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Mildiou de la vigne : comment lutter ?

Le mildiou de la vigne est l’ennemi principal des viticulteurs depuis son introduction en France. Voici tout ce qu’il faut savoir pour lutter contre cette maladie fongique.

Feuille de vigne colonisée par le mildiou de la vigne
Le mildiou est l'une des principales maladies touchant la vigne.
© J. -C. Gutner


 

 

Qu’est-ce que le mildiou ?  

Quel type de pathogène est-ce ?  

Autrefois classé parmi les champignons, Plasmopara viticola est désormais rattaché au groupe des stramenopiles, avec les diatomées et les algues brunes, témoin de son affinité avec l’eau. Parasite obligatoire, cet oomycète ne peut pas se développer en dehors de son hôte, la vigne.  

D’où provient le mildiou de la vigne ?  

Détecté pour la première fois en France en 1878, le mildiou est originaire d’Amérique du Nord. Une seule des cinq lignées de mildiou provenant des vignes sauvages américaines Vitis aestivalis a contaminé les vignes cultivées européennes Vitis vinifera.  

Carte : Dissémination du mildiou de la vigne

Dissémination du mildiou de la vigne dans le monde
Vraisemblablement introduit en France par les importations de vignes américaines pour lutter contre le phylloxera, le mildiou a poursuivi sa diffusion à travers les continents à la faveur de la diffusion mondiale des cépages français durant le 20e siècle.
Source: (Fontaine et al., 2021, https://doi.org/10.1016/j.cub.2021.03.009

 

 

Quel est le cycle de Plasmopara viticola ?  

Sous nos climats, Plasmopara viticola passe l’hiver sous forme d’œufs (oospores) dans les organes contaminés tombés à terre, notamment les feuilles. Ces œufs résistent à des températures de – 20 °C et peuvent se conserver plusieurs années.  

Après germination au printemps, le mildiou va s’installer sur un organe herbacé de la vigne (feuille, pétiole, jeune rameau) proche du sol, à la faveur d’une éclaboussure. Les filaments de mildiou vont alors se développer dans les tissus, se nourrissant aux dépens de la vigne.  

Au bout de dix jours, qui correspondent à la phase d’incubation, les premiers symptômes vont apparaître (voir ci-dessous). Les spores pourront alors être disséminés et contamineront potentiellement les inflorescences et les grappes. Si les conditions climatiques lui sont favorables, plusieurs cycles de cette reproduction asexuée sont possibles dans la saison.  

À l’automne, le mildiou va produire des oospores par reproduction sexuée, qui généreront l’épidémie de l’année suivante. 

 

Quels sont les symptômes du mildiou sur la vigne ? 

La maladie présente plusieurs faciès, en fonction des organes atteints et de la période de l’année. 

Le mildiou sur feuilles de vigne 

Au printemps, la « tâche d’huile » 

Elle est très caractéristique et se situe sur le dessus des feuilles. Le feutrage blanc sur les faces inférieures correspond aux fructifications du mildiou.  

feuille de vigne atteinte du mildiou de la vigne sous forme de tâche d'huile
Le feutrage blanc est constitué de sporangiophores qui vont libérer les sporanges, puis les zoospores pour disséminer la maladie. ©Bugaret Yvon/Inrae 

 

Symptômes « mosaïque » 

En fin de saison, le mildiou apparaît sur les feuilles âgées sous forme de nombreuses petites zones jaunes à brun-rouge, limitées par les nervures. 

Le mildiou sur inflorescences et sur grappes 

Symptômes rot gris 

Un duvet blanc recouvre les boutons floraux ou les jeunes baies, ce sont les fructifications du mildiou. 

Symptômes rot brun 

Après la nouaison, les baies contaminées prennent un aspect brun-rouge. 

Grappe de raisins atteints par le mildiou de la vigne par le symptôme rot brun
Le faciès rot-brun s’installe après la nouaison. ©Cartolaro Philippe/Inrae 

 

Les baies ne sont plus sensibles au mildiou après la véraison. Le feuillage, lui, demeure sensible jusqu’à l’automne.  

