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Castrer les vaches pour les engraisser

En supprimant les chaleurs, et avec elles l’agitation, les chevauchements et les risques de chute inhérents, la castration ne manque pas d'intérêt pour l'engraissement des vaches allaitantes. Cette technique permet également de ne pas envoyer de vache gestante à l'abattoir.

La castration n’améliore pas le GMQ, d’après un article de synthèse bibliographique publié aux Journées nationales GTV à Nantes en 2012(1), ni sur les génisses, ni sur les vaches. Sur la longueur de la période d’engraissement, le GMQ des vaches ayant subi cette intervention est comparable, voire inférieur, à celui de vaches non castrées. Aucune influence sur la qualité de la carcasse et celle de la viande n’est par ailleurs évident d'après ces essais. Chez la vache laitière, la castration améliore la persistance laitière (en moyenne 360 kilos). La castration représente par ailleurs, dans l'ambiance actuelle, une option intéressante pour ne pas envoyer de femelles gestantes à l’abattoir, même à un stade relativement peu avancé.

Le docteur Dieter Vanwalleghem, de la clinique vétérinaire des Côteaux dans le Maine-et-Loire, pratique la castration des vaches par voie vaginale. L’intervention ne peut se faire qu’après la reprise du cycle de reproduction et sur des vaches ne présentant aucun symptôme de métrite ou d’endométrite. En général, elle est programmée quand la vache rentre en engraissement.

Un degré d’inconfort comparable à celui d’une palpation transrectale

« Pour le confort de l’animal, je lui administre une légère sédation qui élimine tout stress et je pratique une anesthésie péridurale » explique le vétérinaire. La région périnéale est soigneusement lavée. Ensuite, le toit vaginal est ouvert avec de petits ciseaux pour accéder à la cavité abdominale. Une ligature est posée sur chaque ovaire. Le but est d’arrêter le passage du sang dans l’ovaire qui deviendra petit, et arrêtera d’excréter des hormones. « Je prévois une heure pour cinq castrations de vaches » précise Dieter Vanwalleghem.

La castration demande une certaine dextérité et une connaissance anatomique parfaite. Il existe plusieurs variantes de la technique pour ouvrir la cavité abdominale et poser les ligatures (boulon/élastique ou élastique) selon l’expérience et les habitudes du vétérinaire. Dans d’autres pays, on sectionne les ovaires mais cela n’est pas pratiqué en France.

« Il m’arrive de ne pas réussir à opérer certains animaux, souvent des primipares qui n’ont jamais donné naissance par voie basse et dont le diamètre de la voie vaginale est faible.» Une injection d’anti-inflammatoire est réalisée systématiquement avant de démarrer l’opération. Mais aucun autre traitement de suites n’est instauré. Comme toute intervention, elle n’est pas sans risques. «Sur les deux cents animaux que j’ai opérés, je déplore deux complications. » Il peut arriver qu’un élastique rompe ou qu’il se deserre. «Très rarement, une vache revient en chaleurs. Cela m’est arrivé trois fois, dont pour l’une d’entre elles, régulièrement, très probablement parce qu'un élastique a lâché. » Selon la littérature, 5 % des vaches présentent des signes de chaleurs dans les sept jours suivant l’opération puis plus rien. Une étude en Australie a montré que le degré d’inconfort de la vache qui subit cette opération est comparable à celui d’une palpation transrectale. « Le GMQ baisse clairement les quinze premiers jours » précise le vétérinaire.

L’intervention est facturée entre 30 et 22 euros par vache (à un tarif dégressif selon le nombre d’animaux) auxquels s’ajoutent le prix de l’anti-inflammatoire (15 € environ) et du déplacement.

(1) Intérêt zootechnique de la castration de la vache. Sylvie Chastant et collaborateurs, journées GTV Nantes 2012, p.125.

