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Vinification et élevage du vin : une analyse de « Brettanomyces » chez soi en 40 minutes chrono

Les appareils d’analyse fleurissant sur le marché, nous vous proposons une série sur les derniers modèles sortis. Premier épisode avec le Chronos, d’Œnobiote, primé par le jury de l’innovation du Vinitech.

« Une méthode très sensible, un outil simple et rapide. » C’est ainsi que Béatrice Merle, œnologue au laboratoire Les Vins Georges Duboeuf, à Romanèche-Thorins, en Saône-et-Loire, décrit le nouvel appareil Chronos d’Œnobiote, qu’elle teste actuellement sur Brettanomyces.

L’entreprise a en effet lancé, en février 2024, une machine permettant de passer au crible le matériel génétique (ADN et ARN) d’un échantillon de vin grâce à des analyses microbiologiques moléculaires ultrarapides. « Mesurer à la fois l’ARN et l’ADN permet de distinguer les micro-organismes vivants des cellules faibles ou des résidus de contaminations passées », décrypte Jérôme Iglésias, managing director d’Œnobiote. Et ce, qu’il s’agisse de levures ou de bactéries. L’entreprise propose en effet une gamme de tests allant des Brettanomyces, à la mise postfiltration (levures totales, Brettanomyces, bactéries lactiques et acétiques), en passant par les vins désalcoolisés (Escherichia coli, Enterobacter).

Une analyse de la lyse en 20 minutes seulement

Concrètement, l’appareil, qui est un système compact d’analyses RT-qPCR et dPCR, se présente sous la forme d’une machine de 7 kg, dans laquelle on insère une languette avec une puce contenant des réactifs RT-qPCR et dPCR et l’échantillon à analyser. Ce dernier est obtenu par centrifugation puis lyse du vin. 20 minutes plus tard, Chronos fournit le résultat. « Ce qui fait qu’avec la préparation de l’échantillon, qui prend une quinzaine de minutes, on peut avoir un résultat en 35 à 40 minutes, se réjouit l’œnologue du Beaujolais. Cela permet d’intervenir au bon moment. La prise de décision est rapide, ce qui évite une prolifération des bretts et permet de sauver des cuves. »

Et ce d’autant plus que le résultat est très précis. « Jusqu’à présent, nous utilisions des boîtes de Petri et l’appareil Vériflow de bioMérieux, détaille Béatrice Merle. Nous avons donc continué à les employer en parallèle de celui d’Œnobiote. Les résultats sont bien corrélés. Parfois, nous avons des tests négatifs sur Vériflow et boîtes mais qui sortent positifs avec Œnobiote. Cela provient du fait que le seuil de détection est plus bas, la méthode est plus sensible. » L’œnologue apprécie de savoir si les cellules sont vivantes ou mortes. « Ainsi, on peut vérifier l’efficacité d’un traitement au chitosane, poursuit-elle. Si toutes les cellules de bretts sont mortes, c’est que c’est bon. »

De même, elle affectionne la quantification précise des cellules, une donnée qu’elle n’avait pas avec les autres tests dans leurs configurations chez elle. L’appareil fournit en outre un indice de viabilité, qui lui semble très utile. « C’est une note sur cinq, précise-elle. Si on se situe au-dessus de 4, cela signifie que la situation est critique et qu’il faut intervenir, par exemple avec un traitement au chitosane. Entre 3 et 4, il faut suivre la situation. En dessous de 3, il n’y a pas de risque. C’est vraiment bien sur le terrain, pour les opérateurs. »

Un protocole encore à affiner en fermentation

L’œnologue a testé l’appareil en élevage, où il fonctionne parfaitement, mais aussi durant la fermentation. « Mais là, c’est moins au point, regrette-t-elle. L’entreprise travaille sur le sujet, afin de mettre au point un protocole plus adéquat. Pour notre part, nous diluons l’échantillon par dix et cela fonctionne. » De même, s’il est bien adapté aux matrices rouges, le protocole est moins approprié pour les blancs. Là aussi, Béatrice Merle procède à une dilution de l’échantillon pour pouvoir interpréter les résultats.

L’œnologue souligne qu’il est possible de travailler sur six échantillons en simultané, ce qui est un atout, et que la mise en œuvre est aisée. En revanche, l’insertion de la lyse dans la puce contenant les réactifs peut s’avérer délicate. « Il y a un tout petit orifice dans lequel il faut déposer 25 microlitres avec une micropipette, témoigne-t-elle. C’est minutieux et un peu laborieux pour les quatre ou cinq premières puces. Après, une fois qu’on a compris la technique, ça va tout seul. »

Trois résultats à interpréter

De même, l’interprétation des résultats lui semble encore un peu ardue. « On a trois résultats, rapporte-t-elle. J’envoie les courbes à l’entreprise qui me fait un retour rapide pour l’interprétation. Mais à terme, l’objectif est qu’on puisse les interpréter seuls. »

Béatrice Merle n’a pas eu de problème avec l’appareil, ni de panne. Elle juge le logiciel simple d’emploi, la machine facile à utiliser. « Il y a juste la centrifugeuse, le vortex et le micro-ondes, le tout fourni par l’entreprise », énumère-t-elle. L’appareil se connecte en Wi-Fi ou 4G pour stocker les résultats des analyses dans un cloud sécurisé. Il réalise également seul des mises à jour et des maintenances à distance.

L’appareil Chronos vaut 15 000 euros, mais peut être acquis en LOA (location avec option d’achat) à raison de 450 euros par mois, sur cinq ans. Un coût auquel il faut ajouter celui des consommables, un test bretts valant 25 euros. La société propose également un pack avec le μWave Lyser, qui extrait l’ADN et l’ARN en quelques secondes, et du petit matériel, pour 3 000 euros.

repères

Chronos d’Œnobiote

Objectif : quantifier les micro-organismes d’un échantillon

Technologies employées : RT-qPCR et dPCR

Principal atout : rapidité, résultats en 40 minutes

Prix : 15 000 euros plus les consommables

lexique

Démocratisée par la crise du Covid, l’analyse PCR, pour polymerase chain reaction ou réaction de polymérase en chaîne, permet d’obtenir rapidement un grand nombre de segments d’ADN identiques à partir d’une séquence initiale, et ainsi de détecter la présence d’un micro-organisme donné dans un échantillon.

La RT-qPCR est une PCR de quantification en temps réel.

La dPCR est une PCR digitale.

Bientôt une analyse prédictive pour les vignes

La société Œnobiote est un spin-off de l’entreprise BforCure, spécialisée dans la microbiologie moléculaire rapide. Créée en 2018, cette société a déjà près de 30 brevets à son actif, dans différents domaines que sont l’eau, la santé ou la défense.

Dans la filière vitivinicole, son objectif est d’arriver à analyser le microbiote tant du vin que de la vigne. « Nous avons développé une technologie pour, en un seul test, pouvoir cartographier les micro-organismes d’un échantillon, se félicite Jérôme Iglésias. Le but est maintenant d’aller sur le prédictif, afin que cela puisse anticiper que si le pH, ou la température, augmente de tant, telle ou telle contamination risque de se produire. » Verdict d’ici deux ans.

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