveurs. Le projet démarre par un bilan carbone de chacun des élevages en début, qui sera la base pour calculer les réductions d’émissions imputables aux changements de pratique mis en place. Les réductions d’émission sont certifiées par un auditeur externe et peuvent être vendues de gré à gré à des acheteurs qui payent ainsi des tonnes de carbone évitées. Le dispositif est gagnant-gagnant car les éleveurs sont rémunérés pour leurs efforts et l’environnement est amélioré.