Aller au contenu principal

la minute droit
Bail rural : peut-on être preneur et non associé ?

Nathalie Tourrette et Matthieu Chirez, avocats, experts en droit viticole chez JP Karsenty & Associés, éclairent des décisions récentes de la Cour de cassation sur des baux mis à disposition à des preneurs non associés de la structure d’exploitation.

<em class="placeholder">Tracteur enjambeur réalisant du travail du sol en vignes étroites, à l&#039;aide d&#039;une charrue vigneronne.</em>
Prouver la participation effective du preneur est essentiel lorsque le bien est mis à disposition d'une société dont il n'est pas associé.
© X. Delbecque

Récemment, la Cour de cassation a eu à connaître plusieurs situations où les biens loués avaient été mis à disposition d’une société ou d’un groupement d’exploitation agricole par les preneurs et, comme cela est fréquent en pratique, certains d’entre eux n’étaient pas associés de la structure mais continuaient cependant à se consacrer à l’exploitation.

Selon les bailleurs, la faculté de mettre les biens loués à la disposition d’une société impose, en cas de pluralité de preneurs, que ceux-ci soient tous associés. À défaut, le preneur non associé manque à son obligation de se consacrer personnellement à la mise en valeur des biens et la mise à disposition équivaut à une cession prohibée entraînant la résiliation du bail. Dit autrement, le seul fait de ne pas être associé de la société constituait, pour les bailleurs, une cession prohibée et donc un manquement justifiant la résiliation du bail.

De leurs côtés, les preneurs ont mis en avant que les bailleurs avaient été régulièrement informés de la mise à disposition et, surtout, que le fait que l’un des copreneurs ne soit pas associé de la structure était indifférent, dès lors qu’il continuait de participer à l’exploitation.

La Cour de cassation prend en compte la participation effective du preneur

Dans trois arrêts rendus le 26 septembre 2024, les juges de la Cour suprême ont considéré que « le preneur, ou en cas de cotitularité, l’un ou les copreneurs, qui mettent les biens loués à la disposition d’une société dont ils ne sont pas associés mais qui continuent à se consacrer à l’exploitation de ceux-ci, en participant sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, n’abandonnent pas la jouissance des biens loués et ne procèdent donc pas à une cession prohibée du bail ». Il en résulte que, dans ce cas, le bailleur est « tenu de démontrer que le manquement est de nature à lui porter préjudice ».

Par conséquent, la simple mise à disposition des biens loués à une société dont le preneur n’est pas associé, ne peut suffire pour obtenir la résiliation du bail. La participation de façon active et permanente du preneur aux travaux de l’exploitation est donc déterminante pour éviter que soit caractérisée une cession prohibée qui est sanctionnée par la résiliation du bail. Cette participation se prouve par tous moyens (affiliation MSA en qualité de conjoint collaborateur participant aux travaux, statuts de la structure, attestation, …), l’important étant de démontrer que les preneurs ont conservé la jouissance des biens et le contrôle de l’exploitation des biens. À l’inverse, de simples fonctions de gestion dans la structure sont insuffisantes pour prouver une participation à l’exploitation suffisante.

Le départ à la retraite d’un des preneurs n’entache pas la mise à disposition

Lorsqu’est démontrée la participation effective du preneur qui n’est pas associé de la structure bénéficiant de la mise à disposition, le bailleur ne peut alors solliciter la résiliation du bail qu’en prouvant que le manquement est de nature à lui porter préjudice.

Également, dans l’une des décisions rendues le 26 septembre 2024, les juges ont considéré que l’irrégularité de la mise à disposition ne peut être opposée par le bailleur à l’encontre du preneur souhaitant continuer l’activité, en cas de départ à la retraite de l’autre preneur. Cette mise à disposition ne peut en effet caractériser une mauvaise foi ou une atteinte aux intérêts du bailleur, intérêts qui s’apprécient au regard de la capacité du copreneur à assurer la bonne exploitation des biens et le respect de ses obligations légales et contractuelles.

En conséquence, la participation active et permanente du preneur à l’exploitation des biens loués est très importante pour éviter la résiliation du bail en cas de situations irrégulières en cours de bail, que le ou les preneurs ne perçoivent pas nécessairement car résultant de situations fréquentes comme la création ou la participation à des sociétés auxquelles les biens loués sont mis à disposition.

La simple mise à disposition des biens loués à une société dont le preneur n’est pas associé ne peut suffire pour obtenir la résiliation du bail

Les plus lus

<em class="placeholder">désherbage à  l&#039;aide d&#039;une solution diluée de produit Basta dans le vignoble de Champagne . désherbage non sélectif . produit phytosanitaire . pesticide . traitement . ...</em>
Le désherbage chimique vert est-il une voie d’avenir en viticulture ?

Plusieurs solutions de produits désherbants d’origine naturelle sont dans les cartons. Elles apporteraient un nouveau regard…

<em class="placeholder">Rang de vigne en hiver planté de vesce érigée.</em>
En viticulture, enherber sous le rang, ce n’est pas si simple

De nombreux travaux ont été menés en France et en Europe sur l’enherbement du cavaillon, avec un succès mitigé. Voici les…

<em class="placeholder">Attacheur de vigne Pellenc Fixion 2</em>
Les attacheurs électriques, pour un liage de la vigne deux fois plus rapide
Les attacheurs électriques sont connus pour leur débit de chantier élevé. Petit tour de marché des solutions existantes.
Donald Trump menace les vins européens de droits de douane de 200 %

Le combat douanier lancé par Donald Trump depuis son arrivée à la tête des États-Unis connaît un nouvel épisode avec la menace…

<em class="placeholder">Tracteur Same Frutteto Pro</em>
Same - L’autoguidage sans GPS sur les Frutteto Pro

Le constructeur italien Same lance les tracteurs spécialisés Frutteto Pro, une déclinaison toute équipée.

Agrofournitures : comment s'approvisionner à prix doux en viticulture ?

De 5 à 25 %, c’est ce qu’il est possible d’économiser en achetant ses produits en morte-saison ou bien en se fournissant…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Vigne
Consultez les revues Réussir Vigne au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters des filières viticole et vinicole