L’agriculture dans les médias ou la tentation du misérabilisme
Si l’agriculture intéresse de plus en plus les médias grand public, certains agriculteurs, rompus à l’exercice, témoignent de la persistance de clichés et d’a priori ou encore de l’envie de susciter de l’émotion de la part de certaines émissions.
Si l’agriculture intéresse de plus en plus les médias grand public, certains agriculteurs, rompus à l’exercice, témoignent de la persistance de clichés et d’a priori ou encore de l’envie de susciter de l’émotion de la part de certaines émissions.
« Je n’ai que de bonnes expériences, excepté avec certains journalistes du groupe M6 pour Capital ou zone interdite, que j’ai déjà eu au téléphone, ils voulaient que je leur confirme ce qu’ils avaient en tête sur le prix du lait. Moi je leur ai dit qu’un certain prix du lait pouvait me convenir parce que j’avais remboursé mes emprunts mais que cela pouvait ne pas convenir à d’autres. Je ne leur servais pas la soupe, ils n’ont pas pris mon témoignage », témoigne Antoine Thibault, producteur laitier dans l’Eure, alias Agriskippy (23 500 abonnés sur twitter, 28 600 sur sa chaîne Youtube).
Lire aussi : Les journalistes, « venez à la ferme ! De belles histoires, on en a plein à raconter »
Etienne Fourmont, éleveur laitier de la Sarthe et youtubeur, alias Agrikol (21 100 abonnés sur twitter, 80 400 sur sa chaîne Youtube), se rappelle lui de son expérience à l’occasion du débat organisé par Cyril Hanouna et Marlène Schiappa autour des gilets jaunes en janvier 2019. « Tout était organisé, pendant une semaine j’ai eu l’équipe tous les jours au téléphone. Je leur ai expliqué que pour moi ça se passait bien, qu’il y avait des gens plus malheureux que moi. L’émission devait se tenir le vendredi soir, en début d’après-midi alors que j’avais mon billet de train en poche, ils m’ont appelé pour me dire « désolés on a vu avec le grand patron, votre profil ne correspond pas ». J’ai compris que je n’étais pas assez malheureux et véhément. Ils ont préféré faire venir un jeune agriculteur en difficultés financières, très revendicatif », témoigne-t-il.
Lire aussi : « Il faudrait que chaque agriculteur aille voir ses proches, ses voisins et explique son métier »
En ce début 2021, pendant la semaine où devait se tenir le salon de l’agriculture, « j’ai eu aussi 2 émissions au téléphone, avec beaucoup de questions du type « c’est difficile ? vous vous en sortez ? vous êtes malheureux ? » mes réponses ne leur convenaient pas trop », raconte-t-il. « Certaines émissions recherchent clairement ça, ils veulent faire pitié et susciter de l’émotion », estime-t-il.
Christophe Chaize, éleveur de charolais dans la Loire, confie pour sa part être parfois confronté aux a priori des journalistes sur le métier d’agriculteur. « Un journaliste la semaine dernière pour un tournage télé était dérangé par le fait que je n’avais pas de combinaison ! Je ne rentrais pas dans le cliché, limite il aurait fallu que j’enfile une vielle combinaison », se remémore-t-il.
Lire aussi : Dix conseil aux agriculteurs pour répondre aux journalistes