  

Quel est l’impact de cette maladie sur les rendements de la vigne ?  

Les dégâts dus au mildiou peuvent être considérables, allant jusqu’à la destruction de la récolte dans des parcelles mal protégées. En réduisant l’activité photosynthétique (défoliation), le mildiou altère la qualité des raisins durant la maturation et diminue la mise en réserve dans les bois. Il impacte ainsi la pérennité du cep. 

  

Quelles sont les conditions de développement de prédilection de Plasmopara viticola ?  

Quelles conditions météo favorisent le mildiou sur vigne ?  

Les conditions climatiques humides, les périodes pluvieuses, les hygrométries élevées sont très favorables au mildiou, comme l’a montré l’année 2024 par exemple. Une température avoisinante 25°C constitue son optimum, mais il peut se développer dans une plage de température de 11 à 30°C.  

Quels sont ses zones et cépages de prédilection ?  

Le mildiou est présent dans toutes les régions viticoles françaises, avec une prédilection pour la façade atlantique, au climat plus humide.  

Mis à part les variétés résistantes sélectionnées sur ce critère, tous les cépages cultivés sont sensibles au mildiou, mais un gradient de sensibilité existe. Duras, fer, mauzac, piquepoul, roussanne, syrah, viognier sont peu sensibles. 

À l’inverse, le chenin, le cinsault, le gamay, le grenache, le malbec, le merlot, le mourvèdre, les pinots noir et gris, le sauvignon, le sylvaner le tannat et l’ugni blanc sont très sensibles (Galet, 1977).  

La fertilisation et le microbiote ont-ils un impact sur le développement du mildiou ? 

Le mildiou affectionne particulièrement les organes jeunes des vignes. La fertilisation qui favorise la vigueur favorise aussi la réceptivité de la plante au mildiou. Des plantes carencées en azote ou en phosphore sont moins réceptives.  

Le microbiote pourrait avoir une influence vis-à-vis des épidémies de mildiou : des champignons du sol (par exemple, Buckleyzyma aurantiaca, Bullera alba, Trichoderma virens et Trichoderma hamatum) et des bactéries (par exemple, les genres Streptomyces et Bacillus) sont systématiquement plus abondants dans les parcelles historiquement moins sensibles au mildiou (Fournier, 2024).  Le sujet fait actuellement l’objet de recherches. 

 

Quelles sont les mesures de base pour éviter d'avoir du mildiou sur la vigne ?  

Quelle prophylaxie peut-on mettre en place ?  

  • Avant plantation, drainage du sol pour éviter la formation de mouillères. 

  • Implantation d’un couvert végétal pour diminuer le risque de flaques d’eau et d’éclaboussures. Attention à contrôler la hauteur du couvert en saison.  

  • Épamprage et élimination précoce des semis de pépins, qui favorisent les contaminations primaires.  

  • Rognages raisonnés et travaux en vert pour limiter la présence des organes jeunes, très sensibles. 

  • Ebourgeonnage pour favoriser la circulation de l’air et diminuer la durée d’humectation du feuillage  

  • Retirer les feuilles à l’automne réduit l’inoculum primaire de mildiou pour l’année suivante.  

Quels OAD et capteurs permettent un monitoring efficace ?  

Decitrait (IFV), Movida (Bayer), Agroclim (Promété), Rimpro (TCSD), Agrigenius (BASF)... De nombreux outils d’aide à la décision (OAD) existent aujourd’hui pour estimer le risque mildiou, fondés sur les données météorologiques.  

Pour essayer d’améliorer la précision de la prédiction, une technique de capture et de quantification de l’inoculum arien du mildiou a été mise au point par l’UMT seven à Bordeaux, depuis 2019. Les études ont montré que la mesure de cet inoculum est corrélée à la progression de la maladie sur la parcelle à + 7 jours et + 14 jours.  

Les recherches continuent pour aller vers un conseil opérationnel de protection phytosanitaire. L’idée serait de retarder le premier traitement et/ou ne pas renouveler en saison en fonction du risque. 

