« Nous avons investi en Cuma dans une remorque autochargeuse d’occasion pour accéder à une machine performante, tout en limitant le coût de revient »
Dans la Manche, la Cuma d’Ouville a fait le choix d’investir dans une remorque autochargeuse d’occasion. Cette démarche permet de disposer d’une machine performante et de grande capacité tout en maîtrisant les coûts.
Dans la Manche, la Cuma d’Ouville a fait le choix d’investir dans une remorque autochargeuse d’occasion. Cette démarche permet de disposer d’une machine performante et de grande capacité tout en maîtrisant les coûts.

« Contraints de renouveler la précédente remorque autochargeuse à la suite de la casse en 2023 du rotor d’alimentation en pleine saison d’ensilage, nous avons fait le choix d’acquérir un modèle plus grand et plus performant. Or, le prix élevé de ces machines en neuf nous a conduits à investir dans un modèle d’occasion récemment reconditionné, afin de maintenir un tarif acceptable », indique Flavien Lecler, président de la Cuma de l’entraide d’Ouville dans la Manche. La précédente autochargeuse, arrivée en 2019, avait aussi été achetée d’occasion. Elle avait permis de lancer l’activité sous l’impulsion de Flavien Lecler et de son frère Benoît, associés en Gaec, qui disposaient de ce type de machine sur leur exploitation familiale depuis 1982. « La récolte à l’autochargeuse présente de nombreux avantages. Elle permet notamment de mieux valoriser les prairies et de simplifier l’organisation des chantiers d’ensilage. Il suffit de deux personnes pour faire son silo d’herbe. Notre dernière machine, revendue en 2019, était en copropriété avec une exploitation voisine, également adhérente de la Cuma, et il nous semblait important de partager cette solution de récolte avec le groupe », précisent-ils. Sur les 26 adhérents, six se sont engagés sur l’autochargeuse, mais deux exploitations, dont le Gaec Lecler, réalisent 80 % de l’activité.

Un coût moyen de 65 euros par voyage
Arrivée pour la campagne 2024, la remorque Pöttinger Jumbo 7210 Combiline, d’un volume DIN de 41,5 m3 (72 m3 en décompressé), a été achetée 60 000 euros HT. Âgée de 15 ans, en bon état général et haut de gamme (Isobus, indicateur de remplissage et suspension d’essieux oléopneumatique), elle dispose d’un rotor neuf associé à un système de coupe à 45 couteaux doté de l’affûtage automatique. « La différence de qualité de coupe est nette entre cette machine et la précédente, dont les étoiles du rotor étaient émoussées », reconnaît Flavien Lecler. La première autochargeuse de la Cuma, une Pöttinger Jumbo 6600 de 39 m3 de volume DIN (66 m3 en décompressé), avait été achetée 25 000 euros, alors qu’elle affichait 1 000 voyages au compteur. Elle réalisait de 180 à 200 voyages par an et son coût d’utilisation, sans tracteur ni chauffeur, était de 45 euros par voyage. Pour sa première campagne, la nouvelle machine a réalisé 188 voyages, dont 50 pour le compte du Gaec Lecler. Le tarif est supérieur, 65 euros en moyenne, en raison du prix d’achat plus élevé. Il se compose d’une partie fixe de 56 euros et d’une somme variable liée à la distance parcourue pour tenir compte notamment de l’usure des pneumatiques (1,10 €/km). Un compteur hubodomètre fixé sur un essieu mesure les kilomètres et un relevé est réalisé au début et à la fin de chaque chantier. Les chiffres de 2024 révèlent un kilométrage moyen de huit kilomètres par voyage (route et champ).

Deux chauffeurs attitrés
Flavien Lecler considère que l’autochargeuse est à mettre uniquement dans les mains de chauffeurs expérimentés. Il est d’ailleurs l’un des deux seuls à conduire cette machine. Le second à en prendre les commandes est le salarié de la Cuma Désibol d’Ouville équipée d’une désileuse automotrice. « La remorque ensileuse demande un maximum d’attention et peut vite coûter cher si elle est malmenée, alerte Flavien Lecler. J’en ai moi-même fait l’amère expérience en explosant le boîtier d’entraînement principal du précédent modèle, à cause d’un tas d’herbe qui s’était coincé sur le côté du pick-up lors d’un virage, puis était monté brutalement. » L’agriculteur est aussi exigeant sur l’entretien, notamment sur le système de coupe. « À la fin de chaque journée d’ensilage, je nettoie au laveur haute pression le module de coupe et le pulvérise de lubrifiant. Gage de longévité, cette opération évite à la corrosion de s’installer entre les couteaux et leurs supports. Elle ne pénalise pas la fin du chantier, car durant ce temps le tasseur étale le dernier voyage et peaufine le silo », souligne-t-il.

