S’organiser contre les vols sur les exploitations viticoles
Le raisin, le gasoil ou encore le matériel agricole sont des biens de plus en plus convoités. Voici nos conseils pour vous prémunir de tout vol.
Le raisin, le gasoil ou encore le matériel agricole sont des biens de plus en plus convoités. Voici nos conseils pour vous prémunir de tout vol.
Cette année encore, de nombreux vols de raisins ont défrayé la chronique. Bordeaux, Languedoc, Champagne… Peu de vignobles ont été épargnés. Mais la vendange n’est pas la seule cible des cambrioleurs. Piquets, gasoil, tracteurs et stocks de vin disparaissent régulièrement. S’il est difficile d’éviter tout vol, il existe toutefois des moyens de les limiter. « La vulnérabilité de ces exploitations tient au fait qu’elles sont bien souvent isolées », explique le capitaine Séverine Hammel, référent sûreté à la Direction générale de la gendarmerie nationale. Lorsque de l’élaboration d’une réflexion pour se prémunir des vols, elle conseille « d’aller du plus loin au plus près, sans se focaliser sur ce que l’on doit protéger ». C’est-à-dire qu’il faut commencer par augmenter le niveau de sûreté général de l’exploitation, pour ensuite protéger les objets.
Aller à la rencontre du brigadier en charge de la sûreté
Cela passe donc tout d’abord par une prise de contact avec sa gendarmerie, pour exposer les problématiques. « Il existe dans chaque département des référents sûreté, informe Séverine Hammel. Ils sont spécifiquement formés à la prévention technique de la malveillance, et sont à la disposition des exploitants pour apporter des conseils législatifs, matériels ou humains, voire pour réaliser un diagnostic. » Face à la recrudescence de vols au sein dans la filière agricole, les ministères de l’Agriculture et de l’Intérieur ont également pris des mesures en 2014, ayant abouti au dispositif VigiAgri. Mis en place dans cinquante-huit départements, il permet aux agriculteurs d’être prévenus par mail ou SMS en cas de vol dans le secteur. « Cela permet d’attirer l’attention des exploitants afin qu’ils soient plus vigilants, mais aussi de faciliter la communication entre forces de l’ordre et agriculteurs et rompre l’isolement », affirme le capitaine. Un dispositif qui semble payant puisque l’an dernier les vols agricoles sans effraction (hangar, champs…) ont diminué de 15 % (8 089 faits simples recensés en métropole). L’experte suggère aussi de signaler ses absences prolongées, ainsi que ses livraisons sensibles à la gendarmerie et à ses voisins, et de s’abonner aux pages Facebook des antennes locales, qui distillent des conseils de prévention.
Compliquer la tâche du cambrioleur pour limiter les pertes
À ces préconisations globales s’ajoutent quelques règles de bon sens, qui ne sont pas toujours mises en œuvre dans les exploitations. Il s’agit par exemple de ne pas laisser les clés sur les tracteurs et de ranger les outils tels que les pieds de biche ou échelles, qui peuvent faciliter l’effraction. « D’une façon générale, un hangar rangé et une bonne maîtrise de l’espace réduisent le sentiment d’impunité du malfaiteur, poursuit Séverine Hammel. Il faut également penser à protéger ce qui peut l’être et ce qui a le plus de valeur dans un endroit verrouillé : les vols en agriculture sont souvent commis sans effraction. » Ce qui ne peut pas être mis sous clé doit être rangé de préférence au fond du hangar, pour en compliquer l’accès. Ce n’est qu’ensuite que les dispositifs permettant de dissuader, de ralentir ou de détecter les malfaiteurs entrent en jeu. Un éclairage à détection de présence autour des locaux, par exemple, est un bon moyen de faire fuir un individu ayant de mauvaises intentions. Il est également possible de relier les détecteurs de mouvement à un téléphone, pour recevoir un SMS en cas d’intrusion, ou à un piège photographique, qui prend un cliché au moment de la détection (environ 500 euros). Deux solutions à installer plutôt en intérieur, à cause des animaux. Avec davantage de budget, le vigneron peut opter pour la vidéoprotection. Attention toutefois, car dans un lieu public, comme un caveau de vente, cela nécessite une autorisation préfectorale.
