Faire appel à un Service de remplacement en viticulture
S’ils ne font pas de miracle face aux difficultés de recrutement que rencontre la filière, les Services de remplacement proposent des pistes d’aide en cas d’absence. Voici comment fonctionne cet outil méconnu.
S’ils ne font pas de miracle face aux difficultés de recrutement que rencontre la filière, les Services de remplacement proposent des pistes d’aide en cas d’absence. Voici comment fonctionne cet outil méconnu.
Nés il y a cinquante ans, les Services de remplacement emploient des agents, en CDI ou CDD, sélectionnés pour assurer des missions de remplacement dans les exploitations agricoles. Ce sont des associations constituées au niveau local et gérées par des agriculteurs. L’exploitant est remplacé par un salarié mais il est déchargé des tâches administratives liées à cet emploi. De son côté, il assure l’accueil, la transmission des consignes ; il est responsable des conditions d’exécution du travail.
Pour pouvoir être remplacé, il faut adhérer à l’association en tant que chef d’exploitation. L’adhésion permet aussi le remplacement pour les autres membres non-salariés de la famille travaillant sur l’exploitation (conjoint collaborateur, aide familiale). Selon Service de remplacement France, le réseau national des Services de remplacement, 70 000 exploitants sont adhérents.
Les motifs de remplacement se sont élargis
Sur le papier, les possibilités sont nombreuses. Le service peut être actionné pour congés maladie, accident, arrêts de travail. Le répit pour épuisement professionnel s’est ajouté en 2017. Recourir à un Service de remplacement pour les congés maternité et paternité, permet de bénéficier de l’indemnisation MSA. C’est aussi une voie à suivre en cas de formation, de responsabilité professionnelle ou syndicale, de participation au développement agricole du territoire ou tout simplement pour des vacances.
Le complément de main-d’œuvre pour les travaux saisonniers est un autre motif. Perrine Raverdy, responsable technique du Service de remplacement de la Marne, indique qu’il progresse. Pour le Service de remplacement du Gard, ce motif a représenté 2 % des heures en 2021, soit autant que les mandats syndicaux.
Les frais de remplacement sont variables
Un Service de remplacement est un groupement d’employeurs. Il rémunère l’agent et se charge de l’ensemble des formalités administratives. Il facture les frais de remplacement au demandeur. Le coût dépend de la qualification du poste remplacé, du type de remplacement et aussi des frais de gestion, variables en fonction des charges de structure de chaque service. Selon le motif de remplacement, le demandeur peut ou non prétendre à des aides qui vont venir en déduction des frais facturés. En conséquence, le coût final est très variable. Mobiliser des aides est l’un des rôles assurés par un Service de remplacement. Dans le cas d’un congé maternité, la MSA prend les frais en charge à 100 %. « Pour le congé paternité, le jeune papa doit juste acquitter les CSG et CRDS », avance Perrine Raverdy. Le Service de remplacement du Gard annonce pour ce motif un coût horaire de 1,57 euro. Pour un mandat syndical, cette même structure propose un tarif de 8,75 euros par heure tandis qu’il est de 16,50 euros pour un surcroît d’activité.
En cas de maladie, les conditions varient entre les cas de prise en charge à 100 % par la MSA, la souscription à l’assurance service de remplacement Groupama ou encore lorsqu’un tarif avec un crédit d’impôt pour quatorze jours maximum s’applique. Le remplacement pour investissement dans le développement agricole ou la formation sont aidés dans le cadre du Casdar, précise Marjorie Pinero, directrice du Service de remplacement du Gard.
Le défi du recrutement et de la fidélisation
Selon Service de remplacement France, 15 000 agents de remplacement sont employés chaque année, dont plus de 2 500 en CDI. Le tiers des agents se prépare à l’installation et 40 % ont entre 20 et 30 ans.