Ce sujet mobilise également les chercheurs d’autres pays : une entreprise australienne a présenté son système au Vinitech 2024.  

 

Quels sont les produits pour lutter contre le mildiou de la vigne en culture conventionnelle ? 

Avec le retrait progressif des matières actives les plus toxiques, les produits phytosanitaires autorisés contre le mildiou se réduisent d’année en année. En 2025, quinze substances fongicides sont autorisées (hors cuivre et biocontrôle).  

Les fongicides non CMR (Cancérogène, mutagène, reprotoxique) 

Ametoctradine, azoxystrobine, benalaxyl-M, cyazofamide, fosetyl-Al, mandipropamide, metalaxyl-M, oxathiapiproline, zoxamide 

Les fongicides CMR 

  • Amisulbrom, cymoxanil, dithianon, fluopicolide, folpel, valifenalate 

Pour limiter les résistances, attention à bien alterner les molécules 

Mis à part les produits multisites (cuivre, dithianon, folpel), tous les modes d’action fongicides sont actuellement concernés par une résistance à divers degrés. 

L’alternance des modes d’action au long de la campagne et l’association avec un partenaire efficace demeurent recommandées pour éviter le développement de ces populations de mildiou résistantes.   

  

Quelles sont les solutions biologiques et naturelles à disposition des viticulteurs contre le mildiou de la vigne ?  

Le cuivre en viticulture 

L’efficacité du cuivre contre le mildiou a été mise en évidence dès la fin du 19e siècle. De nos jours, quatre formes peuvent être utilisées en viticulture, par ordre théorique de solubilité : l’hydroxyde de cuivre (Cu(OH)2), le sulfate de cuivre CuSO4 (ou bouillie bordelaise), l’oxyde cuivreux Cu2O et l’oxychlorure de cuivre (Cu2Cl(OH)3). 

Tableau : Les différents types de cuivre contre le mildiou de la vigne 

Tableau explicatrif des composants des différentes préparations contre le mildiou de la vigne
Source : CA 66

 

 

Bien que l’association de différentes formes de cuivre soit souvent pratiquée par les vignerons, des essais récents de l’IFV n’ont pas mis en évidence de différences de résistance aux lessivages entre ces trois formes.  

Produit de contact, le cuivre est efficace contre le mildiou tant qu’il n’est pas lessivé.  

Sa persistance dans le sol et sa toxicité contre les organismes aquatiques suscitent une recherche active d’alternatives. S’il demeure difficile à remplacer jusqu’à présent, des essais ont montré que des diminutions de dose sont possibles en association avec des produits de biocontrôle ou des extraits de plante.  

Les biocontrôles contre le mildiou de la vigne 

Quatre familles de produits de biocontrôle sont autorisées contre le mildiou de la vigne : l’huile essentielle d’orange, les phosphonates, les stimulateurs de défense des plantes (cerevisiane, cos-oga, ABE IT 56), et un micro-organisme (Baccillus amyloliquefaciens). Ces produits font preuve d’efficacités partielles. 

Les préparations de plantes 

Vendues prêtes à l’emploi ou à réaliser soi-même, les préparations de plantes sont autorisées sous le vocable de PNPP (préparations naturelles peu préoccupantes).  

Locales et peu coûteuses, ces préparations ont des efficacités partielles et variables. La prêle en association ou en alternance avec l’ortie et le saule a, par exemple, a apporté une efficacité supplémentaire au cuivre dans des essais en Gironde et en Alsace (source : Centre de ressource cuivre). Ces préparations se révèlent insuffisantes en cas de forte pression.  

La lutte biodynamique 

En biodynamie, le cuivre est autorisé contre le mildiou et demeure la base des programmes, surtout les années difficiles. La lutte est soutenue par l’application de décoctions de prêle en début de saison, puis de silice de corne pour renforcer les jeunes tissus végétaux.  

À partir de la fleur, différents types de tisanes peuvent être pulvérisées en fonction de l’effet recherché : osier, reine des prés, camomille, reine des prés... L’huile essentielle d’écorce d’orange peut aussi être associée avec le cuivre. 

