Comment réussir une vaccination orale des porcelets en plein air
Depuis début 2019, les porcelets élevés en plein air de la ferme expérimentale des Trinottières sont vaccinés via l’eau de boisson avant le sevrage. Explications pratiques de ce « medical training »
Depuis début 2019, les porcelets élevés en plein air de la ferme expérimentale des Trinottières sont vaccinés via l’eau de boisson avant le sevrage. Explications pratiques de ce « medical training »
À la ferme expérimentale des Trinottières dans les Pays de la Loire, les porcelets bio élevés en plein air sont vaccinés à 4-5 semaines d’âge avec le vaccin Coliprotec F4 F18 (laboratoire Elanco) pour lutter contre les diarrhées colibacillaires en post-sevrage. Ce vaccin oral est administré en utilisant des augettes larges comme celles des nourrisseurs de type Maxitolva fixées sur des caillebotis en béton. Ces augettes sont réparties entre les parcs maternités, à raison d’un point de distribution pour deux portées. Ils sont judicieusement positionnés pour que les porcelets les trouvent facilement : dans les couloirs de circulation, à proximité des augettes d’aliment pour les porcelets, elles-mêmes situées aux abords des auges des truies. Ces augettes restent toujours hors de portée des truies allaitantes. Pendant les 6 à 7 jours qui précèdent l’administration orale du vaccin, de l’eau tiède sucrée (400 g de sucre bio pour 10 litres d’eau) est distribuée tous les matins dans ces augettes pour attirer les porcelets et les habituer à consommer. Cette distribution se fait en même temps que l’alimentation des truies et des porcelets : ainsi lorsque la mère se déplace vers la zone d’alimentation, elle attire naturellement ses porcelets avec elle. Ils vont alors explorer l’environnement proche avec les augettes pour consommer l’aliment, puis l’eau tiède sucrée. Cette découverte est facilitée aussi avec les porcelets des truies voisines par effet d’entraînement. L’idéal est d’aménager les parcs maternité de part et d’autre du couloir de circulation pour faciliter ces regroupements de porcelets. Le volume distribué de l’ordre de 1,5 à 2 litres pour deux portées, est vérifié chaque jour avec un pichet gradué pour évaluer la consommation des porcelets et s’assurer de la bonne répartition de la solution entre tous les porcelets. Cette mesure permet d’affiner le volume de solution de vaccin à préparer pour le jour J.
Fractionner la solution vaccinale si nécessaire
Selon les prescriptions du laboratoire Elanco, la solution vaccinale distribuée doit être consommée en quatre heures. L’ordre de grandeur du volume à préparer est de deux litres pour deux portées de dix porcelets par alimentateur. Le jour du traitement vaccinal est choisi en fonction de la météo : on préférera une matinée sans pluie pour s’assurer que les porcelets sortent bien des abris de maternité. Ce matin-là, on ajoute du thiosulfate dans la solution sucrée afin de neutraliser le chlore. La solution est versée dans les nourrisseurs préalablement nettoyés à l’eau claire. On ajoute le nombre de doses de vaccins nécessaires dans chaque augette avec le pistolet doseur. La distribution peut être fractionnée en observant la fréquentation des porcelets sur chaque point de distribution et compléter les nourrisseurs très utilisés. Selon les prescriptions du laboratoire, ce vaccin ne peut pas être administré avant 18 jours d’âge à cause des anticorps maternels qui limitent son efficacité. Il ne peut donc pas être réalisé au moment des interventions sur les porcelets (identification, castration des mâles) pendant leur première semaine de vie. En parallèle, les porcelets doivent être vaccinés au moins 8 jours avant l’apparition des premiers symptômes cliniques (diarrhées), le temps que l’immunité se mette en place. Chez l’éleveur post-sevreur engraisseur, les porcelets commencent à être malades dès la semaine qui suit le sevrage qui a lieu à 42 jours d’âge, ce qui suppose de les vacciner quand ils sont encore avec leur mère.
Cette pratique de distribution orale est bien connue de l’élevage en bâtiment où les porcelets sont vaccinés, portée par portée, en utilisant les augettes dans chaque case, la semaine qui précède le sevrage. Ces mêmes augettes sont utilisées les autres jours pour l’alimentation des porcelets : elles sont donc bien repérées par les jeunes animaux. L’administration peut se faire aussi par drogage si on veut assurer la prise de vaccins : cette méthode est réalisée à la première administration pour vérifier que les animaux ne sont pas malades après une bonne prise de vaccin.
Tirer parti de la curiosité naturelle des porcelets
En plein air, la distribution par drogage est compliquée à mettre en œuvre puisque les truies allaitantes sont libres et les porcelets sortent des abris dès l’âge de 8-10 jours. Cette absence de contention nécessite de s’adapter aux conditions de l’élevage plein air. On tire parti du comportement exploratoire du porc et de ses capacités d’apprentissage et de mémorisation.
Cette expérience réussie de la vaccination orale en élevage plein air amène les ingénieurs de la Chambre d’agriculture des pays de la Loire à poursuivre les travaux de domestication et d’apprivoisement de nos animaux. À la ferme expérimentale des Trinottières, une étude sur l’amélioration de la relation de confiance entre l’éleveur et ses truies afin de faciliter les interventions ultérieures notamment pendant la semaine qui suit les naissances est envisagée. Les pratiques d’apprivoisement commenceraient dès l’élevage des cochettes.