Pourquoi la démarche « Charolais de Bourgogne » a-t-elle été mise en place ?
Régis Taupin - « Charolais de Bourgogne » a été initiée en 1998 et fait suite au premier scandale de l’ESB en 1996. C’est la réaction d’un collectif d’éleveurs bourguignons souhaitant mettre en avant la qualité de l’élevage régional dans le berceau de la race Charolaise. Alors qu’il n’y a jamais eu un seul cas d’ESB détecté dans un élevage charolais bourguignon, nous avions été contraints de subir comme tous les autres éleveurs, la dégringolade du prix de nos animaux au moment des deux crises de l’ESB.
Quels sont les tonnages concernés ?
R. T. - Jusqu’à l’obtention de l’IGP le 31 mai dernier, Charolais de Bourgogne était une marque. Elle a été déposée en 2005 et utilisée en tant que telle pendant douze ans. Elle a permis de rassembler producteurs et abatteurs. Elle représente actuellement 450 tonnes de viande préparée par an, vendue dans 62 magasins (40 % en région Bourgogne Franche-Comté et le reste essentiellement en région parisienne et dans le Rhône). Ce sont de petits volumes. Aujourd’hui cinq entreprises disposant de plusieurs sites sont agréées pour commercialiser ce produit.
R. T. - Jusqu’au 31 mai, notre marque concernait les quatre départements de l’ex-région Bourgogne : Côte-d’Or, Nièvre, Saône-et-Loire, Yonne. Depuis, la zone de production est délimitée par des critères précis. C’est lié au montage du dossier et à la volonté de mettre en avant l’importance de l’herbe dans l’alimentation de nos Charolais. Les communes incluses dans la zone de l’IGP doivent avoir au moins 70 % de leur surface agricole occupée par de l’herbe, excluant de fait celles à dominante céréalière. Parmi les autres critères, au moins 50 % des vaches présentes sur la commune doivent être des allaitantes. Et 85 % de ces allaitantes doivent être des Charolaises. Ces critères ont permis de définir la zone de production. Elle concerne l’intégralité de la Saône-et-Loire, l’essentiel de la Nièvre, un bon tiers de la Côte-d’Or, le quart sud de l’Yonne et déborde sur certaines communes limitrophes de l’Ain, de la Loire, du Rhône et du Cher. Pas de l’Allier, car depuis 1996 une bonne partie de ce département est concernée par l’IGP associée au label rouge Charolais du Bourbonnais.
Quel est l’actuel ressenti des éleveurs sur le terrain ?
R. T. - La protection du périmètre de production a, dans un premier temps, suscité quelques tensions dans l’Yonne et en Côte-d’Or. Désormais, sur la zone IGP, les éleveurs s’impatientent. Ils souhaiteraient de façon légitime pouvoir bénéficier des retombées de cette démarche, surtout dans le contexte actuel, avec des trésoreries très tendues dans la plupart des exploitations. Mais chaque élevage produisant dans le cadre de la marque doit être audité pour savoir s’il peut rentrer dans l’IGP. Ce sont des procédures lourdes. Nous aimerions les voir avancer plus vite ! Nous renouvelons aussi les éléments de communication destinés à mettre en avant le produit sur les lieux de vente, avec un lancement prévu début 2018.
Comment l’IGP va-t-elle se superposer avec les différentes démarches qualité déjà existantes, et quelle plus-value est-il possible d’envisager ?
R. T. - Ce sera aux commerciaux des abatteurs engagés dans la démarche de persuader leurs clients de choisir l’IGP Charolais de Bourgogne, en particulier s’ils souhaitent mettre en avant des produits locaux. Cela relève aussi de stratégies d’enseigne souhaitant mettre en avant des produits bourguignons. Comme pour les autres signes de qualité (AOP, label et bio), il faut un complément de prix pour les éleveurs. Notre conseil d’administration n’a encore rien décidé, mais la plus-value devrait avoisiner celle de la viande label rouge.
À signaler aussi que, contrairement à du Charolais label rouge, l’IGP pourra être utilisée pour de la viande de jeune bovin. Cela peut être un atout pour l’export, compte tenu de la bonne image de notre région.
Une marque devenue IGP
Régis Taupin est éleveur dans la Nièvre. Il est président de l’indication géographique protégée « Charolais de Bourgogne », laquelle correspond à des jeunes bovins, génisses et vaches (moins de 10 ans) avec un cahier des charges correspondant à ce qui est classiquement pratiqué dans les exploitations bourguignonnes.