En cas d’attaque avérée, une décoction de bourdaine alternée avec une décoction d’écorce de chêne est conseillée contre le rot brun. À l’automne, la prêle reprend son rôle contre le mildiou mosaïque.  

  

Quel rôle peuvent jouer les biostimulants, activateurs de défense et produits de nutrition dans la lutte contre le mildiou de la vigne ?  

Hors du cadre réglementaire de la protection phytosanitaire, il existe des produits qui vont aider la plante à se défendre contre les pathogènes, dont le mildiou. Ce sont des substances naturelles biostimulantes ou des matières fertilisantes. Leur application peut : 

  • Renforcer mécaniquement ou physiologiquement la plante pour mieux combattre le pathogène. 

  • Activer les défenses de la plante (SDN) en cas d’agression, par exemple, en produisant des composés spécifiques. 

Un sol sans tassements, dont le microbiote fonctionne bien, suffisamment pourvu en éléments minéraux va influer positivement sur la santé de la vigne.   

  

Comment garantir une bonne efficacité de la protection, même les années à forte pression ?  

  • Commencer au bon moment, c’est la clé. La date du premier traitement peut être déterminée par l’observation des parcelles et avec l’aide des modèles.  

  • Bien gérer les renouvellements. Être organisé et réactif est essentiel pour intervenir à la période souhaitée.  

  • Un pulvé bien réglé peut sauver une récolte. Afin d’atteindre la cible (face inférieure des feuilles et/ou grappes), un pulvérisateur face par face est recommandé. La distance des buses au feuillage ne doit pas être trop grande pour éviter les pertes (50 cm d’écartement en plus font perdre 20 % du produit). Panacher les types de buses améliore de plus de 15 % la couverture sur grappe (CA 33).   

  • Le quad est un atout pour rentrer dans les vignes malgré la pluie. Grâce à son faible poids comparé à un tracteur, le quad peut permettre de traiter dans une parcelle qui ressuie difficilement ou d’intervenir dans des conditions humides.  

 

Quelles sont les pistes d’avenir dans la lutte contre le mildiou ?  

Les innovations produits 

Les entreprises phytosanitaires  sont fortement mobilisées pour trouver une alternative au cuivre et de nombreux biopesticides sont en cours d’homologation ou à l’étude : le lysat de l’amibe Willertia magna C2c maky attendue en 2025-2026 par Amoeba, des algues brunes associée à des phosphonates (De Sangosse), un extrait d’huile d’inule (Akinao), l’eau oxygénée encapsulée... ;  

Des recherches plus fondamentales continuent en parallèle 

Des résultats prometteurs ont été obtenus, par exemple, avec des extraits de tanins de pépins de raisin à Bordeaux. 

Les variétés résistantes 

Depuis une quinzaine d’années, une nouvelle génération de variétés résistantes au mildiou et à l’oïdium donnant des vins qualitatifs a été obtenue. Ces variétés ont fait la preuve de leur efficacité chez de nombreux vignerons. Les premiers cas de dégâts de mildiou ont toutefois été enregistrés en 2024 sur artaban, vidoc, cabernet volos et sauvignon rytos (jusqu’à 30 % de perte de rendement).  

Inoculation en laboratoire de souche de mildiou sur des feuilles saines
Inoculation de souche de mildiou sur des feuilles saines. L’Inrae étudie l’adaptation du mildiou à la résistance génétique de la vigne, afin de contribuer à une gestion durable des variétés résistantes. © Nicolas Bertrand/Inrae

 

La protection physique de la vigne  

Couvrir les vignes temporairement pendant les pluies pour éviter la dissémination du mildiou fait partie des nouveaux concepts qui commencent à être mis en marché. L’intérêt ? Éviter ou diminuer la pulvérisation de produits phytosanitaires, tout en protégeant des aléas climatiques.   

Un autre système de couverture éphémère du rang, tel un parasol dépliable et repliable automatisé, est en cours de mise au point (projet Bienesis).  

L’efficacité de la protection contre le mildiou des filets initialement prévus contre la grêle est aussi à l’étude (projet Vinoshield). 

Rédaction Réussir

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