Personnaliser son tracteur pour le rendre moins attrayant
« À chaque étape, il ne faut pas hésiter à multiplier les obstacles, qui sont autant de chances de décourager le voleur, préconise le capitaine. Pour un local sensible comme celui du stockage de vin, on peut veiller à coupler l’alarme de détection avec des serrures multipoints. » Il s’agit également d’être homogène est cohérent. Autrement dit, il faut éviter de mettre une grosse serrure sur un local en tôle fine ou bien de placer l’armoire avec les objets de valeurs juste à côté de la porte.
Une fois que cela est fait, il est possible de protéger des équipements en particulier. Ainsi, pour sécuriser la cuve de fioul, on peut couper l’alimentation le soir et/ou installer un dispositif de blocage du pistolet. De même, il existe des antivols efficaces pour les réservoirs, à crépine ou à ailettes. « Mais je ne conseille pas forcément ces dispositifs, car il y a un risque que le voleur perce le réservoir, ce qui augmente le préjudice final, estime Séverine Hammel. Mieux vaut éviter de faire le plein si cela n’est pas nécessaire, remplir le matin plutôt que le soir ou encore stationner l’engin de façon à compliquer l’accès au réservoir. » Pour le tracteur, il est recommandé de couper la batterie, et de dissimuler un deuxième coupe-batterie, car bien souvent une seule clé fonctionne sur tous les barillets d’origine d’un même modèle. Les antivols mécaniques, de type cannes, aident aussi à dissuader le cambrioleur. Les gendarmes conseillent également d’opter, dès l’achat, pour un système de géolocalisation par GPS et pour un antidémarrage. De même, un tracteur repeint ou personnalisé sera facilement reconnaissable et donc moins attirant. En règle générale, il est toujours bon d’avoir des éléments de lutte redondants et complémentaires, sans forcément miser sur un seul dispositif, même de qualité.
Être attentif aux individus suspects qui viennent en repérage
Dans les vignes, il est possible de protéger sa vendange en empêchant l’accès des véhicules à la parcelle à l’approche de la maturité. Pour cela, on peut employer des grosses pierres ou des sacs de sable positionnés sur le chemin. Il est conseillé également de varier les horaires de passage dans les parcelles, pour rendre l’organisation du vol plus incertaine. C’est d’ailleurs un point sur lequel le viticulteur doit être vigilant : en cas de criminalité organisée, il y a toujours un repérage de jour. Signalez les comportements suspects et les individus qui rôdent à proximité de l’exploitation, et pensez à noter les plaques d’immatriculation. « Il faut se faire confiance, on a le droit de se tromper. De toute façon nous n’allons pas interpeller la personne de suite ! », rassure Séverine Hammel. « Et en cas de passage à l’acte, on ne joue pas les héros, ajoute-t-elle. Le plus sage est d’appeler les forces de l’ordre. Quoi qu’il en soit on analyse le risque encouru par rapport à la valeur du bien. »
En cas de vol, il est primordial de le déclarer et de déposer une plainte, ce qui est trop souvent négligé. Pour les atteintes aux biens par un auteur inconnu, il existe désormais un formulaire en ligne qui permet de gagner du temps, accessible sur le site www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr.
La plupart des assurances proposent une garantie « vol ». Toutefois, il faut vérifier qu’elle se déclenche bien en cas de pépin. Pour cela, pensez à faire estimer vos biens et/ou à en préserver une trace en gardant les factures et en prenant des photos. Ce sont autant de gages qui établiront ce que vous possédez. Veillez également à conserver toutes les preuves du délit, comme les traces d’effraction ou les dégâts causés par le cambrioleur. Une plainte doit être déposée sous 48 heures, et l’assurance doit être prévenue sous le même délai.