« Je suis serein pour engraisser des vaches haut de gamme sans risque d’accident »

Rémy Barbeau est naisseur-engraisseur de Rouge des Prés à Chemillé dans le Maine-et-Loire, avec un troupeau de trente mères. Chaque année, il engraisse une quinzaine de vaches de réforme (poids moyen 580 kilos de carcasse). La moitié d’entre elles sont des vaches formées, à très haut potentiel de croissance, dont certaines sont présentées à des concours d’animaux de boucherie. Ces vaches sortent au pâturage fin mars et l’engraissement proprement dit ne démarre pas avant juin. « L’expression des chaleurs au printemps au pré est particulièrement marquée. S’il se trouve que plusieurs vaches sont en chaleur le même jour, cela risque de mal tourner » explique Rémy Barbeau. Après de nombreuses années sans problème, l’éleveur a connu ces derniers temps des pertes importantes : une vache s’est déhanchée, une autre s’est cassée une patte et une a même eu deux pattes cassées avec fractures ouvertes. Son vétérinaire lui a proposé d’essayer la castration et depuis quatre ans, l’éleveur en est parfaitement satisfait. Il est beaucoup plus tranquille pour son lot de vaches. « Le fait de ne pas risquer d’accident sur ce type d’animaux à très forte valeur commerciale est rentable. » Rémy Barbeau pense aussi que faire saillir ou inséminer ce type de vaches ne permet pas une bonne finition. Pour les vaches formées, il conduit l’engraissement sur cinq à six mois, mais on ne sait jamais, à quelques semaines près, combien de temps la finition va durer. « Si la gestation avance trop, le développement musculaire ne se fait plus de la même façon. Le fait d'être castrée et de ne pas être gestante a certainement à mon avis aussi un petit effet favorable sur les performances à l’engraissement, mais il est bien difficile à l’échelle d’un élevage de se faire une idée », remarque l’éleveur.  

Neuf vaches ont cette année été castrées fin février. Pour l’intervention, elles sont alignées au cornadis et l’éleveur assiste le vétérinaire. « La propreté des vaches est primordiale, ce qui va bien quand elles sont encore en ration hivernale avec maïs et foin comme c’est le cas pour ce lot. On voit qu’elles sont un peu gênées pendant une demi-heure après l’intervention mais elles retrouvent leur appétit très vite après cela. »  

Un autre lot de vaches de réforme est fini l'hiver à l’auge, dans de petites cases, et l’éleveur n’a pas à déplorer pour celles-ci de problèmes de comportement. Pour l’instant, il n’envisage pas de les faire castrer.

"Je fais castrer les réformes qui pâturent avec le lot des vaches suitées de mâles"

Le Gaec des Peupliers élève 50 Charolaises à La Pommeraye-sur-Loire dans le Maine-et-Loire. Depuis deux ans, Antoine Charrier fait castrer les vaches à l'engrais qui pâturent avec le lot des vaches suitées de mâles. Les vêlages étant groupés sur septembre et octobre, les veaux mâles sont matures au printemps et ils cavalent sinon derrière les vaches pendant les deux ou trois jours qui précèdent les chaleurs, et pendant encore une journée lors des chaleurs. L'éleveur pratique le pâturage tournant dynamique.

Cinq à sept vaches sont ainsi castrées fin mars, juste avant de sortir à l'herbe. "Désormais, les croissances des veaux mâles ne sont plus impactées par leur comportement. Et ils ne dégradent plus le couvert de la prairie, même si le temps est humide" explique Antoine Charrier. Auparavant, l'éleveur s'astreignait à rentrer pendant 24 heures chaque vache qui venait en chaleur. "Le fait de castrer les vaches de réforme a bien amélioré mes conditions de travail" apprécie-t-il aussi. "Je ne fais pas castrer celles qui pâturent avec le lot de veaux femelles, car l'agitation des animaux ne dure qu'une journée à chaque fois et cela n'a pas trop d'influence."

S. B.

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