Emballages : les solutions pour limiter le plastique fossile se multiplient
La loi Agec fait bouger le monde de l’emballage, de leur conception à leur fin de vie. Les fabricants tentent de se détacher du plastique d’origine fossile. Le recyclage s’industrialise en France grâce aux trieuses optiques, tandis que le réemploi monte en puissance.
La loi Agec fait bouger le monde de l’emballage, de leur conception à leur fin de vie. Les fabricants tentent de se détacher du plastique d’origine fossile. Le recyclage s’industrialise en France grâce aux trieuses optiques, tandis que le réemploi monte en puissance.
Avec l’entrée en vigueur de la loi Agec au 1er janvier 2022, la France fait un premier pas vers la réduction de l’utilisation du plastique. L’agroalimentaire étant à l’origine de deux tiers des emballages en France, selon l’Ademe, le dialogue est ouvert entre fabricants de contenants et de denrées alimentaires. « Il n’existe pas une seule solution miracle », souligne Julien Bras, enseignant chercheur à l’institut polytechnique de Grenoble et fondateur de la Cellulose Valley.
De multiples pistes existent, réparties dans les trois thématiques de la réduction, le réemploi et le recyclage. Les metteurs en marché proposent de plus en plus d’emballages se passant de plastique fossile afin de se démarquer de la concurrence et dans l’objectif de se mettre en conformité avec la loi qui pousse à ne plus commercialiser d’emballages plastique non recyclables d’ici à 2030. « La loi interdisant le plastique à usage unique, ça ne sera plus une question de surcoût mais une obligation », rappelle Julien Bras.
Réduire l’utilisation de plastique grâce au papier ou au carton
Les exemples de réduction d’utilisation du plastique ne manquent pas. Bioporc a récemment troqué l’emballage de son jambon contre un contenant en carton (-70 % d’utilisation de plastique). « Il nous reste un film supérieur plastique qui assure la qualité sanitaire du produit. Nous n’avons pas encore trouvé d’alternatives chez les fabricants d’emballage », souligne Christine Derepas, directrice marketing et R & D de Bioporc. Il en sera de même pour la marque GMS de la société, Le Bio de nos éleveurs, d’ici au mois de mars. « Ces nouveaux emballages sont 5 à 6 % plus chers, mais nous devons être citoyens », assure Christine Derepas.
Bioporc a eu besoin de plusieurs mois pour réadapter ses lignes de production pour que le conditionnement des produits soit fluide. Le son de cloche est similaire du côté de Vivien Paille qui est passé aux sachets en papier. « L’adaptation de nos machines, notamment au niveau du déroulement ou du scellage, a nécessité environ un an de travail », raconte Alexandre Saint-Mars, responsable emballage de Vivien Paille.
Les emballages en cellulose ont un rôle à jouer pour l’usage unique
Déjà à l’origine des contenants d’œufs, les emballages en cellulose « pourraient jouer un rôle dans l’emballage à usage unique. Ils sont biodégradables et recyclables », précise Julien Bras. La Cellulose Valley, chaire industrielle regroupant plusieurs fabricants autour de projets d’emballages en cellulose, développe notamment une bouteille d’eau. « De nouvelles solutions à base de cellulose vont arriver, desquelles on aura amélioré les propriétés mécaniques, la conservation des aliments et la résistance à l’humidité », ajoute-t-il.
Tetra Pak a, de son côté, développé avec la marque Elle & Vire un bouchon à partir de polymères recyclés certifiés pour les briques de produits laitiers. « Le bouchon est une première étape. Nous proposerons dans un second temps la brique en matière recyclée », signale Jérôme Bouldoires, responsable marketing des produits laitiers de Tetra Pak. La société propose, par ailleurs, de plus en plus de plastique végétal issu de la canne à sucre, « un standard en devenir, permettant de s’écarter du plastique fossile », estime Jérôme Bouldoires.
Le recyclage s’industrialise
La France fait partie des mauvais élèves de l’Europe concernant le recyclage du plastique. La production de plastique recyclé ne représentait que 6 % du total national, relate un rapport de janvier 2020 sur les filières de recyclage des déchets en France métropolitaine. « Le plastique recyclé incorporé dans les bouteilles de Coca-Cola fabriquées en France est importé. Notre gisement et notre collecte sont insuffisants », alerte Michel Fontaine, président du Conseil national de l’emballage.
Nos performances de recyclage sont calamiteuses
Les centres de recyclage français sont en cours de développement et s’équipent de trieuses optiques qui leur permettront à terme de « passer de l’artisanat à l’industrie », positive Michel Fontaine. « Le développement du recyclage ne va pas assez vite. Les chiffres de la France sont calamiteux. Le tri optique offrira un gain en temps et en efficacité par rapport au tri manuel », ajoute Fabrice Peltier, auteur de La Révolution de l’emballage.
Le réemploi se développe
« La révolution actuelle de l’emballage est due en majeure partie à la mise en place du réemploi », souligne Fabrice Peltier. Alors que cette piste manquait de compétitivité il y a quelques années, un nouveau commerce se développe avec l’émergence de solutions industrielles. La société Uzaje installe des centres de lavage mutualisés afin de nettoyer des contenants pour les réutiliser. « Nous sommes en contact notamment avec Valrhona et Triballat pour développer de nouveaux standards et définir un emballage réemployable commun », explique Emmanuel Auberger, président et fondateur d’Uzaje.
Les contenants en plastique pour les collectivités sont remplacés par des bacs en inox réemployables. La société a ouvert son premier centre de lavage à l’est de Paris et inaugurera son second le 15 février à Avignon. « Notre ambition est d’en avoir huit d’ici à fin 2023. L’idée est d’implanter un site à moins de 200 km de chaque grande ville, dont un deuxième en Île-de-France », souhaite-t-il.
Les emballages liés au transport sont aussi concernés
Si le secteur des emballages alimentaires s’agite afin de s’affranchir du plastique, l’émergence du e-commerce alimentaire à l’échelle mondiale aura son rôle à jouer au niveau des emballages utilisés pour les livraisons. « En 2040, le e-commerce sera majoritaire pour l’alimentaire et aura dépassé les 50 %. Les systèmes d’emballage de demain s’inventent aujourd’hui. Ils répondront aux attentes sociétales et aux exigences d’un nouveau commerce », prévoit Fabrice Peltier, auteur de La Révolution de l’emballage. Les emballages liés au transport doivent ainsi également réaliser une transition afin de devenir plus vertueux. « La problématique de l’emballage en magasin n’est que l’épaisseur du trait. Tout produit a besoin d’emballage pour le transport, même les fruits qui sont vendus en vrac », rappelle Michel Fontaine, président du Conseil national de l’emballage.