Attention à la forme des andains
Pour son entraînement, la Jumbo 7210 est attelée au Massey Ferguson de 190 chevaux du Gaec Lecler ou au Case IH Puma 175 (175 ch avec le boost) de la Cuma. « Il est important d’utiliser un tracteur stable. La machine emporte l’équivalent d’un hectare dans sa caisse, voire 0,6 à 0,7 hectare s’il y a beaucoup de fourrage. Nous roulons en moyenne à 8-10 km/h et au plus vite à 17 km/h en deuxième coupe sur du terrain bien nivelé, précise Flavien Lecler. Cette allure permet de bien alimenter le rotor pour garantir un bon hachage. La qualité d’andainage est aussi déterminante pour le bon fonctionnement du système de coupe. Je conseille d’utiliser un appareil à deux rotors réalisant un andain central, car il ne forme pas de paquets et assure ainsi une alimentation sans à-coup, contrairement aux andaineurs doubles à dépose latérale. » La qualité de coupe passe également par le bon état des couteaux. L’affûtage est réalisé une à deux fois par jour à l’aide du dispositif embarqué sur la remorque. « Cette intervention est complétée d’un affûtage sur une meule à poste fixe tous les 50 voyages. L’idéal est de disposer d’un second jeu de couteaux pour "switcher" rapidement en cours de chantier, en cas, par exemple, d’absorption d’une pierre. »

Démarrer tôt les chantiers
Pour Flavien Lecler, un chantier à la remorque autochargeuse doit démarrer tôt le matin. « Je réalise, selon la distance des parcelles par rapport au silo, de 1,2 à 1,5 voyage par heure. Pour les plus gros chantiers allant de 20 à 25 hectares à ramasser dans la journée, j’attaque généralement à 6 heures, afin d’avoir réalisé au moins trois voyages pour 8 heures, au moment où l’agriculteur commence généralement la confection du tas. » Pour homogénéiser l’ensilage et mélanger les différentes variétés d’herbe récoltées, le ramassage s’opère souvent en changeant de champ à chaque voyage. Les parcelles les plus éloignées sont parfois récoltées en dernier, afin de laisser le temps au tasseur de monter le fourrage sur le haut du silo et de fouler correctement.
La Cuma de l’entraide d’Ouville (50) en chiffres
27 adhérents
78 000 euros de chiffre d’affaires 2024
1 tracteur Case IH Puma 175
40 matériels partagés
60 000 euros HT investis en 2024 dans la remorque autochargeuse d’occasion
180 à 200 voyages réalisés par an avec l’autochargeuse
65 euros HT de prix moyen facturé par voyage en 2024
« La Cuma doit proposer de nouvelles activités »

Benoît et Flavien Lecler, éleveurs à Ouville dans la Manche, sont très investis dans les deux Cuma de leur commune. Ils s’attachent d’ailleurs à y développer de nouvelles activités, à l’instar de la remorque autochargeuse. Benoît Lecler est président de la Cuma Désibol de désilage, tandis que Flavien Lecler préside la Cuma de l’entraide. Pour le compte de ces deux coopératives d’utilisation de matériels agricoles, ils logent sur leur exploitation la mélangeuse automotrice Faresin, le tracteur Case IH Puma 175 et pas moins de 15 outils. « C’est logique que les matériels les plus utilisés avec le tracteur soient regroupés au même endroit », souligne Flavien Lecler. Ce dernier s’est par exemple battu pour lancer l’activité tracteur, car certains adhérents pensaient qu’il n’y aurait pas eu assez de travail à lui donner. Or, dès la première année, le modèle de 175 chevaux a réalisé 600 heures, bien au-delà de l’engagement initial de 400 heures, dont 120 heures pour le Gaec Lecler. Pour la fenaison, le président a également dû batailler pour l’acquisition du premier andaineur double en 2014 (à compléter SVP). Il a là aussi réussi son pari, car l’activité a connu un réel essor et la Cuma vient de signer début 2025 pour quatre appareils à double rotor, dont trois dans le cadre du renouvellement. Flavien Lecler a par ailleurs mis en place l’application myCuma Planning pour faciliter la réservation du tracteur et de l’ensemble des matériels. « Ce service coûte certes 400 euros par an, mais il nous dispense de la gestion des calendriers par outil », apprécie-t-il.