« Le poste d’agent de remplacement est un réel métier », estime Perrine Raverdy. Certains agents en CDI tournent sur plusieurs exploitations tout au long de l’année. La proportion de CDI et de CDD varie selon les agences. Le recrutement est un perpétuel défi, comme pour toute la filière. « Tous les moyens sont utilisés », concède Franck Laur, directeur de Service de remplacement France. Les leviers sont aussi bien la publication d’offres d’emploi sur les sites web, les réseaux sociaux, les interventions dans les écoles et les centres de formation, le bouche-à-oreille, les organismes d’insertion professionnelle… Au Service de remplacement de la Marne, Perrine Raverdy, constate que ces missions peuvent attirer des exploitants, en recherche d’un complément d’activité. Parmi les 120 salariés employés par an, certains sont des jeunes retraités désirant garder une activité.
« Nous travaillons à fidéliser les agents », confie-t-elle. Même préoccupation dans le Gard : l’agence met en place des journées de cohésion et une prime de fin d’année.
Les Services de remplacement ont toutefois une carte à jouer. « Ce qui ressort des entretiens que nous avons avec nos agents c’est qu’ils apprécient cette polyvalence, le fait de travailler dans différentes exploitations, avec différentes visions », expose Perrine Raverdy. Une flexibilité assumée, tout en ayant un revenu salarié.
L’exploitation peut aussi proposer une personne de son choix. C’est souvent le cas pour les congés longs, comme les congés maternité. Dans le Gard, Marjorie Pinero estime la proportion d’agents trouvés par le Service de remplacement à environ 60 % tandis que 40 % sont des personnes proposées par les exploitations. « Souvent, il y a une crainte de faire venir quelqu’un de l’extérieur », analyse-t-elle. Cette voie s’impose aussi lorsque le Service ne trouve pas de salarié.
L’activité de remplacement se développe
Être prêt à déléguer est une condition indispensable pour que le remplacement fonctionne. L’anticipation est évidemment préférable quand c’est possible. Pour les congés maternité et paternité, il convient d’engager les démarches dès le sixième mois de grossesse. Les Services de remplacement insistent sur l’importance du temps d’échange entre remplaçant(e) et remplacé(e). L’outil souffre encore d’une notoriété insuffisante. Dans le Gard, sur les 3 000 exploitations agricoles, Marjorie Pinero note que seulement 250 sont adhérentes du Service de remplacement. Le coût de l’adhésion, de 35 à 50 euros, ne lui semble pas vraiment être un frein. « Il est même offert pour les deux premières années d’installation », indique-t-elle. Du côté des remplacés, elle assure qu’une enquête a dévoilé un taux de satisfaction de 84 %. L’activité se développe toutefois. Sur les 242 adhérents de 2021, 131 sont de nouvelles adhésions. Les trois postes d’agents en CDI pourraient monter à 4 ou 5 prochainement.
voir plus loin
En cumul national, les Services de remplacement assurent 650 000 journées de remplacement par an. Elles se répartissent en :
Maladie, accident, décès : 36 %
Congés : 32 %
Maternité : 18 %
Paternité : 5 %
Développement agricole et rural : 3 %
Formation : 2 %
Mandat professionnel, syndical, électif : 2 %
Répit pour épuisement professionnel : 2 %
Ludivine Verlaguet, chef d’exploitation de la Commanderie de Cotelier, associée avec son frère en AOP costières-de-nîmes.
« J’ai fait appel à quelqu’un que je connaissais »
Tout l’administratif est géré par le Service, c’est très facile. Dans cette période pleine de bouleversements, c’est bien de pouvoir s’appuyer sur eux. Je conseille d’enclencher la demande le plus tôt possible. La rémunération était prévue jusqu’à mi-décembre mais je n’ai pas prolongé jusque-là. On ne peut pas se permettre de s’arrêter davantage quand on travaille pour soi. »
Matthieu Petitprêtre, agent de remplacement dans la Marne
« Il faut beaucoup d’écoute »